Le B.O. du 30 mai publie une nouvelle circulaire sur les fournitures scolaires. Omni compétent, pour limiter les dépenses des parents, le ministère propose des listes types qui entrent dans le détail des grammages et des carroyages de la papèterie scolaire. Le texte signé du ministre lui-même invite à établir une liste unique de fournitures au niveau du conseil d’école ou du conseil d’administration Si l’intention est louable, avec cette mesure peu réaliste l’éducation nationale renoue avec la tradition des textes destinés à ne pas être appliqués. L’éducation nationale est un tigre… de papier.
« Il nous faut préserver le pouvoir d’achat des familles en agissant sur la consommation par de justes recommandations en matière d’achat de fournitures scolaires », annonce la circulaire. « Ces pratiques d’achat responsable sont également une bonne manière de réduire le poids du cartable », ajoute-elle. Le texte aborde ainsi deux soucis réels des familles. » Pour permettre aux parents d’élèves de maîtriser les dépenses liées à la rentrée scolaire et de bénéficier de fournitures au meilleur prix, le ministère dresse une liste-modèle de fournitures scolaires pour chaque niveau d’enseignement dans la perspective de la rentrée. » Et les Dasen sont invités à mobiliser toutes les troupes d’inspecteurs et de chefs d’établissement faire connaître cette liste type dans toutes les écoles de France.
Au sein de l’établissement ou de l’école, » la liste des fournitures scolaires doit être arrêtée, selon le cas, par le conseil d’école ou le conseil d’administration. Elle est le référentiel commun au sein d’une école ou d’un établissement », ajoute pompeusement la circulaire. Administrativement, » dans les écoles primaires, la liste des fournitures scolaires individuelles susceptibles d’être demandées aux familles est soumise au conseil d’école, après examen en conseil des maîtres ou en conseil des maîtres de cycle. Dans les établissements d’enseignement du second degré, sur saisine du chef d’établissement, le conseil d’administration détermine les principes qui doivent prévaloir dans l’élaboration de la liste des fournitures scolaires. Le conseil pédagogique peut proposer une liste de fournitures communes à plusieurs disciplines, dans le cadre de l’harmonisation des pratiques. »
Cette belle mise en ordre administrative a pourtant très peu de chances de s’appliquer. « Il ne se passera rien », prophétise Philippe Tournier, secrétaire général du Snpden, premier syndicat des chefs d’établissement. Pour lui les Conseils d’administration (CA) ont autre chose à faire. « Ce n’est pas opératoire pour des conseils qui sont des dispositifs lourds. Je ne suis pas sur que ce soit dans leurs attributions. Les conseils pourraient voter les listes les plus longues possible. Et comment ferait-on face à l’imprévu ? » Frédérique Rolet, secrétaire générale du Snes, rappelle qu’en lycée il y a beaucoup de demandes spécifiques en fonction des options. « Le C.A. ne doit pas statuer là-dessus. Ce n’est pas l’endroit le plus raisonnable pour décider de cela »
Mais que sait-on en réalité des listes de fournitures ? « Dieu sait qu’on envoie sans cesse aux chefs d’établissements des enquêtes à remplir », répond P Tournier. « Mais personne ne nous a jamais posé de question à ce sujet. Je n’ai vu passer aucune enquête. On ignore la situation réelle ».
Pour P. Tournier, « c’est comme cela que le système s’enraye progressivement ». Le risque ce n’est sans doute pas tant de voir le C.A. passer trop de temps à établir une liste de fournitures. C’est plutôt de voir que l’habitude des textes destinés à n’être jamais appliqués perdure à l’éducation nationale. Encore une fois avec cette liste de cahiers et de copies vierges, l’éducation nationale va démontrer qu’elle n’est qu’un tigre… de papier.
François Jarraud