Par Jeanne-Claire Fumet
Quel souvenir gardez-vous de votre épreuve de philosophie au bac ?
Pour tous ceux qui ont passé le bac, il y a peu ou bien longtemps, le souvenir de l’épreuve de philosophie reste souvent un point saillant… Nous avons posé la question à des gens de tous âges et de toutes professions, pour voir ce qui reste après coup de ce moment crucial. Dans les réponses, c’est bien souvent la note qui prime, le sujet vient ensuite, la personnalité de l’enseignant enfin puis une impression générale sur l’enseignement reçu. Et parfois rien du tout ! Petit florilège de souvenirs de la philo au bac…
Cette sacrée note !
Mais que resterait-il de la philo à l’école sans cette note du bac ? Bien ou mal vécue, elle n’est jamais insignifiante, dans les souvenirs. Non pas qu’elle occulte le reste, mais parce qu’elle semble bien être vécue durablement comme un indice de reconnaissance particulièrement sensible, qu’elle ait été bonne ou pas. « J’ai passé l’épreuve en 1975, se souvient Brigitte, professeure des écoles. J’ai été soulagée de voir un sujet sur l’Émile de Rousseau ! J’étais assez satisfaite, mais j’ai obtenu un 5 sur 20. » Quant à Lionel, aujourd’hui employé de grand magasin, « grand moment de solitude… avoue-t-il. La première année, une heure de composition : 7/20. Pas terrible. La deuxième année, 3h de composition, 7/20, pas mieux. J’en ai déduit que j’avais atteint dès la première fois les sommets de mes capacités, qui comme les montagnes bretonnes, ne culminent pas bien haut… ». Pour François, journaliste, le sujet est oublié mais pas la note : un joli 13. Mireille, professeure des écoles, se souvient avec soulagement de son 12/20 obtenu en 1985 et Clara, scénariste, enrage encore d’un 7/20 « bien trop sévère », en 1982.
De drôles de sujets
Pour certains, c’est d’abord le sujet qui est resté imprimé dans leur mémoire : « A quels résultats la métaphysique peut-elle prétendre ? cite Marie-Christine, aujourd’hui proviseure, qui a passé l’épreuve en 1974. L’idée d’un résultat de la métaphysique m’a séduite, avoue-t-elle. Ce sujet m’a valu 14. » Pour Mireille, c’était « l’inconscient : est-il en nous nature ou histoire ? » Claire, bachelière en 1985 également, redoutait la dissertation : un texte de Bergson sur l’abstraction dans le langage, l’a sortie d’affaire avec un bon 17. Quant à Constance, jeune professeure de Lettres modernes, « un sujet sur le temps qui m’a fait perdre mon temps », dit-elle. Une note médiocre qui lui a coûté sa mention Bien, estime-t-elle. Vincent, brillant bachelier littéraire en 2009, se souvient d’un texte de Schopenhauer : « un texte court, avec l’impression de ne rien avoir à se mettre sous la dent. Des discussions avec plein d’autres élèves en sortant, la certitude d’avoir été salement hors-sujet au vu de leurs impressions. Et puis ce beau 18 ! » Aude, elle, a passé son bac en 1982 avec un sujet sur la liberté : « Je me souviens de moi écrivant : un moment de pur bonheur », dit-elle, alors qu’elle a complètement oublié sa note. « Je n’ai pas pris le sujet sur nature et culture que nous avions traité en large et en travers, raconte Françoise, agrégée de Lettres classiques. J’ai préféré « l’histoire a-t-elle un sens? » A la sortie un copain m’ a fait remarquer que nous n’avions pas traité ce thème en cours… J’ai réalisé qu’il avait raison. Mais j’avais réussi à caser la phrase de Hegel sur « Napoléon, l’âme du monde assise sur un cheval », que le prof avait cité et qui m’avait laissée rêveuse. En sortant de l’épreuve j’ai pris le bus dans le mauvais sens… »
Et des profs un peu bizarres
« La philo, on n’en fait qu’un un an ! regrette Marie-Anne, comptable, bachelière en 1988 et qui ne se souvient plus de rien. Alors pour peu que le prof ne soit pas terrible, ça ne laisse guère de souvenirs… » François, lui, se souvient « du personnage du prof de philo en dandy quadra assez fascinant. Mais c’était sous Pompidou ! » Leslie, jeune metteure en scène, a adoré les cours de philo. « J’avais un prof hors du commun, qui rendait ses cours très vivants et ne prenait pas ses élèves pour des imbéciles ! J’ai été déçue par ma note au bac, mais c’est secondaire. D’ailleurs, je ne me souviens pas de l’examen, mais des livres que j’ai lus et des devoirs que j’ai rendus tout au long de l’année… » Pour Marie-Christine, elle a gardé le souvenir d’une jeune femme timide, avec des cours très construits mais pas très vivants. Ce qui ne l’a pas empêchée d’adorer la philo.
« Un personnage fascinant, chacun de ses propos m’ouvrait l’esprit, tous ses cours me questionnaient », raconte Mireille qui s’est ensuite inscrite en fac de philosophie. « Un professeur incroyablement soucieux de justesse et de justice, un authentique honnête homme », dit Claire. Quant à Aude, elle a le mauvais souvenir d’un enseignant peu plaisant, dans un prestigieux lycée parisien, où elle organisait des exposés avec ses camarades pour compenser le manque de cours. Ce qui ne l’a pas empêché d’adorer définitivement la philosophie !
Parmi les personnes interrogées, rares sont celles qui n’ont pas gardé un souvenir de cette épreuve ou de cette discipline particulière. Mais au moins les professeurs peuvent-ils se rassurer : « bons » ou « mauvais », « fascinants » ou « ennuyeux », aucun ne semble avoir eu assez d’influence pour entraver la passion des plus férus ou pour susciter l’intérêt des plus indifférents…
Et vous, vos souvenirs du bac philo ?
Sur le site du Café
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