Il y a des réformes qui marquent des points. Celle, profonde , de l’enseignement des langues, vient de prouver son efficacité au moins pour l’enseignement de l’anglais. Selon une étude CEDRE publiée el 17 septembre, le niveau a nettement progressé en anglais au collège. C’est moins vrai en espagnol et allemand où les progrès sont plus limités voire où la chute s’accélère pour les meilleurs élèves.
» Le niveau en langues vivantes des jeunes français était faible. Cinq ans après la réforme mise en place en 2005 il a encore baissé en fin de collège », voilà ce qu’on pouvait écrire en 2012. Réévalué en 2016 dans le cadre d’une enquête CEDRE réalisée par la Depp (division des études du ministère), ce tableau a complètement changé en 2016. Les mesures prises entre 2010 et 2016 ont permis une réelle évaluation du niveau en anglais en fin de collège. C’est moins vrai en espagnol et allemand où les progrès sont limités, voire même où on constate une baisse de niveau. L’enquête Cedre amorce donc d’autres questions sur la réforme et son application.
L’enquête CEDRE suit tous les 6 ans le niveau des élèves en langues. Elle consiste en exercices de compréhension écrite et orale et d’expression passés par près de 4000 collégiens de 3ème pris dans 164 collèges.
Un véritable bond en anglais
En anglais il y a véritable bond en compréhension orale et écrite. Le taux global de compréhension orale passe de 51 à 58% . A l’écrit la hausse est carrément de 26 points ! Surtout tous les groupes progressent. Il y a moins d’élèves faibles et très faibles. Le groupe des très bons fait un bond prodigieux : il double entre 2010 et 2016.
Il reste deux ombres au tableau. D’abord le niveau ne progresse pas en expression écrite. » Avec un taux de réussite de 25 % aux items communs 2010-2016, on note une baisse des performances de 3 points depuis la dernière enquête CEDRE dans la compétence « rédiger des textes articulés et nuancés ». Cette évolution souligne la difficulté persistante pour les collégiens de troisième de produire un texte sans aucune aide ni amorce ». Là on rejoint une difficulté plus globale des collégiens.
Enfin les écarts sociaux demeurent et même se creusent. « En compréhension de l’oral comme en compréhension de l’écrit, les différences de niveaux restent très marquées par l’origine sociale des élèves : le score moyen progresse à mesure que le niveau social augmente. L’écart de niveau entre les élèves des collèges les plus favorisés socialement et ceux des collèges les plus défavorisés augmente depuis 2004, pour avoisiner les 50 points en compréhension de l’écrit et 46 points à l’oral ».
En espagnol un resserrement inquiétant
En espagnol, en compréhension de l’orale le résultat moyen est stable alors qu’on constate un léger progrès en compréhension de l’écrit (+6 points). Ce qui est inquiétant c’est qu’il n’y a pas de progrès chez les meilleurs élèves : ils sont même nettement moins nombreux en compréhension de l’oral. » Un plus grand nombre d’élèves a donc sans doute acquis davantage de connaissances et de compétences de base qu’ils savent mobiliser à bon escient. Ils sont en revanche moins nombreux à savoir mettre en oeuvre des compétences plus complexes pour construire du sens », écrit la Depp.
« En expression écrite, le taux de réussite aux items communs atteint en 2016 est supérieur à celui de 2010, passant de 32,8 % à 37,4 %. Les élèves obtiennent de meilleurs résultats dans le traitement du sujet que ce soit dans le cas d’énoncés simples, de phrases reliées par des connecteurs ou de textes articulés. Pour ce faire, ils savent mieux mobiliser le lexique très courant de la vie quotidienne ».
Allemand : l’oral stagne pas l’écrit
En allemand on note des progrès en compréhension de l’écrit, en hausse de 15 points. La proportion d’élèves faibles diminue nettement et celles des plus forts augmente. Par contre en compréhension orale on ne note pas de progrès. Le nombre de bons élèves a chuté avec l’application de la réforme et n’évolue pas.
» En compréhension de l’oral comme en compréhension de l’écrit, les différences de niveaux restent très marquées par le profil social de l’établissement où sont scolarisés les élèves. Le score moyen progresse à mesure que le niveau social augmente. L’écart de niveau entre les élèves des établissements les plus et les moins favorisés reste stable en compréhension de l’oral (28 points) et diminue légèrement en compréhension de l’écrit, passant de 37 à 34 points. Quel que soit le profil social des collèges, les scores restent stables en compréhension de l’oral mais augmentent en compréhension de l’écrit « .
Réformer est un art d’application
Le contraste entre les langues en partant d’une réforme identique est intéressant à observer. L’application de la réforme a visiblement été très différente selon les langues. Le resserrement des niveaux en espagnol et allemand indique aussi peut être une baisse des exigences. Mais le niveau e langues est aussi à resituer dans son contexte culturel et professionnel global. Les suppressions de postes, les bouleversements apportés à l’organisation de l’enseignement des langues avec les retombées professionnelles jouent aussi sur les résultats. Enfin le contexte culturel porte l’enseignement de l’anglais,pratiqué dès le primaire, davantage que les autres langues.
F Jarraud