Entre classeur numérique, espace modulable et projets innovants annuels, les lycéens de la « seconde @venir » sont encadrés par une équipe d’enseignants très impliquée. Daphné Jacamon enseignante de lettres et Frédéric Guilleray en SVT, co-professeurs principaux de cette classe du lycée Louis Jouvet de Taverny (95), retrouvent chaque semaine pendant 1h30 de concertation l’équipe pédagogique de la classe : Emmanuelle Chasles (anglais), Audrey Marcaud (SES), Gaël Cais (Physique-chimie), Thomas Leblond (mathématiques), Laurent Geray (espagnol), Pierre-Yves Le Berre (histoire-géographie) et Ervan Roussel (documentation). Formés sur leurs propres stratégies d’apprentissages, leurs lycéens ont 3h de mémorisation active par semaine. Pourquoi cette réorganisation de la classe de seconde ? Comment se coordonne-t-elle ? Quels outils sont utilisés par ces enseignants ? Frédéric Guilleray répond à nos questions.
Quels objectifs pour cette « Seconde @venir » ?
La seconde @venir est centrée sur 4 axes. Le premier c’est apprendre avec le numérique : tous les élèves sont équipés de tablette qui leur sert de classeur numérique. La classe vise aussi à étudier dans un lieu connecté et modulable : la salle réservée à la classe est connectée Wifi et possède du mobilier entièrement modulable (chaises et tables sur roulettes, cloisons aphoniques amovibles), ce qui permet de modifier très rapidement la configuration de l’espace classe. La seconde veut s’adapter au monde de demain : les élèves découvrent des métiers en plateau technique ou dans les projets, travaillent beaucoup en collaboration et utilisent le numérique dans tous les aspects de leur apprentissage. Enfin les élèves participent à plusieurs projets annuels (média/culture, langues et projet scientifique).
Comment ce projet mobilise-t-il l’ensemble des enseignants de la classe ?
Notre équipe pédagogique est une équipe mixte avec : des enseignants du lycée général et technologique pour le français, l’histoire-géographie, les SVT, la physique-chimie, l’EPS et les SES ; des enseignants du lycée professionnel pour les langues (anglais, espagnol) et pour les mathématiques et le professeur-documentaliste qui est membre à part entière de l’équipe.
Nous nous retrouvons toutes les semaines lors d’une concertation de 1h30 qui nous permet de mener le projet. Tous les enseignants sont totalement impliqués dans le projet et participent à tous les aspects de celui-ci :
– utilisation des tablettes ;
– traitement des programmes en deux trimestres, centrés sur les essentiels, afin de proposer aux élèves un troisième trimestre entièrement différencié en fonction de leurs choix d’orientation. Durant ce troisième trimestre, les élèves vont revoir ce qui est nécessaire pour leur 1ère et approfondir les notions propres à leur future filière.
– évaluation par compétences dans toutes les matières et évaluation inspirée du contrat de confiance d’André Antibi ;
– participation à un conseil de classe collaboratif où les élèves sont reçus individuellement ;
– prise en main du conseil de coopérative où les enseignants encadrent à tour de rôle cette instance des élèves ; tous les enseignants ont suivi une formation de sciences cognitives de l’apprentissage et mettent en œuvre des dispositifs autour de l’attention et de la mémorisation : pratique de méditation pour développer l’attention, mémorisation active et expansée, etc.
Comment les élèves ont-ils choisi cette classe à projet ? Quel profil ?
Nous souhaitions une classe de seconde normale avec des profils très variés. Cependant, il fallait recruter des élèves volontaires pour travailler autrement. Le recrutement s’est donc fait sur dossier, lettre de motivation et entretien. Ce processus nous a permis de composer une classe : totalement mixte (50% de filles, 50% de garçons), hétérogène en terme de résultats, avec des niveaux en numérique très différents (de peu à l’aise à très à l’aise) et avec des projets d’orientation à priori très différents.
Les élèves ont été formés en début d’année pendant 3 jours sur les stratégies les plus efficaces pour apprendre (application des sciences cognitives), sur les outils numériques utilisés par l’équipe et sur l’utilisation des tablettes numériques mises à disposition de chacun.
Comment évaluez-vous vos lycéens au cours de l’année ?
Les élèves sont évalués à travers chaque discipline, avec une entrée par compétence à 4 niveaux. Chaque enseignant a développé son échelle descriptive et programmé la formation des élèves sur deux trimestres pour le socle essentiel commun à tous. Ils sont aussi évalués à travers leur investissement dans les projets annuels de la classe
En quoi consistent les 3h de cours de mémorisation dispensés chaque semaine ?
Nous avons remplacé les heures d’accompagnement de français et de mathématiques (2h) ainsi que le deuxième enseignement d’exploration (1h30) par 3 heures de mémorisation. Ces heures sont dédiées à la mémorisation à long terme des essentiels de chaque matière.
Pour chaque cours, les enseignants de l’équipe fournissent les essentiels sous la forme de questions/réponses voire de paquets de carte Anki et durant ces heures dédiées, les élèves font de la mémorisation active. Chaque heure est divisée en un temps de travail individuel : durant ce temps, chaque élève se pose des objectifs de mémorisation et travaille activement à partir des questions ; et un temps d’interrogation en binôme : durant ce temps, les élèves qui ont les mêmes objectifs peuvent s’interroger. En vocalisant, on renforce la mémorisation.
Durant ces heures, les élèves peuvent également se tutorer entre pairs pour s’expliquer des essentiels si besoin.
Quels sont les projets phares menés au cours de l’année des secondes ?
La classe mène trois projets annuels. D’abord un projet média et culture : dans ce projet, les élèves découvrent le monde des médias et du journalisme. Ils réalisent des émissions de web radio ou des magazines en ligne.
Puis un projet e-Europe : en langues, les élèves échangent avec des élèves de lycée européen soit à travers des courriers, soit en numérique (skype ou plate forme eTwining). Enfin un projet scientifique en partenariat avec l’agence spatiale française : la classe de seconde @venir a été sélectionnée par le CNES pour concevoir une expérimentation scientifique qui sera réalisée l’avion zéro gravité de Novespace à la fin du mois de mars. Les élèves vont tester l’effet de l’apesanteur sur l’attention et la mémorisation. Une demi-journée par semaine est dédiée à la réalisation de ces projets.
Entretien par Julien Cabioch
Dans le Café