Avec 77,5% d’une tranche d’âge ayant le bac, la France atteint presque l’objectif que la loi d’orientation de 1989 avait fixé : 80% d’une tranche d’âge au niveau bac. Mais rien n’indique que ce taux puisse se maintenir. Les résultats 2012 montrent aussi d’inquiétantes disparités. Entre les filières et les régions. Mais surtout sociales : le bac des riches et celui des pauvres évoluent désormais de façon opposée. Voilà qui devrait interpeller le gouvernement.
Il aura fallu 23 ans pour atteindre l’objectif fixé par la dernière loi d’orientation promulguée sous une majorité de gauche. 77,5% des jeunes français de la génération 2012 ont obtenu un bac, soit 5% de plus qu’en 2011 qui avait déjà marqué un net bond après 15 ans d’immobilisme total.
Cette hausse s’explique en partie par une augmentation des bacheliers généraux (+1%). Mais l’essentiel provient de l’augmentation du nombre de bacheliers professionnels. Il y a cette année 10 000 bacheliers généraux en plus alors que le nombre de candidats a augmenté de 7 000. Il y a 4 000 bacheliers technologiques en plus pour 7 000 candidats en moins. Il y a surtout 34 000 bacheliers professionnels en plus pour 57 000 candidats supplémentaires.
Bac des riches et bac des pauvres
L’évolution des bacs est donc très différente. D’un coté le bac général frôle les 90% de reçus (89,6%) avec 91% en S et 87% en L. Le taux de réussite a encore augmenté de 1%. Les bacs technologiques continuent leur déclin démographique et le taux de réussite augmente peu (1%). C’est le contraire du coté du bac professionnel. On observe une forte poussée du nombre de candidats et par la suite du nombre de reçus alors que le taux de réussite connaît une nette chute : -6% avec 78% de reçus.
Derrière cette présentation scolaire, la réalité sociale est simple. Pour les enfants des classes favorisées le bac est de plus en plus une formalité. D’où le discours relayé par les médias sur l’inutilité du bac, sa perte de signification. Pour les enfants des classes défavorisées, qui forment la grande majorité des bacheliers professionnels (54% des élèves contre 23% en bac général), le bac est un objectif qui devient de plus en plus inaccessible. Cette évolution divergente pose la question de la démocratisation de l’Ecole.
La réforme du bac pro interrogée
Il restait encore quelques milliers de bacheliers professionnels sous la formule du bac en 4 ans ce qui explique en partie la hausse du nombre des candidats et rend sceptique sur le maintien en 2013 du taux global de bacheliers dans une génération.
Mais l’événement principal c’est que 2012 a vu arriver au bac la première génération de bacheliers professionnels ayant suivi la réforme du bac en 3 ans. Les résultats montrent clairement que le bac pro en 3 ans a un taux d’échec supérieur à celui du bac en 4 ans. Le Snetap Fsu, un syndicat de l’enseignement agricole, a pu comparer les résultats des élèves en bac en 4 ans (il en restait encore dans l’enseignement agricole), de ceux du bac en 3 ans. L’écart est important : 28% des Bac pro 3 ans ont échoué au bac contre 15% du bac pro en 4 ans. La réforme du bac professionnel, déjà accusée d’avoir fait augmenter le taux de décrochage dans la série, ne réussit pas à une partie des élèves qui n’arrivent pas à suivre le rythme accéléré qui est imposé.
« Ce résultat appelle des adaptations des parcours vers le bac professionnel pour permettre la réussite du pus grand nombre », note le ministère. Le Snetap demande dès maintenant « un déplafonnement des effectifs en terminale pour accueillir les recalés imprévus et des dispositifs d’accompagnement en 2de et 1ère ».
De fortes inégalités régionales
Les écarts entre académies restent très forts. Quatre académies dominent nettement les bacs généraux avec des taux de réussite dépassant 93% : Rennes, Nantes, Grenoble et Strasbourg. Les mêmes , sauf Strasbourg, connaissent aussi de forts taux de réussite au bac technologique. Inversement Créteil se situe 10 points en dessous au bac général et même 14 points en dessous de Nantes au bac technologique. Créteil a des taux similaires à ceux des académies d’outre mer où on sait que des particularités culturelles et démographiques jouent pour tirer vers le bas les résultats.
Une fois passée la célébration de la hausse du taux de bacheliers en France, l’équipe de Vincent Peillon va avoir à affronter une révision plus anticipée que prévue de la voie professionnelle au risque de voir les gains de 2012 disparaître en 2013. Enfin la question de l’accès au bac général, le seul qui puise faire augmenter le taux de diplômés du supérieur, reste posée.
F Jarraud