Sous la Vème république version Macron, c’est le ministre de l’Éducation nationale qui inaugure les chrysanthèmes et le président de la République qui règle les détails du fonctionnement de l’Ecole. Vendredi, il était dans un lycée professionnel. Aujourd’hui, Emmanuel Macron est au collège Argote à Orthez (Pyrénées Atlantiques) pour parler EPS et sport. Parmi les annonces, l’extension du Pacte en EPS pour y inclure le dispositif « 2 heures de sport au collège ». Du périscolaire qui, pour le très majoritaire syndicat Snep-Fsu, entre en concurrence avec les horaires d’EPS.
E Macron à Orthez aujourd’hui
Selon l’Elysée, c’est pour « manifester sa considération pour les professeurs d’EPS » et aussi « refonder la place du sport à l’Ecole » que le président de la République se déplace au collège Argote d’Orthez ce 5 septembre. Comme s’il commençait un premier quinquennat, E Macron veut, selon son entourage, « permettre au sport de retrouver toute sa place dans les fondamentaux de l’Ecole » et même « construire une nation sportive« . Et pour cela, le président de la République vient relancer des dispositifs lancés lors de son premier quinquennat et, en premier lieu, les 2 heures de sport par semaine au collège.
Emmanuel Macron rencontrera les professeurs d’EPS qui animent le dispositif « 2 heures de sport par semaine » dans le collège. A cette rentrée, il concerne 700 collèges contre 170 l’année dernière. Le chef de l’Etat veut le généraliser en 2026.
Le dispositif 2 heures de sport au collège ouvert au Pacte
Ces deux heures de sport, qui visent à lutter contre la sédentarité des jeunes, relèvent du périscolaire. Initialement elles devaient être confiées à des associations sportives. Mais, à Orthez, ce sont les professeurs d’EPS qui les animent déjà sur des crédits Education nationale. Et c’est cette extension qu’E. Macron devrait annoncer. « C’est « un dispositif au travers duquel on permet aux enseignants d’EPS d’être accompagnés, y compris financièrement, pour organiser des activités complémentaires de l’Education nationale, mais qui ne sont pas sur le volume des heures obligatoires. C’est bien du périscolaire, quand bien même c’est accompagné par les professeurs d’EPS. Donc, il y a un lien qui est fait avec d’autres réformes du ministère de l’Education nationale, notamment sur la question de la rémunération des enseignants et du Pacte puisque l’ambition est de faire une passerelle avec la rémunération prévue par le Pacte des encadrements d’EPS lorsqu’ils s’engagent dans ce type de dispositif« , nous dit l’Elysée. « On ne peut pas demander à des professeurs d’EPS de s’engager dans ce dispositif sans s’intégrer dans la logique du Pacte à la manière avec laquelle ils y sont accompagnés. Donc, c’est en effet un sujet qui doit être prévu dans le Pacte« .
En mars 2022, Emmanuel Macron avait présenté ce dispositif en annonçant qu’il serait financé par le Fonds d’Innovation pédagogique prévu en accompagnement du CNR. Il devrait annoncer aujourd’hui que l’on utilisera des crédits du Pacte quand des professeurs d’EPS s’investiront dans ce dispositif. Ce sera donc des enseignants d’EPS mais travaillant dans le périscolaire et sans inscription dans la dotation horaire des établissements. Quelque chose qui brise les frontières, bien dans l’esprit du macronisme…
Le Snep Fsu critique
C’est d’ailleurs un des reproches que fait Coralie Bénech, co secrétaire générale de l’ultra majoritaire syndicat des professeurs d’EPS, le Snep Fsu. » On confond sport et EPS. On donne des moyens aux associations pour apporter des dispositifs dans l’Ecole« . Le Snep Fsu revendique davantage d’heures d’EPS, soit 4 heures au collège et au lycée contre 3 et 2. Avec à la clé un bon argument : « ce sont des heures d’activités sportives et artistiques obligatoires auxquelles tous les jeunes participent« . Or, selon le Snep Fsu, les deux heures de pratiques sportives manquent leur cible. Ce ne sont pas les jeunes sédentaires qui y participent mais des élèves déjà sportifs. Pour le Snep Fsu, c’est par l’augmentation des heures d’EPS, pratique obligatoire, que l’on peut lutter efficacement contre la sédentarité. Le syndicat souligne aussi que le dispositif se contente de pratiques peu sportives comme la pêche ou les échecs. Enfin le dispositif concurrence l’EPS pratiquée par tous pour l’accès aux équipements sportifs.
Prolonger les « 5000 terrains »
Emmanuel Macron doit rebondir aujourd’hui sur cette question. Il a lancé en 2021 le dispositif « 5000 terrains », un soutien financier aux collectivités locales et aux associations sportives pour s’équiper. C’est un succès puisque les 200 millions d’aide publique sont dépensés pour créer 4420 terrains. Emmanuel Macron pourrait annoncer le renouvellement de l’opération. Ce sera sans le soutien du Snep Fsu. « On dénonce cet investissement qui ne va aller ni vers l’EPS ni vers le sport« , nous dit C Bénech. Le financement est trop faible pour permettre la création de terrains aux normes sportives. Les petits terrains Macron ne peuvent servir qu’à des pratiques limitées comme le rugby à 5 ou le hand 3 x 3. Le Snep fsu veut des terrains aux normes où les cours d’EPS et les pratiques sportives puissent avoir lieu.
Sport et EPS
Emmanuel Macron pourrait faire également des annonces à propos de deux autres dispositifs. Il s’agit du Pass Sport, une aide de 50€ versée aux familles touchant l’ARS en soutien à l’inscription à un club sportif. Selon l’Elysée, elle devrait toucher 2 millions de personnes en 2024. Enfin le président de la République devrait se féliciter du dispositif « 30 minutes d’activités physique par jour » à l’école primaire. Selon l’Elysée 70% des écoles y participeraient. Mais là aussi c’est au détriment de l’EPS. Selon un rapport de l’Inspection générale, les horaires d’EPS ne sont pas respectés car grignotés aussi par les « fondamentaux ».
On l’a compris : les sprints élyséens vers le sport ne satisfont pas les professeurs d’EPS. « On est pas juste une discipline pour lutter contre la sédentarité« , nous dit C Bénech. « On ne travaille pas que la performance. On travaille d’autres compétences. Tous les élèves sont confrontés en EPS à des activités sportives mais dans un collectif différent des associations sportives. En EPS on cherche à progresser, à se dépasser ».
Emmanuel Macron pourrait botter en touche dans cette dialectique entre sport et EPS avec des annonces concernant le sport de haut niveau dans l’Education nationale.
François Jarraud