Comment comprendre l’effet de serre grâce à des microcontrôleurs ? Guillaume Berthelot, enseignant de SVT au collège Jean de la Fontaine du Mée-sur-Seine (77) a testé un dispositif avec ses élèves pour remplacer les dispositifs ExAO traditionnels. L’idée est de rendre plus concret l’effet de serre en créant et programmant des appareils de mesure. « Pour les collèges les moins familiarisés avec la programmation par bloc et les microcontrôleurs, je conseillerai de commencer avec un petit groupe soit en fin d’année scolaire, soit au sein d’un atelier ».
Quel est ce projet ?
Cette année, le sujet des TRAAM (travaux académiques mutualisés) portait sur les microcontrôleurs. Il s’agissait donc d’expérimenter et de tester des séances en utilisant des cartes de type Arduino ou Microbit et en y connectant divers modules.
Au moment où j’ai dû choisir une notion à aborder, j’étais en train d’étudier l’effet de serre et je me suis demandé ce que je pouvais faire dans ce cadre. Il se trouve qu’à ce moment je cherchais à faire comprendre aux élèves que l’effet de serre ne consistait pas en une réflexion du rayonnement infrarouge, mais en une absorption et réémission. Ces dernières années, j’ai essayé diverses façons de leur faire comprendre cela sans jamais vraiment y parvenir et je me suis dit que c’était peut-être le moment de tester autre chose et de rendre plus concret ce phénomène.
J’ai donc montré et expliqué le schéma de l’effet de serre à mes élèves puis je leur ai demandé de répondre à la question suivante : est-ce qu’un objet tel que la Terre ou l’atmosphère (avec une température inférieure à 30 °C) émet bien un rayonnement thermique ?
Ils ont dû assembler des cartes électroniques et ces capteurs pour construire un appareil de mesure. Ensuite, ils ont complété un programme simple par bloc pour faire fonctionner l’appareil de mesure et ont enfin réalisé les mesures sur un objet chaud et sur un objet à température ambiante pour répondre à la question.
Quels sont les principaux objectifs pédagogiques de ce projet ?
J’avais essentiellement trois objectifs :
- Les élèves devaient comprendre qu’un objet à température ambiante émet un rayonnement thermique dans l’infrarouge.
- Les élèves devaient transférer cette notion à l’atmosphère et à l’effet de serre.
- Les élèves devaient comprendre comment on pouvait construire un appareil de mesure.
Les objectifs 1 et 3 ont plutôt bien été atteints même si je souhaite améliorer le point 3 en créant une nouvelle activité pour discuter de la pertinence et précision des appareils de mesures. L’objectif 2 a été partiellement atteint, car cette séance ambitieuse a exigé beaucoup. Les élèves ont tous réussi le montage et les mesures, mais un cinquième des élèves n’ont pas eu le temps de finir la conclusion et/ou ont eu des difficultés à faire un lien entre l’expérience et le phénomène de l’effet de serre.
Des difficultés rencontrées ?
Dans l’ensemble, il y a eu peu de difficultés. J’ai eu la chance d’avoir tout le matériel disponible dans mon établissement et en un nombre suffisant. De plus, j’ai déjà l’habitude de travailler avec des parcours numériques dans mes cours : la réalisation du parcours n’était donc pas non plus une contrainte. Enfin, j’ai l’habitude de la programmation par bloc que j’utilise avec mes élèves depuis plusieurs années.
Par contre, j’ai dû passer quelques heures à tester le montage. Notamment pour…
- Identifier le capteur de rayonnement infrarouge approprié (je remercie mon collègue de physique-chimie qui m’a bien aidé),
- S’assurer de la pertinence scientifique de ce que je proposais (essentiellement à partir du site planet-terre)
- Comprendre les contraintes d’utilisation du capteur. Comme je l’explique dans mon article, le capteur utilisé détecte une variation du rayonnement infrarouge et non le rayonnement infrarouge en valeur absolue. J’ai donc eu l’idée de mettre des blocs de froid en arrière-plan pour que le capteur puisse détecter l’émission de rayonnement infrarouge par un objet à température ambiante.
- Accepter que brancher des capteurs sur une carte Arduino était bien plus simple que ce que j’imaginais au début et que les élèves en seraient tout à fait capable.
Avez-vous observé une amélioration significative dans la compréhension de l’effet de serre par les élèves grâce à l’utilisation des microcontrôleurs ? Quels sont les retours de vos élèves ?
Les retours des élèves sont très positifs, car ils m’ont pour la plupart demandé si on allait refaire ce genre d’activités. Par ailleurs, lors de l’évaluation de fin de chapitre, j’ai pu constater qu’une plus grande partie des élèves était capable d’expliquer correctement le principe général de l’effet de serre.
Cependant, comme je l’ai déjà évoqué au début de cet entretien, un cinquième des élèves ont eu des difficultés à transférer ce qu’ils avaient appris avec le phénomène naturel d’effet de serre. Il faut dire que cette activité exige beaucoup de compétences. Elle peut donc provoquer, il me semble, une surcharge cognitive incompatible avec un apprentissage de la notion.
Quels conseils donneriez-vous à des enseignants souhaitant entreprendre un projet similaire ?
Tout d’abord, de tester le parcours que je propose dans l’article et de mener l’activité telle que je la propose à mes élèves. Cela permettra sans doute de se rendre compte que c’est plus facile que cela en a l’air.
D’autre part, pour les collèges les moins familiarisés avec la programmation par bloc et les microcontrôleurs, je conseillerais également de commencer avec un petit groupe (soit en fin d’année scolaire, soit au sein d’un atelier) . En effet, dépanner jusqu’à 24 élèves en même temps exige une certaine expérience pour aller vite et ne pas avoir de temps morts pour nos élèves.
Enfin, je les invite aussi à tester d’autres activités proposées par les collègues au sein des TRAAM. Je pense notamment à la proposition de mon collègue de lycée Jean Prévost qui a utilisé uniquement des cartes microbit et qui s’est appuyé sur l’expertise du collègue de SNT. Au collège, l’aide du collègue de technologie peut, je pense, être très rassurante.
Propos recueillis par Julien Cabioch
Dans le Café
Guillaume Berthelot : La simulation expérimentale en SVT