Dès lundi matin, le soutien à la ministre de l’Éducation nationale commençait à faiblir du côté du gouvernement. Prisca Thevenot reconnaissait ne pas savoir si la ministre « a menti » sur les raisons du passage de son ainé dans le très conservateur établissement privé Stanislas. En déplacement avec le ministre de l’Intérieur en Seine-Saint-Denis, la ministre a demandé « de clore ce chapitre des attaques personnelles ». Quelques heures après, Amélie Oudéa-Castéra débutait ses rencontres bilatérales avec les organisations syndicales représentatives. Avec les événements des derniers jours, les rencontres s’annonçaient tendues. Elles le furent.
C’est la FSU qui a débuté le bal de ces rencontres. « On a coupé court à la discussion au bout d’une heure vingt », nous a déclaré Sophie Vénétitay du Snes-FSU. « Lors de son propos liminaire, la ministre a beaucoup été sur le terrain personnel pour évoquer la polémique Stanislas, en expliquant qu’elle était très émue, qu’elle avait un attachement à l’École publique, mais que là il s’agissait de choix personnels. On lui a répondu que, nous en tant que représentants syndicaux, ce qui nous intéressait c’était un échange avec la ministre de l’Éducation nationale pas avec la personne. On lui a donc fait part de l’émotion et la colère ressenties par la profession à la suite de ses propos. Elle a redit ses regrets. Nous avons donc demandé des excuses publiques, elle n’a pas répondu sur ce point-là ». Autre sujet de désaccord avec la fédération : la feuille de route de la ministre qui ne dévie pas de celle de son prédécesseur – choix des savoirs, « régénération du métier enseignant » et bien-être des élèves à l’école. Pour la FSU, conditions de travail et salaire – avec abandon du pacte, sont des préalables au dialogue social. « On a mis fin à la réunion puisque finalement elle a reconnu qu’elle ne dévierait pas de sa feuille de route ».
En début d’après-midi, c’est l’UNSA éducation qui était reçue rue de Grenelle. Et là encore, le bilan n’est guère brillant même si la réunion est allée jusqu’à son terme. « La ministre est revenue sur la polémique et ses propos pour justifier la scolarisation de ces enfants au collège Stanislas, les regrettant et affirmant son attachement à l’École publique. Pour notre fédération, ces propos sont désastreux sur le fond pour l’École publique et ses personnels » écrit la fédération dans un communiqué. « De plus, ils empêchent de s’occuper des vraies urgences de l’École, et donc de traiter trois sujets majeurs pour notre système éducatif : la mixité sociale en posant la question de la responsabilité de l’enseignement privé, l’inclusion et enfin l’attractivité des métiers. Ce dernier enjeu est essentiel… Il intègre à la fois la problématique des conditions de travail et notamment la taille des classes, l’aménagement des locaux ou encore la baisse de la pression sur les résultats. L’attractivité implique aussi une meilleure gestion des ressources humaines et une prévention des risques psychosociaux. La question des rémunérations est enfin essentielle pour TOUS les métiers». L’UNSA Éducation qui dénonce « la logique délétère du Pacte » a exprimé « son désaccord fondamental avec les mesures annoncées dans le cadre du « choc des savoirs », où le « bon sens » supposé est démagogiquement mis au même niveau que les travaux de recherche ». « Cette vision passéiste et conservatrice de l’École renonce à l’ambition de démocratisation et va accroître les déterminismes sociaux dans l’orientation. Les injonctions sur l’organisation des classes, le choix des manuels et l’utilisation de telle ou telle méthode pédagogique nient l’autonomie professionnelle des différents métiers de l’éducation, qui est pourtant un levier important pour agir sur l’attractivité des métiers. C’est pourquoi l’UNSA Éducation combattra cette politique éducative de toutes ses forces », conclut le syndicat.
Aujourd’hui, la ministre devrait continuer de recevoir les syndicats. Peu de chances que les échanges soient plus cordiaux…
Lilia Ben Hamouda