Par Cyril Froidure
A propos des biocarburants mais plus largement des énergies vertes, le mensuel Science et vie réalise pour le mois de mars un dossier intitulé « le dossier noir des énergies vertes ». Le titre ne semble laisser aucune place au doute, il s’agit d’un dossier à charge. Toutefois à la lecture, même si la vingtaine de pages consacrées au sujet énumère les défauts des énergies renouvelables, il est plutôt question de « sortir d’un certain angélisme » pour Yves Sciama, au risque dirais-je de tomber dans l’excès inverse : après une promotion en flux continu des énergies alternatives, on passerait à une vague de critiques, de rapports, d’études démontrant leur peu d’intérêt.
Que propose ce dossier ? Il envisage trois paramètres : le poids réel des énergies renouvelables dans la consommation énergétique, leur « vertitude », le néologisme est de moi, réel ou supposée, le rôle du progrès technique.
Pour chaque point, le titre donne le ton. « Renouvelables : le compte n’y sera pas » mesure leur impact sur la consommation mondiale d’énergie. Certes, leur production est en forte croissance, il y aurait un effet de mode (voir la multiplication des champs ou projets de champs d’éoliennes) et les gisements de production semblent sans limites. Seulement à y regarder de plus près, la situation n’est pas toute rose : elles ne sont pas totalement vertes, leur densité énergétique est trop faible (quantité de terrain nécessaire pour produire une quantité d’énergie donnée). A cela s’ajoutent deux difficultés; la nécessité de limiter le réchauffement climatique associée à l’augmentation de la population mondiale dans les 30 prochaines années posent une équation difficile à résoudre : « produire 60% d’énergie en plus tout en émettant 15% de carbone en moins ». Malheureusement pour des raisons de coûts, de disponibilités en terres, de rendement, d’impossibilité actuelle à stocker facilement certaines énergies, les énergies renouvelables n’ont à ce jour pas le potentiel pour atteindre l’objectif désigné, reste un gisement immédiat : les économies d’énergie.
« Des renouvelables pas si vertes » s’attaquent au mythe des énergies alternatives forcément propres, montées en figure de proue du développement durable par leurs défenseurs. Si on gratte, le bilan s’éloigne du 100% vert. Quelques exemples sont soumis au lecteur : un panneau solaire, c’est du silicium produit dans une usine (qui pollue), souvent chinoise (encore plus polluante) au charbon (la pollution est encore plus forte). Deuxième démonstration, des analyses du cycle de vie (ACV) permettent d’identifier matériaux, déchets et donc coûts en tous genres d’un produit. Ces ACV offrent plusieurs conclusions : toutes les renouvelables émettent du CO2 (béton et acier entrant dans la fabrication des éoliennes provoquent des rejets élevés), les rendements énergétiques sont insuffisants, des pollutions associées alourdissent leur passif (pollution visuelle, déforestation…). Sans tout jeter aux horties, il convient donc de garder une ou deux idées à l’esprit : aucune solution n’est donnée ou parfaite, les renouvelables.
Une des solutions réside dans le progrès technologique dans l’optique d’augmenter leur efficacité et leur coût. Seulement, la marge de progrès varie d’une énergie à une autre : faible dans l’éolien, plus forte pour le solaire en améliorant les rendements ou en réduisant les coûts des matériaux (le silicium en particulier). Mais quelques soit l’énergie , le nerf de la guerre reste l’argent, l’argent public entre autres. Pierre Radanne, cité dans l’article indique « qu’aucune filière énergétique ne s’est dispensée de soutien public pendant de longues décennies, au plan de la recherche, de l’industrialisation, de la réalisation d’économies d’échelle ».