Adieu l’année d’adaptation pour la réforme du bac qui avait été évoquée en juin dernier. Le contrôle continu au bac s’appliquera dès 2022, comme nous l’avions annoncé le 29 juin. Il se fera sous surveillance du conseil pédagogique. Le ministère rétablit les options au bac avec un nouveau mode de calcul des points au bac. Cette évolution éloigne le bac d’un diplôme national et justifie au final l’utilisation par parcoursup de l’identité des établissements comme modalité de tri.
Un « vrai » contrôle continu
Un décret et un arrêté publiés au JO du 28 juillet confirment ce qu’on savait de la réforme du bac lancée en juin dernier. Dès la session 2022, un « vrai » controle continu s’installe en lieu et place des « épreuves communes ».
La note de controle continu compte pour 40% de la note finale du bac. Elle se compose des éléments suivants : « pour une part de trente pour cent (30 %), l’évaluation chiffrée annuelle, correspondant à la moyenne des moyennes constatées en conseil de classe des résultats de l’élève au cours du cycle terminal, en histoire-géographie, en enseignement scientifique (dans la voie générale), en mathématiques (dans la voie technologique), en langue vivante A, en langue vivante B et à la note du contrôle en cours de formation en éducation physique et sportive, chacun de ces enseignements comptant à poids égal, soit six pour cent (6 %), sur le cycle terminal. En histoire-géographie, en enseignement scientifique (dans la voie générale), en mathématiques (dans la voie technologique), en langue vivante A et en langue vivante B, le résultat de l’élève, pris en compte dans le calcul de cette évaluation chiffrée, correspond à la moyenne des moyennes annuelles de première et de terminale, constatées en conseil de classe, chacune de ces moyennes étant pondérée à hauteur de trois pour cent (3 %). En éducation physique et sportive, le résultat de l’élève, pris en compte dans le calcul de cette évaluation chiffrée, correspond à la note obtenue au contrôle en cours de formation, pondérée à hauteur de six pour cent (6 %) ; pour une part de huit pour cent (8 %), l’évaluation chiffrée annuelle, correspondant à la moyenne des moyennes constatées en conseil de classe, des résultats de l’élève dans l’enseignement de spécialité suivi uniquement en classe de première ; pour une part de deux pour cent (2 %), l’évaluation chiffrée annuelle, correspondant à la moyenne générale des résultats obtenus par l’élève dans l’enseignement moral et civique à hauteur de 1 % pour les résultats de l’année de première et de 1 % pour les résultats de l’année de terminale ».
On arrive donc à une répartition identique en série générale et technologique si ce n’est la place de l’enseignement scientifique et des maths.
La surveillance du conseil pédagogique
Ce contrôle continu est effectué sous la surveillance du conseil pédagogique : « L’organisation du contrôle continu pour le baccalauréat général et technologique fait l’objet d’un projet d’évaluation travaillé en conseil d’enseignement, validé en conseil pédagogique et présenté au conseil d’administration dans les établissements publics d’enseignement, et élaboré dans le cadre d’une concertation au sein de l’équipe pédagogique dans les établissements privés ayant passé un contrat avec l’Etat ». Ce point avait fait débat, des syndicats, comme le Snes FSU, y voyant un contrôle pédagogique des enseignants par la direction de l’établissement. On peut penser que dans les mesures d’harmonisation interne il y aura au moins un nombre de notes imposé à tous les enseignants par discipline et peut etre aussi une harmonisation forcée des progressions.
Le cas du hors contrat
Voilà pour les candidats de l’enseignement public et du privé sous contrat. Les candidats du privé hors contrat ont un autre système d’évaluation. Ils sont convoqués à des « évaluations ponctuelles ». « Les sujets de ces évaluations ponctuelles sont élaborés sous l’autorité du ministre chargé de l’éducation nationale. Ces sujets sont centralisés dans une banque nationale numérique. Chaque candidat formule, au moment de son inscription à l’examen, un choix entre les deux modalités d’organisation suivantes : 1° Soit il se présente à ces évaluations ponctuelles à la fin du cycle terminal. Dans ce cas, ces évaluations ponctuelles portent sur le programme du cycle terminal en histoire-géographie, en langue vivante A, en langue vivante B, en enseignement scientifique (pour la voie générale) et en mathématiques (pour la voie technologique) et sur le programme de la classe de première dans l’enseignement de spécialité suivi uniquement en classe de première. Soit il se présente à ces évaluations ponctuelles en fin de chaque année du cycle terminal, afin d’être successivement évalué en fin de classe de première sur le programme de la classe de première en histoire-géographie, en langue vivante A, en langue vivante B, en enseignement scientifique (pour la voie générale), en mathématiques (pour la voie technologique), et dans l’enseignement de spécialité suivi uniquement en classe de première, puis en fin de classe de terminale sur le programme de la classe de terminale dans ces mêmes enseignements, à l’exception de l’enseignement suivi uniquement en classe de première… La note globale de contrôle continu affectée d’un coefficient 40, mentionnée à l’article 1er est fixée en tenant compte des notes obtenues à ces évaluations ponctuelles. Elle est communiquée par le recteur d’académie au candidat et au jury de l’examen du baccalauréat ».
Curieusement les textes ne disent pas comment sont organisées ces évaluations ponctuelles et qui va évaluer les candidats. En l’absence de réponse du ministère, on verra si ce flou cache un loup…
Le retour des options
Reste le cas des options. Jusque là seule les langues anciennes étaient prises en compte pour le bac. La réforme redonne leur place aux options. Les résultats obtenus aux options sont affectés chacun d’un coefficient 2 par année d’enseignement. Celles ci sont limitées à une option en première et deux en terminale. Mais les langues anciennes gardent un statut dérogatoire : l’enseignement de langues anciennes peut s’ajouter aux options suivies et chaque langue suivie peut compter pour un coefficient 2 par année d’enseignement.
L’offre de spécialités sera réduite
Les conséquences de cette réforme, introduite en exploitant la situation issue de la crise sanitaire, sont bien connues.
La première va être la réduction de l’offre de spécialités dans les établissements. A partir du moment où les options reviennent il faut les financer. P Mathiot a été très clair sur ce point le 16 juin. « On était arrivé à un grand nombre de triplettes. Si un lycée va vers 20 triplettes proposées c’est pas mal… Si dans un lycée on réduit l’offre de triplettes on reste dans l’esprit de la réforme et on regagne des moyens sur la DHG à condition que les professeurs acceptent de modifier leur emploi du temps ». ET B Bobkiewicz avait donné son feu vert : « Si chaque établissement n’a pas toutes les spécialités ce n’est pas très grave ». Pourtant cela risque d’être mal pris sur le terrain.
Un bac local
La seconde c’est bien sur la perte du caractère national de l’examen. Au lieu des mini examens nationaux des E3C on a une note propre au lycée , même si le ministère promet un « guide d’évaluation » élaboré par l’Inspection générale et le maintien de la banque de sujets. Le bac devient un diplôme d’établissement. Il est vrai qu’il n’est plus utilisé pour l’orientation via Parcoursup. Mais la mise en place du controle continu intégral justifie après coup la pratique de Parcoursup de sélectionner les étudiants selon leur établissement d’origine. Il n’y a plus d’examen national anonyme où chacun a sa chance. C’est en fonction de la résidence de ses parents et de l’accès aux établissements de centre ville, autrement dit de son appartenance sociale, que les portes du supérieur s’ouvrent.
Des profs sous pression des parents
La troisième conséquence va peser très rapidement sur les professeurs. Même les syndicats de personnels de direction reconnaissent la montée des pressions des parents sur les enseignants pour l’évaluation. Avec le passage au controle continu intégral et ce bachotage permanent ces pressions vont augmenter. Cela ne sera pas sans conséquences sur les conditions de travail des enseignants.
François Jarraud