Violence scolaire : Jachère gouvernementale
» Les deux victimes pourront compter sur l’aide et le soutien des autorités de l’Education nationale. Elles bénéficieront notamment de l’aide juridictionnelle. Le ministre leur affirme sa totale solidarité ». A chaque incident médiatisé, comme celui de Châlon en Champagne, la formule revient dans le communiqué de la rue de Grenelle. Elle parle de solidarité.
Fut un temps, pas si lointain, où le ministre ne parlait pas de solidarité mais rappelait ses actions et ses objectifs. Cela a disparu. Pour le gouvernement la violence scolaire est presque devenue un risque individuel, quelque chose de « personnalisé » qui échappe tellement à l’action gouvernementale que celle-ci est à peine évoquée.
La seule mesure concrète auquel condescend le ministère c’est de faire payer le coupable : » les auteurs devront régler une facture correspondant au montant de la rémunération versée pendant la période d’arrêt de travail provoqué par l’agression ». Quel soulagement et quelle vision d’avenir pour les enseignants : tirer les marrons du feu pour le ministère…
Dans un autre communiqué, Gilles de Robien accuse les familles « défaillantes », qui » ne créent pas les conditions à l’intérieur de la famille pour donner des repères à des gamins et des gamines de deux ans, trois ans, quatre ans, parce que ça commence à cet âge-là », allusion à la célèbre étude de l’Inserm qui demandait la mise en fiche des bambins. « La société doit régler son problème de violence ». On ne saurait dire plus clairement que la question ne concerne plus le ministre de l’éducation nationale.
La rue de Grenelle a-t-elle abandonné tout plan anti-violence ?D’ailleurs le ministère a-t-il une estimation réelle du phénomène ? Les derniers chiffres publiés, fin décembre, montraient une stabilité des incidents… alors qu’ils portaient sur l’année 2005-2006 riches des émeutes et des incidents liés au mouvement anti-Cpe. Depuis le logiciel Signa n’est plus renseigné. Il était de toutes façons notoirement « décalé » par rapport aux situations réelles.
La dernière et plus importante intervention de Gilles de Robien sur ce sujet a été la publication en septembre 2006 de trois brochures d’une rare indigence qui prolongeaient une demande du ministre de l’intérieur. Les deux premières s’adressaient aux enseignants pour leur faire connaître les qualifications pénales des actes dont ils pourraient être victimes. La troisième, la plus importante, s’adressait aux chefs d’établissement pour leur apprendre comment collaborer avec la police et les méthodes de fouille. S’agissant d’un thème aussi important que la prévention de la violence scolaire, on pouvait attendre d’un ministre de l’éducation autre chose qu’un rappel du code pénal et un manuel d’apprenti vigile. Deux ouvrages qui ne répondent pas au défi.
Pourtant des politiques sont possibles. Si rien ne peut garantir contre des faits exceptionnels comme ceux de Châlon ou de Meaux, des politiques peuvent être efficaces contre la violence scolaire, telle qu’elle s’exprime quotidiennement à travers les brimades et le harcèlement des élèves, et faire évoluer le climat des établissements.
Ainsi, dans la revue VEI Diversité n°147, Margaret Shaw cite celles qui sont reconnues internationalement comme efficaces. Elles rassemblent les caractéristiques suivantes : « une attitude d’anticipation plutôt que de réaction; l’inclusion sociale avec soutien et intégration plutôt que l’exclusion; le développement de programmes adaptés à toute la population scolaire et aux besoins des individus à risque ainsi que de leurs familles,la prise en compte d’une communication préventive entre les parents et les enseignants;l’implication des jeunes eux-mêmes à l’élaboration des projets , de leur échafaudage à leur mise en pratique;le recours à des approches de médiation ».
Plus que de renvoyer la question à la vigilance de chefs d’établissement à qui on retire leurs moyens humains, d’agiter la sanction des magistrats, ou de parler de solidarité, le ministre serait bien inspiré de signaler lesquelles parmi ces actions il entend mettre en oeuvre. Probablement aucune…
http://cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/index301206.aspx
Le rectorat de Paris impose aux chefs d’établissement de signaler les délits à la Justice
« Le chef d’établissement scolaire (…) doit aviser, sans délai, le procureur de la République de tout acte délictueux porté à sa connaissance dans l’exercice de ses fonctions ». Selon le Nouvel Observateur, le rectorat de paris a signé une convention avec le procureur de la République et la Préfecture de police qui impose et organise la transmission d’informations du chef d’établissement vers l’autorité judiciaire.
« Les faits seront signalés par un « rapport d’infraction en milieu scolaire » et une « mise en garde » sera signée par l’élève dont l’infraction aura été signalée au parquet » précise le magazine.
Cet accord est dans le prolongement d’une brochure ministérielle publiée en septembre 2006 qui invitait les chefs d’établissement à collaborer étroitement avec la police. » Dans le cadre du partenariat entre l’Éducation nationale et la police ou la gendarmerie, les bonnes relations nouées entre les membres de ces institutions, basées sur la confiance et la courtoisie réciproques, doivent permettre un libre échange d’informations. C’est ainsi que, hors le cadre des réquisitions écrites, le chef d’établissement permettra aux enquêteurs l’accès à certains renseignements comme, par exemple, la consultation des fiches individuelles de renseignements afin de connaître l’identité et le domicile d’un élève ou de ses parents s’ils sont séparés, la composition de la fratrie, etc.. ».
Ces recommandations deviennent maintenant des instructions. Il est vrai que les établissements ont besoin de liens étroits avec les services de police et ont très souvent établi des partenariats qui contribuent à la sécurité des établissements. Pour autant ces instructions posent de sérieux problèmes et peuvent être source de tension. Par exemple, la notion de délit est suffisamment large pour qu’elle puisse amener un chef d’établissement à signaler des élèves sans papier voire à participer à leur arrestation. Les recommandations ministérielles n’affranchissent pas les chefs d’établissement des obligations de secret professionnel auxquels ils sont tenus (par exemple récemment à propos des fichiers informatiques).
On est surtout frappé de l’approche extrêmement réductrice de la violence scolaire qui est faite dans les textes ministériels. Car la prévention de la violence scolaire n’est pas sans rapport avec le fonctionnement même de l’Ecole. C’est ce qu’évoquait Eric Debarbieux dans un entretien accordé au Café (dans notre numéro 71). « Tout le monde est d’accord pour dire que la violence scolaire a plusieurs causes. La situation économique, familiale ont leur part mais il y a aussi des facteurs liés à l’institution scolaire. En particulier, il y a une forte corrélation entre la qualité du climat scolaire et la victimisation. Le climat scolaire c’est la qualité des relations entre adultes et élèves et entre adultes; la capacité à avoir un dialogue et non un affrontement avec les élèves. C’est aussi la clarté des règles collectives. Le climat peut se dégrader par exemple quand les punitions diffèrent d’un enseignant à l’autre. Les sentiments d’appartenance collective et de justice sont deux composantes essentielles de ce climat ».
Pour s’attaquer à la violence scolaire l’Ecole devrait appréhender autrement qu’en terme d’indication policière sa relation avec l’élève et avec les parents. D’autant que les élèves sont les premières victimes de cette violence.
Elle devrait mettre en place une véritable éducation contre la violence. Selon E Debarbieux des exemples existent « Aux Etats-Unis, il y a un programme efficace contre la colère. On s’est rendu compte que dans 80% des cas, les élèves violents ont des problèmes de conceptualisation. Le programme vise à les aider à comprendre leurs actes pour changer leur comportement. Par exemple on projette un film sur des élèves en colère et on les invite à juger ce comportement. Puis on débat sur les causes de la colère et sur les façons de l’éviter. Enfin les élèves tournent un film sur les solutions qu’ils ont trouvé face à la colère. Et bien ce programme a un impact réel ».
Faute de tout cela, ces textes officiels laissent à penser que la prévention de la violence scolaire reste une tâche secondaire pour le ministère.
Violence scolaire : trois brochures ministérielles
http://cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/index060906.aspx
Adieu cigarette : Un Guide officiel pour appliquer la loi sur le tabac
« Une signalisation apparente, rappelant que l’école, l’établissement scolaire ou le centre de formation d’apprentis est entièrement non-fumeur, devra être apposée aux différentes entrées de l’établissement ainsi qu’à l’intérieur dans des endroits visibles. Cette signalisation sera aussi apposée sur les aires de stationnement, les stades et les terrains de sport ». C’est le premier point rappelé par le Guide édité par le ministère pour faire appliquer la loi qui condamne le tabac dans les établissements scolaires à partir du 1er février.
En 10 fiches il aborde la réglementation, le règlement intérieur et la gestion des situations particulières. Les pages consacrées à la prévention sont sommaires. L’aide au sevrage est mentionnée sans qu’on puisse assurer qu’elle prenne réellement forme partout. Néanmoins il propose quelques documents types comme une lettre aux parents.
Parmi les questions abordées il y a celle de la sortie des élèves pour aller fumer. « La circulaire n°96-248 modifiée du 25 octobre 1996 relative à la surveillance des élèves précise pour les collèges qu’« en aucun cas, les élèves ne peuvent être autorisés à quitter l’établissement durant les temps libres inclus dans les périodes scolaires fixées par l’emploi du temps »… Pour les lycées : qu’afin notamment de « prendre en compte l’âge et la maturité des élèves », le règlement intérieur peut prévoir, le cas échéant, des sorties libres entre les cours uniquement à l’occasion de la pause méridienne ou d’une heure de permanence, à l’exclusion des inter-classes, sous la condition d’une autorisation écrite de leurs parents pour les élèves mineurs. En tout état de cause, ces autorisations de sorties ne peuvent être justifiées par la possibilité de quitter l’établissement scolaire pour fumer, de telles autorisations étant contraires aux objectifs de protection de la santé publique qui ont précisément justifié l’interdiction de fumer dans les établissements scolaires ».
Reste la question du fumoir des enseignants, interdit à partir du 1er février. « Il est demandé au chef de service ou d’établissement de mettre en œuvre et de veiller au respect de cette interdiction de fumer dans les lieux affectés à un usage collectif et de proposer aux personnels une information préventive sur l’aide au sevrage tabagique… Mesures à prendre en cas de manquement à la loi : éviter les tensions et favoriser le dialogue avec les personnels de l’établissement; si le chef d’établissement constate un problème persistant avec un membre du personnel de l’établissement, il se doit de le signaler à l’inspecteur d’académie afin de n’être pas mis lui-même en faute ».
Dans L’Expresso du 7 décembre nous avions pu montrer comment la lutte contre le tabagisme dans les établissements scolaires a été abordée au Québec, dans des circonstances très proches de celles de la France.
L’approche semble sensiblement différente. Pour que l’interdiction de fumer soit effective, le document québécois met en évidence l’importance de convaincre des groupes clés : le conseil d’établissement, les parents et le conseil des élèves. Il s’appuie beaucoup sur les délégués élèves. » Dans l’esprit d’une démarche concertée, la collaboration des jeunes de l’école est essentielle à l’élaboration et à la mise en œuvre de la stratégie. Il est reconnu que leur implication directe dans l’organisation d’actions de sensibilisation auprès de leurs pairs est des plus efficaces pour mobiliser ceux-ci et avoir un effet positif sur leurs attitudes et comportements… La stratégie devrait être conçue de manière à refléter la réalité et les préoccupations du milieu à l’égard du tabac tout en tenant compte des ressources et des activités déjà en place. Les individus qui se reconnaîtront dans les principes de la stratégie trouveront une plus grande motivation à lui apporter leur soutien que ceux qui n’y verront qu’une simple application de mesures restrictives ». Pour cela il incite à organiser un sondage chez les adultes et chez les élèves sur leur attitude face au tabac et à l’interdiction. Ces documents serviront également à évaluer l’efficacité des mesures prises.
http://eduscol.education.fr/D0190/tabac_fiches.htm
http://cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/index071206.aspx
Education à la santé
Réalisé avec l’Inpes, le guide « Education à la santé en milieu scolaire » sera envoyé dans les établissements scolaires. « Cet ouvrage est un outil d’accompagnement pour les équipes éducatives et les intervenants désireux d’entreprendre des actions d’éducation à la santé en milieu scolaire » annoncent les deux auteurs Sandrine Broussouloux et Nathalie Houzelle-Marchal.
Le guide présente les principales étapes du développement d’un projet d’éducation à la santé en milieu scolaire. Des fiches détaillent une partie ou la totalité de l’étape du projet. Une deuxième partie illustre les étapes de la démarche de projet à partir de quatre actions concrètes menées en milieu scolaire. Enfin le guide se termine par une partie plus théorique qui rappelle les principales notions employées en éducation à la santé et une bibliographie.
http://eduscol.education.fr/D0004/guide_education_sante.pdf
Profs interrogez les candidats !
Le Se-Unsa nous invite à poser des questions aux candidats aux présidentielles.
http://www.se-unsa.org/page_candidat.html
Projets européens Comenius, da Vinci, Erasmus etc.
Le B.O. n°4 publie les dates limites de soumission et les conditions à remplir pour déposer un projet européen Comenius, Erasmus, Leonardo da Vinci ou Grundtvig.
http://www.education.gouv.fr/bo/2007/4/MENC0700102C.htm
Fêtes religieuses en 2007
Le B.O. n°4 publie la liste des fêtes religieuses qui donnent droit à autorisation d’absence.
http://www.education.gouv.fr/bo/2007/4/MENH0700090C.htm
L’Angleterre lance une vaste consultation sur de nouveaux programmes
« Les programmes doivent changer pour aller à la rencontre d’un monde en mutation rapide et donner la possibilité aux professeurs d’enseigner de façon à intéresser et rendre enthousiastes leurs élèves ». C’est en ces termes qu’Alan Johnson, le ministre de l’éducation, a présenté les projets de programme des collèges anglais.
De 12 à 14 ans, les élèves continueront de suivre les 12 enseignements établis depuis les programmes de 1988. Shakespeare, Dickens, George Eliot restent aussi au programme.
Mais de nouvelles orientations sont données. Ainsi pour les langues où l’Ourdou et le mandarin seront proposés. En géographie, le développement et le changement climatique, en histoire l’enseignement de la Shoah seront renforcés. L’étude de l’esclavage sera introduite. L’éducation civique est infléchie pour apprendre le « vivre ensemble ».
Des enseignements plus originaux, vu de Paris, sont également renforcés. Ainsi les élèves apprendront à cuisiner des mets simples en cours de technologie. Ils seront initiés aux finances personnelles.
Mais ces programmes veulent surtout introduire un nouvel esprit. Ils donneront plus de liberté aux enseignants et de flexibilité dans les emplois du temps. « Les écoles pourront innover sur les emplois du temps. Enseigner des sujets ensemble, fonctionner par projets ou organiser des visites , tout cela peut rendre les élèves plus enthousiastes pour apprendre ». Flexibilité, initiative, autonomie deviennent les valeurs maîtresses de ces programmes. Pour le Guardian ce sont celles que les employeurs attendent.
http://www.qca.org.uk/secondarycurriculumreview/
http://education.guardian.co.uk/secondaries/story/0,,2006314,00.html