Pas question de diminuer les investissements dans l’éducation prioritaire. Le Snuipp a lancé le 26 janvier un appel à « transformer l’école pour réduire les inégalités scolaires » qui met en avant le rôle moteur de l’éducation prioritaire dans la transformation de l’école. L’appel s’appuie sur deux sondages sur les dispositifs particuliers de l’éducation prioritaire, comme les maitres surnuméraire ou les allègements de service, qui en donnent une image positive. Selon eux, les pratiques pédagogiques évoluent et une dynamique est en marche. Signé par une cinquantaine de personnalités du monde de l’éducation, l’appel demande le maintien des investissements dans l’éducation prioritaire.
Renvoyer une image positive des Rep
« Vous êtes ceux qui portez le système éducatif à bout de bras. L’éducation prioritaire est un miroir grossissant de tous les défis de l’école ». Mais, en ouvrant le colloque sur l’éducation prioritaire, le 26 janvier, Francette Popineau, co-secrétaire générale du Snuipp, va surtout montrer le coté positif de l’éducation prioritaire. Organisé après la publication du rapport critique du Cnesco, le colloque du Snuipp veut montrer les apports positifs de l’éducation prioritaire.
Il s’appuie sur deux sondages réalisés en juin 2016 portant sur deux dispositifs phares de l’éducation prioritaire : les maitres surnuméraires du dispositifs « plus de maitres que de classes » (PDM) et les allègements de service en Rep+, un dispositif que le Snuipp revendique comme sien.
Les maitres + : une amorce de collectifs enseignants
Le sondage portant sur les maitres surnuméraires (PDM) montre que 85% des enseignants (le plus souvent des directeurs et des adjoints) sont satisfaits du dispositif. Les sondés mettent en avant un meilleur suivi des apprentissages, une évolution des pratiques professionnelles et de meilleures relations dans l’école.
Pour autant la médaille a son revers. La moitié des PDM n’a reçu aucune formation et les interventions concernent quasi exclusivement surtout le français alors que TIMSS a montré un niveau désastreux en maths.
Pour Francette Popineau, le bilan du PDM reste très positif. « On n’a pas besoin de maitres extraordinaires mais de maitres capables de travailler en équipe »,dit-elle. « Il faut des formations d’équipe ». Le Snuipp souhaite d’ailleurs que ce soit l’équipe de l’école qui choisisse le PDM. « C’est un changement de dire « on va être deux dans la classe ». La co intervention permet une pédagogie différenciée ».
Ce que défend le Snuipp à travers ce dispositif c’est l’émergence de collectifs enseignants capables d’échanger et de mieux réfléchir à leurs pratiques pédagogiques.
Un laboratoire pour l’Ecole
Les allègements accordés aux maitres en Rep+ sont aussi perçus positivement principalement parce qu’ils permettent la concertation et la formation. Ce temps sert à préparer de projets pédagogiques ou des actions vers les familles. L’enquête souligne aussi l’amélioration du climat de l’équipe pédagogique. En négatif, les formations imposées par les inspecteurs sont souvent jugées peu intéressantes. Mais globalement le dispositif facilite l’évolution des pratiques pédagogiques.
Pour Francette Popineau, l’éducation prioritaire est bien un laboratoire pour l’Ecole. « On souhaite que ces deux dispositifs pour lesquels les retours sont positifs soient développés. Ils ont un effet direct sur le collectif de travail, le climat scolaire et le lien avec les familles et aussi sur les apprentissages.
Un appel à développer les dispositifs
L’appel signé par une cinquantaine d’universitaires (P Meirieu,S Bonnery, R Brissiaud,E Debarbieux, F Dubet, R Goigoux,C Lelièvre, JY Rochex, par exemple) et le Snuipp juge positive la réforme de l’éducation prioritaire. » La mise en place de maîtres supplémentaires, de la scolarisation des moins de trois ans et de temps mis à disposition des enseignants pour travailler en équipe constituent pour nous des premières mesures prometteuses. La scolarisation précoce, le travail en équipe et l’augmentation du taux d’encadrement des élèves sont pour nous des leviers de réduction des inégalités scolaires ».
Il demande à aller plus loin. » Pour répondre aux enjeux de justice sociale, pour faire progresser et réussir tous les élèves…, il est indispensable de renforcer les politiques d’éducation prioritaire, ce qui nécessite d’amplifier les investissements…; de réduire significativement le nombre d’élèves par classe ; d’abonder les moyens en enseignants spécialisés autant que nécessaire ; d’instaurer le travail en équipe par du temps dégagé et des maîtres supplémentaires dans toutes les écoles…; de bâtir une formation continue qui permette un croisement avec la recherche ».
La revendication d’un PDM dans chaque école de l’éducation prioritaire devrait être satisfaite à la rentrée 2017. Le principal point noir reste les Rased. Le Snuipp veut des engagements du ministère sur ce point qui tardent à venir.
Au final, le colloque du Snuipp a réussi à lancer deux idées. La première c’est qu’il se passe des choses positives en éducation prioritaire. Par conséquent les moyens qui y sont mis ne sont pas inutiles. Cette affirmation devra être confirmée par l’étude quantitative sur les apprentissages des élèves que la Depp annonce pour la rentrée 2017.
L’autre idée c’est que ces efforts passent par une transformation pédagogique et pas seulement par des moyens. Ce que l’éducation prioritaire apporte à l’Ecole c’est l’expérience de collectifs enseignants, plus ou moins bien accompagnés, qui inventent de nouvelles formules de travail.
François Jarraud