Mais comment animer une réunion de parents ?
Animer une réunion de parents ? Oui, mais comment ? L’animateur de l’atelier met d’emblée les participants au travail. Il a préparé une consigne différente pour chaque goupe : pour certains, il s’agit de préparer une réunion école-parents « dans un quartier populaire », pour d’autres une soirée-debat au « point-accueil-familles », d’autres encore une réunion parents-profs dans un collège rural ou dans une école d’application… Faut-il des réunions différentes ? Une fois faite la mise en commun des propositions des petits groupes, il s’amuse : « Moi, en tout cas, je fais toujours la même réunion ! Mais quand j’anime, je ne suis pas un enseignant, mais un médiateur. »
Et il lance sa clé d’entrée : « La première question que je pose aux parents présentes, c’est de demander à chacun de raconter ce qu’ils ont appris à leur enfant depuis qu’il est né. Et vous, ici ? ».
Les propositions fusent : rire, échanger, nager, jouer à la belote, être poli, faire du vélo, ranger sa chambre, « regarder les gens quand on les salue »… Un père africain interrompt : « non, moi je leur ai appris à baisser les yeux face à un Africain, et regarder en face les Européens… »
« Attendez, modère l’animateur en soulignant qu’il est très important de tout écrire. Pour comprendre ensemble combien tous ces apprentissages sont longs, difficiles, coûteux… Et ainsi faire surgir les multiples apprentissages réussis dans la famille, qui aident à prendre conscience de tout ce qu’on a su faire, malgré tout…
Mais savoir faire n’est pas savoir comment on fait… D’où la seconde étape de l’atelier, avec une nouvelle consigne : raconter par le menu un de ces apprentissages aux autres, sans jugement, en demandant des précisions. Histoire de renforcer confiance et confidentialité entre les membres du petit groupe… Pas si simple… Et pas facile à arrêter, une fois que les échanges sont lancés. Le rôle de l’animateur va être d’organiser le classement : finalement, dans un apprentissage, qu’est-ce qui aide, qu’est-ce qui gêne ? Parce que, pour l’animateur, « travailler sur les relations écoles-parents, c’est faire un pas de côté pour aider à conscientiser les savoirs de l’expérience, surtout pour ceux qui se sentent démunis devant les demandes de l’école, qui ont besoin de vérifier qu’ils ont des ressources pour faire face… ».
Ce qui aide à apprendre ? Là encore, pas besoin de susciter l’engagement des participants. Tout le monde a son idée, quel que soit son métier : »Faire confiance », « autoriser les expérimentations contrôlées », « installer la sécurité », « être progressif dans les règles d’autonomie », « encourager et rassurer », « dire non avec insistance », « prendre conscience de l’utilité des règles de jeu », « expliciter », « faire observer avant d’agir »…
Et ce qui gêne ? « Avoir peur qu’il n’y arrive pas » (ou « que je n’arrive pas à lui apprendre »…), « qu’il se fasse mal », « faire à la place », « trop comparer les enfants »… Mais aussi « craindre que son enfant vous échappe » ou « ne pas pouvoir utiliser les relations nécessaires pour me faire aider à leur apprendre ce que je ne sais pas »…
C’est déjà l’heure. L’animateur conclut par une pirouette : « Finalement, comme avec vous ici, dans les réunions que j’anime, je ne dis aux parents qu’une chose : vous m’avez demandé d’intervenir, mais vous savez tout… Tout ce que vous savez dans la vie, mettez-le au service des apprentissages scolaires… Regardez comme la liste des aides et des obstacles à l’apprentissage est assez proche, entre la maison et l’école »
« – Pas si simple » objecte une participante… »Dans beaucoup d’endroits c’est difficile »….
– Vous avez raison, concède l’animateur, modeste. Je ne prédis pas ce qu’il faudrait faire, je ne m’érige pas en donneur de leçon, je suis juste venu dire que les potentiels des uns et des autres sont beaucoup plus importants qu’ils ne le pensent eux-mêmes. Et ça me semble le message essentiel pour avancer ensemble, enseignants, parents, éducateurs.. ». Il a le dernier mot en citant la parole d’un parent croisé un jour en réunion dans un quartier : « Finalement, ce que je comprends, c’est qu’il faut comprendre son enfant, mais sans rester à son niveau ? »…
Une maxime que pourrait reprendre à son compte un psychologue du développement, non ?