« Déboussolés, désabusés. On est en proie au doute ». A quelques semaines de l’élection présidentielle, le Snes marque sa distance avec le quinquennat Hollande. Tout en reconnaissant que la présidentielle de 2017 se présente avec des enjeux autrement plus graves qu’en 2012, le premier syndicat du secondaire marque le pas. Il n’a toujours pas digéré la réforme du collège et les divisions qu’elle a entrainé. Séquence morose…
La trace durable de la réforme du collège
« Le bilan du quinquennat est mitigé. Il y a eu un véritable souffle au départ avec la loi de refondation. Et puis un certain nombre de difficultés sont apparues sur le terrain ». Frédérique Rolet, secrétaire générale du Snes, dresse un tableau nuancé mais sombre des années Hollande. « La montée démographique dans le second degré n’a pas été anticipée et les créations de postes ont été insuffisantes. Les enseignants n’ont pas été traités avec respect notamment à travers la réforme du collège. Beaucoup de collègues ont eu le sentiment qu’on ne les écoutait pas ». Pour F Rolet, à quelques jours des échéances électorales, les enseignants sont « déboussolés, désabusés ». En collège, les enseignants « ne savent plus ce qu’ils doivent enseigner ».
Pour Benoit Teste, secrétaire général adjoint, les enseignants « sont tentés par l’abstention » et « en proie au doute ». La relation entre chef d’établissement et enseignants a connu « une forte dégradation en lien avec la réforme du collège » qui a « donné la main « aux chefs d’établissement. Frédérique Rolet pensent qu’ils sont partagés entre les questions professionnelles et des questions générales comme les suppressions de postes de fonctionnaires.
Comme les enseignants, le syndicat se dit peu engagé dans le débat électoral. Il affirme avoir moins de rapports avec les équipes des candidats qu’en 2012.
Inquiétudes devant l’autonomie des établissements
Cela ne l’empêche pas d’interroger les candidats. La question des relations entre enseignants et chef d’établissement revient plusieurs fois. Le Snes dénonce des « équipes pédagogiques qui n’ont jamais été autant caporalisées ». Il demande « la réorganisation de la répartition des compétences entre le chef d’établissement , le conseil d ‘administration et les équipes pédagogiques afin d’établir des équilibres qui ne transforment pas les professionnels en simples exécutants ». Le Snes souhaiterait par exemple que la lettre de mission du chef d’établissement soit publique.
La question de l’autonomie des établissements, brandies par plusieurs candidats, inquiète le Snes. « On aimerait être entendus dans l’idée que le cadre national n’est pas archaïque et qu’il est bon pour faire évoluer la pédagogie », explique B teste.
Le Snes veut aussi que le recrutement d’enseignants continue. « Pour abaisser de 10% les effectifs des classes 26 000 emplois sont nécessaires », calcule le syndicat. Le Snes souhaite aussi doubler le recrutement de psychologues de l’éducation nationale.
Difficile unité syndicale
Certes François Fillon, et ses 500 000 suppressions de poste de fonctionnaires, fait peur. « Il faudra une réforme de structure pour atteindre 500 000 postes » estime B Teste.
La montée de l’extrême droite inquiète aussi. Mais le Snes ne croit pas trop dans les chances de réunir un front syndical. « Rassembler la gauche est compliqué », nous a dit F. Rolet. « On a essayé de faire un appel commun sur des thèmes de la fonction publique. Mais le Sgen Cfdt n’est pas venu et l’Unsa ne devrait pas être là à la prochaine réunion », affirme-t-elle. « C’est mortifère de faire les choses comme cela. Mais il y a eu la loi travail qui a clivé le paysage syndical ».
A quelques semaines de l’orage qui s’annonce, le Snes est dans l’attente. On est loin de 2012.
François Jarraud