Nouvelle institution de l’éducation, le Cnesco publie à mi mandat un bilan d’action impressionnant de ses trois premières années. Les 21 rapports, 3 conférences de comparaisons internationales, 3 conférences de consensus tous de très haut niveau ont généré 500 000 pages vues et près de 40 000 visionnages de vidéo. Le Cnesco aurait-il réussi à rendre le débat sur l’Ecole audible et populaire ? Et si oui, quelle est sa formule ?
Une évaluation indépendante
« Il faut qu’il y ait un débat de qualité sur l’école en France…Il faut un conseil indépendant du pouvoir politique. L’évaluation ne peut pas être faite par des prescripteurs ». En installant le Conseil national d’évaluation du système scolaire (Cnesco), le 28 janvier 2014, Vincent Peillon a fixé à la fois les objectifs et la méthode.
Le Cnesco, selon la loi de refondation, « est chargé d’évaluer en toute indépendance l’organisation et les résultats de l’enseignement scolaire ». La loi prévoit qu’il réalise des évaluations » à la demande du ministre chargé de l’éducation nationale, du ministre chargé de l’enseignement agricole, d’autres ministres disposant de compétences en matière d’éducation, du ministre chargé de la ville ou des commissions permanentes compétentes en matière d’éducation de l’Assemblée nationale et du Sénat »; qu’il se prononce sur la qualité des évaluations internes du ministère et « qu’il formule toute recommandation utile » sur l’évaluation de l’Ecole.
21 rapports,6 conférences
Présidé par l’universitaire Nathalie Mons, le Cnesco a immédiatement enchainé les travaux à un rythme de plus en plus soutenu. En 2014 il publie deux rapports sur l’évaluation des élèves et le redoublement, deux sujets devenus politiques. 2015 verra de nouveaux rapports sur la mixité sociale à l’école, le calcul au primaire une conférence de consensus sur le redoublement et une conférence de comparaisons internationales sur la mixité sociale à l’école. 2016 est l’année des rapports sur le handicap, la compréhension en lecture, l’enseignement professionnel, les inégalités à l’école, l’attractivité des métiers de l’enseignement, l’éducation à la citoyenneté et les rapports Timss et Pisa. C’est aussi l’année des conférences sur l’enseignement professionnel, le calcul au primaire et la compréhension en lecture. Vous avez pu suivre de près la plupart de ces événements, le Café pédagogique étant un partenaire régulier du Cnesco.
Une méthode originale
C’est que le Cnesco propose quelque chose de très original : des évaluations réalisées par une institution officielle annexée au ministère mais indépendante. L’originalité est aussi dans l’intégration des enseignants dans les études et une diffusion la plus large possible auprès des professionnels.
Nathalie Mons, sa présidente , l’explique. Le Cnesco défend « une méthode d’évaluation originale qui se décline selon plusieurs axes : produire des évaluations scientifiques, de qualité, indépendantes, lisibles par tous…; s’inscrire dans un modèle d’évaluation participative, en réunissant des représentants de la communauté éducative pour interroger ces ressources et en tirer des préconisations d’amélioration, parce que l’évaluation-gendarme, hors-sol, qui manie la sanction symbolique sans reconnaître les contraintes de terrain, n’a jamais fait avancer l’école dans aucun pays ; s’ouvrir à l’international parce que le pays ne peut plus vivre son éducation nationale repliée sur elle-même ; et assurer une diffusion large des résultats des évaluations et de la recherche dans l’institution, grâce à des partenariats efficaces, depuis l’encadrement jusqu’aux enseignants dans la classe, parce que la seule production de rapports d’évaluation ne suffit pas à faire bouger l’école ».
Pour elle ce modèle d’évaluation » correspond aux attentes actuelles des praticiens de l’école qui demandent, à raison, une évaluation scientifique légitime. Il correspond aussi, dans une démocratie, aux demandes d’une société civile qui exige un état des lieux de l’école transparent, une reddition des comptes sur les politiques scolaires menée avec indépendance ».
Quel avenir pour le Cnesco ?
Pour le Café pédagogique qui a suivi deux conférences sur le redoublement ou sur l’évaluation, la différence saute aux yeux. Au lieu des conférences controlées, assénées, répétées et non contradictoires que l’administration sait si bien faire, le Cnesco crée des événements contradictoires, où s’expriment des recherches de haut vol , y compris étrangères, dont les résultats sot mis en débat par des praticiens..
Le Cnesco ne manque donc pas d’ennemis. Parfois critiqué par l’opposition, le Cnesco est régulièrement menacé de recadrage par le Comité de suivi de la refondation, composé de parlementaires. Dans son très récent rapport il demande encore » situer le CNESCO dans le paysage global institutionnel de l’évaluation et par rapport aux instances d’évaluation qui existent à l’intérieur de ce système et à l’extérieur ».
Le programme de 2017 à 2019
En 2017 et 2018 le Cnesco a prévu d’aborder encore des thèmes brulants pour le système éducatif. En 2017 le Cnesco publiera des rapports sur la diférenciation pédagogique, les inégalités scolaires d’origine territoriale, le décrochage et l’évaluation des élèves. Deux conférences auront lieu, une ,internationale, sur le décrochage scolaire et une conférence de consensus sur la différenciation pédagogique.. un colloque scientifique traitera de la qualité de vie à l’école, un sujet particulièrement peu abordé jusqu’ici. 2018 devrait voir des conférences sur les savoirs fondamentaux , la formation continue des enseignants et la gouvernance.Des rapports sur les pratiques d’évaluation, l’éducation à la citoyenneté et le role des parents sont programmés. Les thèmes forts de 2019 devraient être les langues vivantes, le numérique, la mobilité scolaire internationale. Le Cneco envisage aussi de créer une université d’été. D’ici là il faut rappeler que le prochain événement du Cnesco c’est la conférence de consensus sur la différenciation pédagogique les 7 et 8 mars à Paris.
Evidemment tout cela n’aura lieu que si l’alternance politique n’installe pas tous ceux qui ont intéret à couper court au débat intelligent et contradictoire sur l’école. Il semble qu’ils soient nombreux…
François Jarraud
Le rapport d’activité du Cnesco
La différenciation pédagogique :prochaine conférence de consensus