Pierre Frackowiak, de la victime médiatisée à l’inspecteur « honoraire » donneur de leçons
Quelles sont donc les qualités particulières de M. Frackowiak pour qu’il se permette d’écrire un tel ramassis de lieux communs sur ses collègues ? L’humanisme, la tolérance, certes pas… Le respect de l’autre guère plus…
Je suis profondément choquée par des propos qui mettent en cause tout un corps auquel un inspecteur… modèle sans aucun doute…a appartenu.
Non, M. Frackowiack, les collègues d’aujourd’hui ne sont pas plus pleutres ou lâches que vous même. Oui, M. Frackowiak ; des inspecteurs œuvrent aujourd’hui dans le cadre d’un projet de société qui leur est cher sans être pour autant dans la mouvance néo-libérale, loin s’en faut. Ils ne sont pas moins cultivés que vous, ni moins pédagogues et ils ne revendiquent pas le fait d’avoir toujours eu de bonnes relations avec leur IA ( ceci semble être un critère pour vous). Ils ne méprisent pas la fonction de directeur, ni le projet de certains conseillers pédagogiques de vouloir devenir inspecteur. L’histoire, M. Frackowiak, ne se lit pas au seul filtre de son ambition et de ses désirs. On peut œuvrer à l’intérieur d’un système pour qu’il évolue. On ne doit pas laisser ces fonctions occupées par quelques félons ou pleutres…Et c’est ce qu’un certain nombre d’entre nous font au jour le jour avec courage et dévouement. Quant aux relations que nous avons avec les enseignants, qui avez-vous donc rencontré M. Frackowiak, pour énoncer de telles certitudes supposées ? Tous les enseignants, un échantillon représentatif ?…Non, ceux qui sans doute à juste titre ont à se plaindre de leur hiérarchie…Les inspecteurs ne sont pas des modèles, à part vous sans doute, mais la plupart travaillent quotidiennement avec les enseignants et leur équipe à la réalisation d’une école plus juste. Et j’ai quelques années d’ancienneté dans ce métier, plusieurs départements et plusieurs académies à mon actif. Oui, les temps ne sont pas faciles, M. Frackowiak, et votre discours destructeur pas très encourageant. Je trouve même qu’il facilite le travail de sape en vogue dans certains milieux. Continuez donc, Monsieur l’Inspecteur honoraire et je suis sûre que vous aurez, grâce à vos paroles faciles et quelques fois racoleuses, contribué à donner une mauvaise image de notre métier, de l’école, de ses inspecteurs et aussi de ses enseignants.
J’ai honte, M. Frackowiack de vos propos démagogiques et j’ai horreur des victimes d’un soir qui en profitent pour s’ériger en sommité nationale
Marie-Laure Bourguignon
Et si on sortait des clichés ?
En accord ou non avec la politique gouvernementale, l’IEN, tout comme les professeurs des écoles dans leurs classes, doit appliquer les décisions d’un président élu au suffrage universel. Néanmoins l’IEN est là pour donner du sens aux orientations du Ministère, il essaie d’apporter de la souplesse aux équipes, cela été, nous semble-t-il, le cas pour les nouveaux programmes et l’aide personnalisée.
Cela implique de donner du sens et de la cohérence en expliquant la logique d’ensemble (contexte diachronique et européen). L’individualisation des parcours est une idée européenne tout comme le Socle. Ce dernier, comme les évaluations nationales sont en liens avec la LOLF, votée à l’unanimité du parlement : ce contexte d’ensemble échappe parfois à l’enseignant dans son action quotidienne.
Le rôle de l’IEN a changé, ce n’est plus la même posture : c’est un cadre A qui exerce des responsabilités en relation avec d’autres cadres A que sont les professeurs des écoles, c’est à dire que ces derniers doivent avoir le sens des responsabilités également, être capables de faire des choix et de faire preuve d’initiatives. L’IEN ne s’appuie pas sur des clichés ou des idées reçues, il attend d’un professeur des écoles qu’il construise des solutions adaptées aux problèmes spécifiques de sa classe. L’entretien d’inspection, la formation, les CMC… sont autant de leviers pour faire évoluer les pratiques des uns comme des autres.
Il nous semble que le métier d’IEN a fortement évolué, comme est entrain d’évoluer le métier de professeur des écoles, d’où ce mal être, voire cette souffrance des enseignants comme des IEN devant cette mutation. L’inspecteur ne peut plus être le « notable » de sa circonscription car il doit, au-delà de l’impulsion, co-construire l’Ecole de demain avec les équipes enseignantes.
Deux collègues IEN pas honoraires
« je n’ai eu de cesse que d’être aux côtés des enseignants »
Cher Pierre,
Je suis, moi aussi, en retraite, depuis l’année passée. Comme toi, j’ai vécu très difficilement les dernières années de politiques éducatives, et j’ai pu constater au quotidien les ravages motivationnels, chez les enseignants, de certaines politiques récentes.
Cependant, je voudrais fraternellement te dire que, dans la ZEP où je travaillais, je n’ai eu de cesse de travailler aux côtés des enseignants, de les aider à trouver les marges d’actions collectives pour mieux faire apprendre leurs élèves, de monter malgré tout des formations qui servent d’appui aux projets qu’ils montaient, de les accompagner face aux fréquents dysfonctionnements et perturbations qu’ils avaient à subir.
Certes, j’ai aussi croisé des collègues arrivistes, persuadés que leur nouveau costume allait faire d’eux des managers, pleins d’orgueil des prétendues vertus de leur logiciel générateur de tableaux et de pilotage, vite méprisants envers leurs anciens collègues, davantage soucieux de plaire et de flatter que d’être reconnus du terrain. Mais dans l’ensemble, crois-moi, il me semble avoir cotoyé plus de collègues tiraillés entre la légitimité du terrain et la loyauté consubstantielle à leur éthique professionnelle. Plus de gens le cul entre deux chaises que de héraults.
Certes, tu as sans doute raison sur un point : notre capacité d’action (et de réaction) collective n’est pas toujours à la hauteur, comme celle, d’ailleurs, des enseignants ou des personnels administratifs… C’est vrai, le syndicalisme des inspecteurs, comme celui des enseignants et des administratifs, n’est pas assez efficace, pas assez dénué d’ambigüité, pas assez capable d’analyser l’avenir, de se méfier des carottes et des hochets, ou de faire des propositions pour faire « bouger le métier ». Mais toi qui connais bien ce milieu, tu as aussi sans doute de bonnes raisons de savoir pourquoi ?
Martine, IEN retraitée, et contente de l’être.