« On va tenir nos promesses de revalorisation des professeurs ». Devant la commission de l’éducation de l’Assemblée nationale comme sur Public Sénat, le 4 avril, Pap Ndiaye est revenu sur ses thèmes préférés : la revalorisation des enseignants et la mixité des établissements. Avec des glissements : le pacte va permettre l’annualisation des services, les enseignants acceptent la réforme des retraites, la ruralité c’est important. Même le ministre de l’Éducation nationale glane à droite…
Un pacte pour annualiser
« Mon action s’inscrit dans cette double dimension : pour les enseignants dont on doit revaloriser le métier et pour nos élèves dont on doit relever le niveau et réduire les inégalités de destin« . Des propos consensuels qui sont vite nuancés par les explications.
Commençons par la revalorisation. « On va tenir nos promesses de revalorisation des professeurs« , dit le ministre devant la commission de l’éducation. Il indique les pistes. Pour la part inconditionnelle, cela se fera par l’augmentation de la prime d’attractivité, de l’ISAE et de l’ISOE. « Le déroulement de carrière sera amélioré« , ajoute P Ndiaye. La prime d’attractivité aidera à relever les débuts de carrière. Ensuite les passages de grade seront « facilités » jusqu’à la fin de carrière. Le ministre précise que ce sont les syndicats qui ont attiré son attention sur la nécessite de revaloriser jusqu’au bout. Mais « peut-on rattraper en un seul coup des décennies de glissement« , demande-t-il. « Surement pas« . Le gouvernement ne prévoit pas de revalorisation au-delà de 2023.
Et le pacte ? Il sera composé de trois briques qui atteindront 3750€ brut par an, rappelle le ministre. Dans le second degré ce sera surtout des missions de remplacements de courte durée. « On vise l’annualisation des heures de cours« , explique le ministre sur Public Sénat. Il dévoile ainsi un enjeu important de la réforme qui devrait être acté pour les enseignants choisissant le pacte. L’annualisation, demandée depuis des années par la Cour des Comptes, dégage un gain de productivité important pour le ministère, les heures étant dues quoiqu’il arrive. Tout cela n’empêchera pas le ministère de lancer « une grande campagne de communication pour revaloriser l’image des enseignants« .
Les enseignants peu concernés par la réforme des retraites?
« Les enseignants n’ont pas été le fer de lance de la mobilisation contre la réforme des retraites« , estime P Ndiaye sur Public Sénat. Selon lui, « un tiers des professeurs part déjà à 64 ans donc la question n’est pas révolutionnaire, la réforme ne change pas radicalement les choses… Des professeurs en fin de carrière voient la ligne d’arrivée reculer mais pour la grande masse des professeurs cela ne change pas grand chose« .
Ruralité : Toujours les RPI
Les efforts de Pap Ndiaye pour davantage de mixité sociale dans le système éducatif ont fait réagir les députés Les Républicains. Pour Alexandre Portier, « le privé ne prive personne n’en déplaise à l’extrême gauche… Il accueille juste l’exigence auquel le public a renoncé« . Justine Gruet, autre députée LR, demande « l’équité pour le privé » et pendant qu’on y est que le ministère reprenne le nom d’instruction publique et qu’on rétablisse les notes au primaire. Annie Genevard conteste que l’école soit injuste avec les pauvres et dénonce la concentration de moyens très importants dans les territoires socialement défavorisés aux dépens du rural.
Sur la ruralité, Pap Ndiaye a dû admettre sur Public Sénat que les maires ne pouvaient pas s’opposer aux fermetures de classe. La nouvelle commission départementale annoncée par E Borne va engager le dialogue entre les communes, les préfectures et le ministère pour prévoir à l’avance les fermetures. Cette commission « sera différente des CDEN« , lâche P Ndiaye. En retirant des prérogatives aux CDEN, jugées trop critiques et trop politiques, le ministère fait d’une pierre deux coups. Sur le fond, le ministre continue à défendre les regroupements (RPI). « On souhaite les développer comme un outil dans le cadre de la baisse des effectifs« . Il promet « un bonus » en moyens humains en faveur des RPI. Mais le ministre rappelle aussi que déjà les communes rurales ont davantage de moyens que les zones urbaines et ont des résultats scolaires meilleurs. Le ministre va par ailleurs continuer à supprimer des postes d’enseignants.
Ne pas heurter le privé
Sur le privé, « on a besoin d’avancer mais si on ne veut pas se heurter à un mur on ne peut le faire que par le dialogue« . Pap Ndiaye ne détaillera pas l’accord avec l’enseignement catholique, pourtant annoncé le 20 mars puis le 27 mars. Rappelant la demande du président du département de Seine Saint Denis de faire entrer son département dans l’académie de Paris, il précise qu’il travaille à atténuer l’écart. « Redéfinir les frontières académiques est un travail long. Mais on a des propositions intéressantes à formuler« .
IEF : 90% de demandes acceptées
Interrogé à deux reprises sur le devenir de l’instruction en famille, Pap Ndiaye donne un chiffre : 90% des 59 000 demandes d’instruction en famille ont été acceptées, ce qui constitue un net assouplissement par rapport aux intentions de la loi séparatisme. Mais aussi un durcissement pour les familles qui auparavant avaient le droit d’instruire leur enfant. « Il y a des variations académiques. On a besoin d’être plus juste« , ajoute-il.
Bac : les élèves seront-ils là au 3ème trimestre ?
Restait le bac dont les épreuves de spécialité viennent de se terminer. Le ministre se félicite que tout se soit bien passé. « On a un enjeu pour le troisième trimestre. Les élèves seront-ils motivés ? » demande-t-il. « On fera le bilan à la fin de l’année scolaire. L’intérêt intrinsèque des disciplines doit motiver les élèves« . Toujours loin du terrain ?
François Jarraud