« Au delà de la fin du mois de février, il deviendrait de fait techniquement impossible de réorganiser la formation pour la prochaine rentrée ». Le Réseau national des Espe a tenu à prévenir le ministre de l’éducation nationale. Dans un communiqué du 11 février, il donne son avis sur le moment du concours et fixe une sorte d’ultimatum au ministre pour une décision avant la fin du mois. Pourquoi ? Quelles conséquences pour le statut des candidats ?
Le concours repoussé en M2
Le 23 janvier, devant la commission de l’éducation de l’Assemblée, JM Blanquer a lâché sa décision sur l’organisation des concours de recrutement des enseignants. « C’est normal que les concours se passent en M2 », a -t-il déclaré. Une décision qu’il justifie par « la surcharge de travail en M2 », année où, dans le système actuel le fonctionnaire stagiaire doit à la fois obtenir son master 2, rédiger un rapport de recherche et enseigner à mi-temps pour décrocher sa titularisation, ce qui fait beaucoup.
Le 4 juin 2018, JM Blanquer, dans une réponse à un référé de la Cour des comptes, avait déjà annoncé que les épreuves d’admissibilité auraient lieu en fin de L3. Mais sur les épreuves d’admission, il ne se prononçait pas entre M1 et M2, même si déjà perçait l’impression que M2 était privilégié.
Les Espe donnent le calendrier
Restait le calendrier de mise en place de la réforme. Et c’est ce point précis que le communiqué du Réseau éclaire. Il annonce que la décision sera prise d’ici fin février, peut-être pendant le débat sur la loi Blanquer.
Le Réseau des Espe n’est d’ailleurs pas favorable au concours placé en M2. « Il ne peut répondre à l’ambition d’amélioration de la formation actuelle qu’à la condition d’une révision complète des épreuves avec des attendus professionnels donnant tout son sens à une formation initiale universitaire et professionnalisante », écrit le Réseau.
Mais une urgence pousse le ministre à accélérer les choses. Le gouvernement a réaffirmé récemment sa décision de supprimer 50 000 postes de fonctionnaires d’Etat. La moitié de ceux-ci appartiennent à l’Education nationale et JM Blanquer devrait donc dégager 25 000 postes. Il avait 3 ans pour le faire. Mais les mesures Macron prises en décembre suite aux gilets jaunes (15 milliards) peuvent accélérer le calendrier, comme nous l’indiquions le 11décembre.
Des concours à l’avenir des fonctionnaires stagiaires
Or le choix de la date du concours est en lien direct avec les suppressions de postes. La décision ministérielle aboutit à définir un temps de formation des futurs professeurs de 2 années après admissibilité. Quel serait alors le statut du futur professeur durant ces deux années ? Celui de fonctionnaire stagiaire ? C’est impossible car cela doublerait leur nombre. Ce qui est incompatible avec l’objectif gouvernemental de réduction du nombre de fonctionnaires.
Autrement dit, ce qui se dessine avec ce nouveau calendrier des concours c’est la remise en question du statut des fonctionnaires stagiaires. Si cette hypothèse est validée, le candidat reçu au concours d’admissibilité sera tout au long des deux années de formation étudiant, éventuellement étudiant boursier.
L’économie réalisée par l’Education nationale serait sensible. JM Blanquer referait ce que Darcos a fait en 2008. Il rendrait au Budget les postes de stagiaires : ça tombe pile à 25 000 postes, exactement ce qui est attendu pour atteindre l’objectif gouvernemental. Cela représente un milliard. Le ministre pourra même être généreux sur les bourses attribuées à ces futurs professeurs : elles sont payées par un autre ministère, l’enseignement supérieur…
C’est cette évolution qui pourrait être accélérée ce mois ci. Il reste quelques jours pour que le ministre éclaire la situation.
François Jarraud
Le 23 janvier 2018 (à la fin de la vidéo)