Entretien avec Josianne Allart, rédactrice en chef de Nouvelle antique et Aurore Wépierre, l’une de ses anciennes élèves.
RD – Josianne, pouvez-vous vous présenter en quelques lignes ?
JA – Je suis une professeure de collège au collège Pablo Picasso, passionnée de NTIC. Mes premiers programmes étaient en basic, autant dire la préhistoire 😉
J’ai fait participer des élèves pendant plusieurs années aux histoires croisées francoquébécoises, ce qui demandait la création d’un site web (j’ai donc appris à utiliser un éditeur html). J’ai fait réaliser à des élèves latinistes une Bande dessinée sur le thème de la sécurité routière avec traduction en latin et publication, à l’époque, sur le site du collège. J’ai fait réaliser par des élèves une écriture collective d’une nouvelle bilingue (anglais, français), inachevée car, faute de temps, les élèves n’ont pu finir la nouvelle avant la fin de l’année scolaire. Je participe activement au site du collège. Comme je suis passionnée de cinéma, j’ai amené les élèves du collège à participer depuis plusieurs années à une opération Plan séquence et depuis l’an dernier à collège au cinéma.
RD – Qu’est-ce qu’une nouvelle antique, Josianne, et quel est votre modus operandi ?
JA – Première étape :
Dès qu’un élève me propose une idée intéressante, je saute dessus. Cela permet en effet de faire faire des recherches documentaires aux élèves (apprentissage de l’autonomie dans la recherche documentaire, travail par groupes)puis d’intégrer le résultat de ces recherches à une oeuvre de pure création.
Et là, je procède toujours de la même façon : pour éviter que les élèves les plus dynamiques n’imposent leurs idées, oralement, je procède par petits papiers : je pose une question et chacun doit donner une réponse.
En classe, ou chez moi, suivant les circonstances, je lis puis sélectionne ce qui me paraît les meilleures idées et en fais part aux élèves qui choisissent 1 élémentt ou tous les éléments. Ici, comme j’ai trouvé des solutions qui me paraissaient intéressantes mais s’excluaient, nous avons opté pour le texte à choix multiples. J’ai aussi essayé d’obtenir des personnages différents…
Finalement, comme je suis assez tournée vers l’informatique (création de sites…), j’ai décidé de le mettre sous forme d’hypertexte, car cela favorise la lecture : le lecteur choisit parmi les aventures proposées et participe donc à la création du livre puisqu’il fait un choix parmi les possibilités.
Les élèves ont donc utilisé le traitement de textes (mais je ne leur ai pas fait créer les pages web)
Seconde étape (nouvelle en latin)
Comme le groupe de cinquième était très dynamique, je leur ai proposé la même aventure mais il faut varier les plaisirs. Il s’agissait d’une histoire inventée pour être ensuite écrite en latin. Le roman d’aventures s’imposait donc. Même recours aux petits papiers. Une élève a eu l’idée d’un navigateur dans l’espace, dans le futur : puisque nous ne sommes pas dans le futur, personne ne pourra dire que c’est impossible. Comme quelqu’un avait eu une idée de chasse au trésor, nous l’avons adoptée et combinée à la 1ère. Et cetera. Chaque idée qui me paraît intéressante est présentée aux élèves qui proposent alors des éléments pour développer cette idée.
RD – (à Aurore Wépierre) Que pensez-vous, Aurore, que l’écriture collective d’une telle nouvelle vous a apporté ?
AW – Avoir une idée c’est bien mais le problème c’est que, pour la réaliser, il faut être à plusieurs. Seul c’est impossible, il y a trop de travail pour s’en sortir. Pendant les cours de latin,on a appris à écouter les autres : ( en cours c’est différent) pour la nouvelle nous passions plusieurs heures à mettre nos idées en commun, chacun donnant tour à tour une idée qu’on écrivait au tableau, les autres donnant leur avis : « est-ce possible ? » … Ils rajoutent des idées auxquelles on n’avait pas pensé, on s’aidait à l’écriture, ceux qui avaient plus ou moins d’idées, d’autres qui n’en avaient pas…. On forme des groupes, on doit faire confiance aux autres (être surs qu’ils feront leur partie de la nouvelle). On apprend à travailler en collectivité tout simplement mais ce n’est pas si simple. Ensuite, au fur et à mesure qu’on avance dans l’année on se rend compte qu’on a plus d’affinités avec les autres. Aussi, on s’est tous senti plus fier d’avoir contribué à la création de cette nouvelle collective (chacun s’est aidé l’un autre, chacun à contribué à la réussite de l’autre). Personnellement c’est cela que l’écriture collective de la nouvelle m’a apporté. (dans ma classe cette année (1ère ES au lycée Picasso) j’ai retrouvé des élèves qui ont fait la nouvelle avec moi, dont Mohamed qui avait émis l’idée de non pas un « héros » fille mais deux « héros » avec un garçon et une fille pour permettre aux garçons de se sentir concernés, d’avoir plus envie d’écrire ; et Mohamed m’a annoncé il y a quelques jours qu’il avait été sur le site du collège et qu’il y avait retrouvé une photo avec quelques autres élèves qui ont participé à la nouvelle, tout de suite il m’a dit qu’on s’était bien amusé à l’écrire et que c’était un bon souvenir. Voilà !
RD – A quand, Josianne, la traduction de cette nouvelle en latin ?
JA – Avec les troisièmes de cette année qui commencent à traduire la nouvelle antique écrite par leurs prédécesseurs,je procède ainsi : traduction par groupes de deux, avec le vocabulaire que je leur donne (j’ai essayé de leur faire utiliser des lexiques ou des dictionnaires, mais des problèmes de matériel sont apparus : pas assez de dictionnaires ! Internet ? pas assez accessible : quatre ordinateurs connectés mais pas assez rapides! ; en outre, lorsqu’ils travaillent de façon autonome, les élèves ont une tendance très nette à oublier leurs acquis (fonction, cas… ) et à vouloir traduire un mot français par un mot latin, au lieu de se préoccuper de traduire des groupes et cela aboutit à des horreurs!
Le but que je poursuis est le suivant :
* leur faire traduire des phrases qui sortent du cadre ordinaire des cours, une histoire qui devrait les intéresser
* leur faire découvrir / retrouver dans le texte qu’ils traduisent des aspects de la civilisation romaine
* leur faire compléter le texte initial en développant l’aspect documentaire, par exemple en introduisant un itinéraire précis et réel, correspondant à la Rome de l’époque …, des rencontres avec des personnages historiques, des interviews de ces personnages… C’est un travail de longue haleine! Et je suis preneuse de toute autre idée intéressante.
Nouvelle antique
http://www2.ac-lille.fr/rousseau-avion/Frame2/pedago/lettres/collegiensdunet/ecriture/nouvantiq/theme.htm