Vendredi 29 juin, samedi 30 juin et dimanche 1er juillet avait lieu la troisième édition du congrès réunissant les adeptes de la classe inversée, le CLIC 2018. Alternant conférences plénières et différentes formes d’ateliers – retour d’expérience, table ronde, atelier participatif et atelier technique, l’événement a réuni beaucoup d’enseignants du premier et du second degré, qu’ils soient déjà dans la dynamique de la classe inversée ou juste curieux de découvrir ce changement de posture pédagogique.
Claire Suran : La classe inversée à ma façon
Claire Suran est professeure de physique-chimie en collège dans l’académie de Limoges. Elle assistait à son premier congrès de la classe inversée qu’elle a découvert grâce au groupe twitter @teamphysiquecollege. Néanmoins, Claire ne découvre pas cette nouvelle démarche pédagogique. Elle a déjà assisté à une journée de formation académique de l’association « Inversons la classe ». Elle s’essaie depuis à cette nouvelle posture d’enseignant. « Je ne suis pas complètement en classe inversée. Je mets de petites choses en place dans mes cours et je me suis rendue compte ce week-end qu’il y avait déjà plusieurs activités que je menais que l’on peut associer au système inversé ».
Soucieuse de ne pas mettre en difficulté les élèves dont les parents ne peuvent soutenir le travail à la maison, elle leur permet d’accomplir le travail en début de cours et ne rend jamais l’activité maison obligatoire.
Après sa participation aux trois journées du CLIC 2018, Claire est rassurée de constater que ce qu’elle met en place dans ses cours rejoint ce qui est fait par les autres participants. Elle a particulièrement apprécié l’organisation du congrès, qui répondait à ses attentes : « envie de me former, de partager, de discuter autour de cette thématique ». Elle a aussi découvert que des évaluations scientifiques sont venues valider les effets de la classe inversée sur la réussite des élèves, et cela aussi la rassure sur ses choix pédagogiques. Elle repart « reboostée », pleine de nouvelles idées qu’elle souhaite essayer dès la prochaine rentrée mais aussi avec un regain de confiance dans ses choix pédagogiques.
Adélaïde Lebain : L’influence du primaire
Adélaïde Lebain est professeur d’espagnol à Guérande. Elle est venue accompagnée de sa sœur Manuela professeure des écoles en CM2 depuis quatre ans, en milieu rural. Elles ont déjà assisté à l’édition de 2016 du congrès. Adélaïde a été la première des sœurs à s’essayer à cette nouvelle démarche. Avant de découvrir la classe inversée, elle ressentait « une perte de motivation, je voulais retrouver une motivation personnelle et professionnelle. J’en avais assez de voir seulement quelques élèves lever la main, pendant que les autres attendaient que le travail se fasse sans eux. Alors je me suis renseignée sur plein de concepts avant de tomber sur la classe inversée et puis le CLIC ».
Manuela nous explique que « lors du dernier CLIC, on s’est aperçu qu’il y avait plusieurs choses qu’on pouvait adapter du primaire au collège, du coup on partage beaucoup, on peut se prêter des documents qu’on adapte à nos niveaux facilement ». Adélaïde complète le propos de sa sœur : « notamment la notion de plan de travail, très développée en primaire. Il s’agit de laisser une partie des élèves en autonomie sur des activités de réinvestissement pendant que l’enseignant prend en charge un groupe ayant plus besoin de soutien. On les rend plus autonome. Et cela nous oblige, en tant qu’enseignant à repenser le cadre que l’on donne aux élèves, on réinvente le cadre. On apprend à leur faire confiance et à leur permettre de développer de nouvelles compétences psychosociales telles que l’entraide et la coopération ».
Les deux sœurs sont unanimes, élèves et enseignants ont réappris à avoir envie de venir à l’école et au collège. Elles n’enseignent pas exclusivement en classe inversée et ne le souhaitent pas particulièrement. « Moi, je suis quand même novice dans le métier, et je considère que comme pour toute pédagogie, il faut en prendre et en laisser en fonction de soi, de son groupe classe » témoigne Manuela.
Adélaïde insiste sur l’idée d’appropriation de la démarche « Il faut s’adapter, s’approprier les choses si on veut que cela marche ». Dans l’établissement de Manuela, les collègues sont sensibles à sa démarche pédagogique et n’hésitent pas venir observer ce qu’elle fait en classe. Dans le collège d’Adélaïde, c’est un peu plus compliqué, ses collègues estiment manquer de temps mais ont aussi peur de ne pas avoir le matériel nécessaire pour s’investir dans la classe inversée. Le « lâcher-prise » aussi peut décourager certains collègues, selon elle. « Il faut laisser tomber le cadre habituel, évoluer vers un nouveau cadre. Il faut se réinventer, se dépasser car la classe inversée donne du cadre, clairement, il est juste différent. » Le mot d’ordre selon Manuela et Adélaïde : faire confiance aux élèves.
Alexandre Bordas : Tout est possible
Alexandre Bordas est, quant à lui, un jeune professeur de mathématiques en collège, depuis deux ans. Il fait partie du groupe IREM – Instituts de recherche sur l’enseignement des mathématiques – qui est un réseau de profs de mathématiques qui se rencontrent plusieurs journées dans l’année afin d’évoquer Les différentes problématiques liées à l’enseignement de leur discipline. La classe inversée était l’une des thématiques abordées cette année. L’une de ses collègues lui a parlé du CLIC. Alors, Alexandre est venu se faire son idée et « rencontrer plein de gens, pour avoir des retours de ceux qui ont déjà pratiqué la classe inversée ». Il espérait aussi découvrir de nouveaux outils et trouver la motivation pour se lancer. C’est chose faite semble-t-il. « C’est incroyable, on rencontre plein de gens, on se rend compte que les gens ont plein d’idées, que tout est possible ». Alexandre ressort de ce congrès convaincu. « C’est bien que cela arrive en fin d’année, je vais avoir le temps de me poser, de réfléchir à tout cela et de voir comment je vais pouvoir aménager les choses dès la prochaine rentrée ».
Ainsi, après trois jours passés entre pairs volontaires et désireux de tenter de nouvelles choses, les enseignants rencontrés sont unanimes : ce genre d’événements leur permet de se motiver, de se sentir moins isolés, et de « rebooster » leurs pratiques pédagogiques.
Lilian Ben Hamouda