En déplacement au collège préfigurateur de Cirey sur Vezouze Meurthe-et-Moselle (54), la ministre de l’éducation nationale a revu à la baisse le déploiement du plan numérique dans les collèges à la rentrée 2016. Ce sont finalement 1510 collèges qui seront dotés de matériel pour les classes de 5ème. La ministre a promis de nouvelles ressources numériques pour la rentrée. Le plan numérique démarre lentement mais avance…
« Le plan numérique rendra l’école plus attrayante..Il ne dispensera pas du courage qu’il faut pour apprendre ». Le 7 mai 2015, François Hollande présente le nouveau plan numérique en promettant de doter tous les collèges d’une tablette par élève d’ici 2018. Le financement du plan repose sur une association de l’Etat et des départements, ces derniers devant fournir la moitié du coût. Pour l’Etat, sur trois ans, l’effort est estimé, avec la dotation en logiciels, à un milliard. Un tiers de cette somme devant être prélevée sur les investissements d’avenir.
Un coup de frein au plan numérique
A quelques mois de la rentrée, il est clair que les prévisions ne seront pas atteintes, comme Le Café pédagogique l’avait annoncé le 29 février. A Cirey sur Vezouze, Najat Vallaud Belkacem a fait le point. Le plan prévoyait 2800 collèges équipés à la rentrée 2016 (40%). Finalement il n’y en aura que 1510, soit seulement 21% des collèges. Ce nombre inclue les collèges déjà équipés antérieurement, soit plus de 500. Du coté des écoles, la ministre annonce 1256 écoles, soit 2%.
Si, pour la ministre, « c’est tout le territoire qui est couvert », il est clair que la couverture est toute relative. Depuis le lancement du plan , de nombreux département ont basculé dans l’opposition et certains ont remis en cause les engagements pris par l’équipe précédente. D’autres ont pu être convaincus d’attendre par l’étude publiée par l’OCDE en septembre qui relativisait l’impact des dotations générales. Une 3ème vague de projets sera lancée le 17 juin dans l’espoir d’attirer d’autres établissements à l’horizon 2017.
« Je ne suis pas de ceux qui pensent que le numérique pris isolément est forcément une bonne chose pour l’école », a déclaré la ministre. « Les résultats de la dernière enquête de l’OCDE sur ce sujet ont montré que le numérique n’était pas une recette miracle. Il ne suffit pas de mettre un élève devant un ordinateur pour que des progrès se réalisent. Par contre, je suis convaincue qu’il serait grave de laisser le numérique en dehors de l’école. Si l’École ne s’empare pas du numérique, une part importante de la vie de nos élèves restera un non-dit au sein d’un lieu qui a pour vocation d’apporter du sens au monde qui nous entoure… Si j’agis en faveur du numérique à l’École, ce n’est donc pas parce que je crois naïvement que le numérique est forcément une chance. Le numérique n’est ni bon ni mauvais en soi. C’est une opportunité, dont nous devons nous emparer de manière cohérente ».
De ressources promises
La ministre a aussi promis une dotation en ressources numériques. « Toutes ces ressources seront progressivement disponibles dès le mois de septembre gratuitement et pour trois ans, pour tous les élèves du Cm1 à la 3ème », a assuré N Vallaud-Belkacem. Les établissements restés en dehors du plan pourront aussi en bénéficier. 11 offres ont été retenues par le ministère. Les ressources couvriront les programmes de maths, français, sciences, langues et histoire-géo.
Un nouvel appel à projet pour des « services innovants » sera lancé dans les jours qui viennent. Il bénéficiera de 5 à 8 millions d’euros.
Les limites du plan
Même à un niveau nettement plus faible que prévu, le plan numérique permet un bond sérieux dans la dotation des collèges. La ministre a précisé que le plan Très Haut Débit devrait faciliter la mise à niveau des infrastructures nécessaire du fait d’une arrivée aussi massive de matériels.
Pour autant la dotation massive et indifférenciée des établissements, même accompagnée d’un plan de formation de trois jours, n’implique pas la généralisation des usages. Là où des équipes volontaires sont constituées et auto formées, le nouveau matériel sera accueilli positivement. C’est ce qui se passe dans les collèges préfigurateurs où des enseignants bénéficient de l’équipement mais ni tous les enseignants, ni tous les élèves.
Le plan numérique ne fera pas s’améliorer le niveau global des élèves français, comme l’a montré l’OCDE. Pour cela il resterait a construire collectivement dans les établissements les usages pédagogiques. Pour Eric Charbonnier, « un des enjeux c’est de créer une culture de collaboration entre les enseignants ». Pour cela il faudrait une autre culture de la gouvernance.
Le plan numérique ne résoudra pas non plus le principal problème de l’école qui est celui des inégalités scolaires. C’est dans les zones prioritaires que se fabrique l’échec scolaire et que s’amplifient les inégalités sociales. On pourra comparer l’investissement mis dans le numérique avec celui du nouveau plan éducation prioritaire (un tiers..).
Ce que marque ce plan c’est la volonté d’impliquer les collectivités territoriales sur un vrai partage, en les laissant aussi décider des modalités. « Le sens politique de cette annonce est surtout autour de la méthode pour éviter que ne se creuse le fossé numérique : à faible dose, mais surtout en proposant davantage de local et moins de global ou de national. C’est probablement une évolution plus fondamentale qu’on ne l’imagine », écrivait Bruno Devauchelle en mai 2015.
François Jarraud
Le plan numérique : dossier ministériel
Le compte-rendu de la visite dans l’Est Républicain
Plan numérique : retour d’experiences