Dans une interview accordée à l’AFP, publiée mercredi 13 mars au soir, le Premier ministre réfute « reprendre en main le ministère ». « Jamais. J’ai dit le premier jour de ma nomination à Matignon que j’emmenais avec moi la cause de l’école. J’ai été très mobilisé ces dernières semaines sur d’autres sujets comme la crise agricole. Je n’ai jamais perdu le fil », a-t-il déclaré. Et si la place accordée aux groupes de niveau n’est pas centrale dans cet entretien, Gabriel Attal y concède tout de même une victoire à Nicole Belloubet. Interrogé sur la dénomination de ces groupes, il répond « qu’importe le nom, pourvu qu’il y ait la mesure… »
Ultime baroud d’honneur de Gabriel Attal sur les groupes de niveau
Le Premier ministre recule plus ou moins sur la question des groupes de niveau. En tout cas sur le terme à employer. « Qu’importe le nom, pourvu qu’il y ait la mesure », a-t-il affirmé aux journalistes. S’il en minimise la portée, pourtant groupes de niveau et groupes de besoin ne signifient pas la même chose. Les premiers assignent les élèves, les seconds permettent une prise en charge en fonction des besoins de ces derniers. Une dynamique tout à fait différente. « Pour ma part, je trouve le nom de groupe de niveau plus clair pour les Français : adapter l’enseignement du français et des mathématiques aux besoins de chaque élève pour faire progresser le niveau général », a-t-il ajouté. Si Gabriel Attal assure que « sur les trois quarts de l’année au moins, il faut que les élèves suivent leurs enseignements en français et en mathématiques dans les groupes de niveau », il concède que certains moments seront en groupe classe. « La règle, c’est le groupe, et l’exception très encadrée, c’est la classe », assène-t-il dans un ultime baroud d’honneur. Si l’exception existe et que les moyens sont inexistants, peu de chances que les groupes de niveau forts/moyens/faibles voient le jour dans beaucoup d’établissements. D’ailleurs, peu de chances, sans moyens, que les groupes de besoin voient le jour aussi…
Laïcité : des cellules d’appuis pédagogiques
Sur la question de la laïcité, Gabriel Attal a estimé qu’elle était « menacée ». « Elle l’est probablement aujourd’hui plus que jamais. Elle a ses ennemis, ils sont politiques, religieux. Mais elle a aussi ses défenseurs: nos professeurs, nos fonctionnaires, nos forces de l’ordre ». Le Premier ministre, qui rappelle que « les signalements pour port de signes et de tenues religieuses sont au plus bas », s’inquiète de « l’augmentation du nombre de signalements pour contestation d’enseignement ». « J’y vois à la fois le signe que les ennemis de la laïcité sont toujours présents et cherchent à infiltrer l’école et à l’affaiblir. J’y vois aussi le signe qu’une parole se libère. Notre mobilisation sera absolue sur cet enjeu ». Pour soutenir les enseignants qui « auraient peur d’enseigner », le Premier ministre et sa ministre d’Éducation nationale promettent la mise en place de « cellules d’appui pédagogiques, joignables directement par les professeurs qui appréhendent une séquence d’enseignement, qui font face à des résistances, voire des contestations ».
Quels personnels dans ces cellules ? Gabriel Attal ne le dit pas. « Il faut qu’il y ait un contact au niveau du rectorat qui puisse leur proposer trois grandes solutions: un accompagnement pédagogique avec des professeurs référents qui peuvent leur donner des conseils pour aborder certaines séquences du programme; une présence physique d’un personnel non enseignant au sein de la classe; ou la présence physique d’un personnel formé, faisant partie par exemple des équipes académiques +valeurs de la République+ ». Belles promesses, mais avec quels moyens ?
Nicole Belloubet avait affirmé que les élèves radicalisés seraient regroupés. Le Premier ministre confirme qu’un « travail interministériel » se poursuit. « Il y a plusieurs pistes qui sont à l’étude pour permettre de sortir de leur établissement ce type d’élèves. Ce travail aboutira d’ici à la fin de l’année scolaire ».
Sur la sécurisation des établissements, Attal ne promet rien. Il ne le peut pas. Les locaux sont de la responsabilité des collectivités… « C’est vraiment une action transversale », a-t-il déclaré. « Et donc je réunirai les ministres de l’Intérieur, de la Justice, de l’Éducation et des Collectivités territoriales pour lancer une démarche qui doit être à la fois sécuritaire, éducative, judiciaire, d’ensemble ».
Finalement, Gabriel Attal parle à l’opinion publique, Nicole Belloubet aux équipes pédagogiques… Le premier ministre se « construit une stature politique sur le dos de l’éducation » nous confie une spécialiste de l’éducation.
Lilia Ben Hamouda