Pour sa première rentrée de l’ère Macron, Paris est aux taquets, si l’on en croit le recteur Gilles Pécout : CP dédoublés en REP +, réseaux d’éducation prioritaire renforcés, » retour » des classes bilangues et du latin (qui n’avaient jamais vraiment disparu), etc. Un point noir toutefois : les centaines de jeunes toujours en attente de place dans le supérieur, en grande majorité des bacheliers professionnels.
Le recteur de Paris, Gilles Pécout, avait convié la presse hier matin à un petit-déjeuner pour décrire une rentrée scolaire pimpante dans l’académie. Egalement Chancelier des universités, il n’a toutefois pas caché certaines difficultés à l’entrée dans le supèrieur.
A l’issue de la procédure APB (Admission post-bac), 1 142 bacheliers étaient sans affectation cet été à Paris, soit parce qu’APB leur avait attribué une formation qui était parmi leurs derniers voeux et qui ne leur convenait pas, soit parce qu’ils n’avaient reçu aucune proposition.
Environ la moitié (547) ont ensuite participé à la procédure complémentaire et sont toujours en attente : 15 bacheliers généraux, 105 technologiques et 447 bacheliers professionnels (81% du total).
» Nous traitons au cas par cas, a expliqué le recteur, nous appelons les universités, les vice-présidents chargés des formations, parfois les présidents eux-mêmes. C’est un problème qui sera résolu à moyen terme. Pour les bacheliers généraux, c’est sûr. Pour les technologiques, on devrait y arriver aussi. Pour les professionnels, ce sera plus difficile. »
Carreau
Le plus inquiétant est, à Paris comme ailleurs, le sort des bacheliers professionnels qui voudraient poursuivre dans le supérieur et qui risquent fort de se retrouver sur le carreau.
La plupart du temps, ils ont demandé en premier choix des BTS mais ils n’ont pas eu de place. Ils se sont rabattus alors sur l’université, souvent dans des licences générales où ils ont toutes les chances d’échouer.
Gilles Pécout a expliqué que l’on raisonnait ici en termes de région académique, c’est-à-dire au niveau des trois académies – de Paris, Versailles et Créteil. Un certain nombre de places en BTS ont déjà été créées, a-t-il indiqué sans préciser de chiffre. Mais apparemment, cela ne va pas suffire.
L’orientation des bacheliers professionnels est un des sujets au coeur de la concertation menée par la Ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. A ce sujet, le recteur a indiqué que l’expérimentation en cours dans trois académies devrait être étendue à Paris. Dans ce cadre, ce sont les conseils de classe de terminale qui, dans les lycées pros, décident de l’orientation des bacheliers, qui ne passent plus par la moulinette APB.
Phare
Autre sujet de la conférence de presse : la création des classes à 12 en CP en REP +, mesure phare de la rentrée macronienne. A Paris, cela se serait passé sans problèmes pour une raison essentielle : » Nous avons 8 postes en plus alors que la démographie des élèves continue de baisser en primaire (moins 2 050 élèves) « , a expliqué le recteur.
L’académie de Paris compte 4 REP+ qui abritent 14 écoles. Au total, 52 classes sont concernées par le dispositif » 100% de réussite en CP « . Parmi celles-ci, on ouvre 34 classes à 12 élèves (13 dans certains cas). Et 18 classes gardent leurs effectifs mais avec deux enseignants cohabitant, parce que l’on manquait de locaux pour dédoubler les CP ou parce que c’était le souhait de l’équipe.
Pour ce faire, le dispositif de » Plus de maîtres que de classes » (un enseignant sans classe qui intervient en soutien de ses collègues) a été écorné. Sur les 11 postes existants dans les écoles en REP+, 7 ont été réaffectés aux CP dédoublés et 4 maintenus. En REP, les 32 postes de Plus de maîtres que de classes ont été gardés.
Le recteur a par ailleurs annoncé des formations en lecture pour les enseignants qui vont exercer dans les CP dédoublés.
Continuité
Enfin, la volonté du ministre Jean-Michel Blanquer de redonner toute leur place aux langues anciennes et aux classes bilangues prétendûment disparues ne devrait guère avoir d’impact à Paris.
La réforme du collège de Najat Vallaud-Belkacem autorisait des » bilangues de continuité » pour les élèves ayant suivi en élémentaire une autre langue que l’anglais. A ce titre, la plupart des classes avaient été maintenues à Paris. De même, les professeurs de latin étaient restés dans les collèges dans le cadre de l’EPI (enseignement interdisciplinaire) » Langues et cultures de l’Antiquité « .
« La nouveauté, a indiqué le directeur académique, est que 47 collèges, sur les 115, ont exprimé leur intention d’augmenter leur volume d’heures en latin, ce qui est rendu possible par la circulaire du 16 mai. »
Le recteur a dit vouloir s’assurer que le latin et les bilangues soient bien proposés aussi dans les établissements défavorisés. Reste que de nombreuses études soulignent le risque que ces options permettent de créer des classes d’excellence et aboutissent à une ségrégation interne dans les collèges » fuis « .
Sur la mixité sociale, l’expérimentation menée dans deux collèges du 18ème arrondissement, qui avait provoqué une fronde des parents, est maintenue. Mais sur ce sujet, le ministre est resté remarquablement silencieux et l’on peut se demander s’il entend les étendre.
Coupes
Pour le dispositif » Devoirs faits « , là encore, on ne prévoit pas de chamboulement. Des initiatives existantes, nombreuses dans les collèges en éducation prioritaire, vont être labellisées. Pour le reste, Paris fera appel essentiellement à des service civiques pour encadrer les élèves faisant leurs devoirs.
Au delà d’une rentrée résolument placée sous le signe de l’optimisme, Paris n’échappe pas, enfin, aux coupes sur les contrats aidés. Sur les 1 800 dont l’académie disposait, elle n’en conserve que 1 232.
Comme il est exclu de toucher aux personnes accompagnant les élèves en situation de handicap, ce sont les postes d’assistants de directeurs et directrice d’école qui vont être visés ainsi que ceux de surveillants. Deux sujets sensibles qui risquent de crisper les relations des enseignants avec leur nouveau ministre au passé déjà chargé.
Véronique Soulé