Face au chômage et à la récession, développer l’enseignement professionnel est une urgence, estime l’OCDE dans l’édition 2020 de « Regards sur l’éducation ». Pour l’OCDE, encourager l’enseignement professionnel c’est développer l’apprentissage, un domaine où la France est en retard. Pour l’organisation ouvrir l’Ecole aux entreprises semble une bonne chose mais sans délaisser les compétences générales.
La crise impose le développement du professionel
« Si l’enseignement à distance a permis une certaine continuité pédagogique sur le plan des apprentissages académiques, l’enseignement professionnel a lui été touché particulièrement durement par cette crise », écrit l’OCDE. « Les mesures de distanciation sociale et la fermeture des entreprises ont rendu difficiles, voire impossibles, les apprentissages pratiques et en entreprise, qui sont essentiels dans l’enseignement professionnel. Et pourtant, ce secteur joue un rôle central pour assurer l’adéquation entre éducation et emploi, la réussite de l’entrée sur le marché du travail et, de manière plus générale, pour l’emploi et la reprise économique. En outre, nombre des professions qui constituaient les piliers de la vie économique et sociale durant le confinement reposent sur les diplômés de la filière professionnelle ».
« Les pays disposant de systèmes d’enseignement et de formation professionnels (EFP) très performants ont prouvé leur grande efficacité pour intégrer les apprenants sur le marché du travail et offrir des possibilités de poursuite des apprentissages et de développement personnel », poursuit l’OCDE. « Durant le confinement qui a suivi la propagation de la COVID-19, la dépendance à l’égard de services vitaux tels que l’industrie manufacturière et les soins de santé, dont nombre reposent sur l’enseignement professionnel, a mis en lumière, plus que jamais, la nécessité de porter un regard neuf sur l’EFP et de mettre en oeuvre des mesures afin d’accroître son attrait auprès des apprenants. L’un des moyens d’y parvenir consiste à promouvoir l’apprentissage en entreprise et à renforcer les liens avec le secteur privé. Contrairement aux apprentissages exclusivement en milieu scolaire, les formations en alternance emploi-études permettent aux élèves d’avoir une compréhension unique du monde du travail. Mis en contact direct avec les employeurs, ils acquièrent les compétences les plus pertinentes et sont directement exposés au marché du travail… Il est également important d’améliorer les possibilités de progression de l’EFP vers les niveaux supérieurs d’enseignement pour permettre aux élèves de développer des compétences valorisables dans le monde du travail ».
Retards français
L’OCDE souligne la faiblesse de l’enseignement professionnel en FRance et encore davantage de l’apprentissage. Un tiers des élèves du secondaire et du cycle court du supérieur est inscrit en EFP dans l’OCDE mais seulement 24% en France. « Le contenu et l’organisation des programmes d’EFP du deuxième cycle du secondaire varient considérablement d’un pays à l’autre. Dans la formation en alternance emploi-études, entre 25 % et 90 % du programme est enseigné en entreprise, tandis que le reste est organisé dans l’environnement scolaire. En France, seuls 25 % des élèves du deuxième cycle du secondaire sont inscrits dans ce type de programmes , alors même qu’ils offrent souvent de meilleurs débouchés. Cette proportion est inférieure à la moyenne de l’OCDE de 34 % ».
Des données exactes mais bien choisies. Le premier calcul met de coté tout l’apprentissage du supérieur long qui est très important. Finalement 39% des élèves du 2ème cycle du secondaire sont en professionnel en FRance contre 42% en moyenne de l’OCDE. S’agissant des programmes emploi-études (apprentissage, alternance),la FRance est bien en dessous de la moyenne OCDE. Mais celle-ci est tirée par quelques pays ayant un apprentissage très important : Allemagne, Irlande, Autriche, Royaume Uni. Elle se situe dans la médiane de l’OCDE. Les jeunes en apprentissage accèdent davantage à l’emploi après leur formation (79 contre 64% pour la voie scolaire) mais le taux de décrochage est nettement plus important que dans la voie scolaire et les élèves sont déjà triés au moment de l’obtention du contrat.
Soutien aux réformes
L’OCDE semble valider les réformes en cours. « En France, des efforts sont faits depuis 2018 afin de rendre le secteur de l’EFP plus attrayant, plus efficace et plus ouvert sur le monde et les métiers d’avenir. Cela passe par le développement de l’apprentissage dans tous les lycées professionnels dans tous les lycées professionnels, mais aussi par la transformation progressive et accompagnée des filières à faible capacité d’insertion professionnelle et un partenariat renouvelé avec les entreprises pour favoriser l’insertion des jeunes. »
L’OCDE pointe quand même des insuffisances. Seulement 62% des élèves dans des voies donnant la possibilité d’accéder au supérieur (bac pro) contre 70% dans l’OCDE. La réforme du lycée professionnel et Parcoursup ont réduit cet accès. Pour l’OCDEpour valoriser le professionnel il faut « renforcer l’exigence académique et ne pas délaisser les compétences générales », or c’est ce qu’instaure la réforme en allégeant les horaires des disciplines générales.
François Jarraud