D’une part, des enseignants repliés sur leurs réussites, leurs doutes, leurs difficultés ; de l’autre, un système de formation et d’évaluation toujours bien vertical : et si les professeurs ouvraient leurs classes à leurs collègues, se créaient des temps et des lieux partagés de réflexion et d’expérimentation pédagogiques, réinventaient le métier en infusant un peu partout les valeurs de l’intelligence collective ? C’est le (beau) pari du projet ProfLab, que présentait au dernier Forum des enseignants innovants Julien Gouriou, professeur d’espagnol et formateur Résentice aux usages pédagogiques du numérique dans l’académie de Rennes. Jérémy Collot, concepteur du projet, auteur de « Nouveaux élèves, Nouvelle autorité », nous explique la philosophie et le fonctionnement de cette expérience naissante : d’ores et déjà vient de se créer en ligne un espace ProfLab que chaque enseignant est invité à visiter et habiter pour que l’atelier collaboratif constitue, dans l’Education nationale aussi, de nouvelles pratique et culture professionnelles.
Le projet ProfLab promeut l’intelligence collective : pourquoi prendre ainsi le risque de heurter les pratiques traditionnelles des enseignants, volontiers individualistes, et de l’institution, plutôt pyramidale ?
Je crois que nous arrivons à la fin du modèle que vous décrivez : des individus repliés sur leurs pratiques et une hiérarchie institutionnelle verticale. Les individus sont de plus en plus contestés et le côté jadis rassurant de l’individualisme de l’enseignant « maître et possesseur de sa propre classe » commence aujourd’hui à être vécu au contraire comme anxiogène. Je pense même que les enseignants souffrent sans le savoir du repli qui est le leur. La hiérarchie n’a plus, elle non plus, ni les moyens financiers d’imposer ses desiderata ni les moyens politiques de se lancer dans de grandes réformes. Paradoxalement je vois dans ce double constat une réelle chance pour le monde de l’éducation. L’avenir passera nécessairement par le développement d’une échelle intermédiaire d’échanges et d’expérimentations collectives, bienveillantes, entre les acteurs du monde éducatif. Ces échanges pratiques nourriront à la fois les individus et le système dans son ensemble. Cet « empowerment » des acteurs de l’éducation, qui sont le plus souvent d’une qualité et d’une motivation étonnantes, n’est que la suite logique de l’évolution du métier d’enseignant.
Dissipons tout de suite néanmoins un malentendu possible : l’idée du Proflab n’est pas de mutualiser ou d’uniformiser les pratiques, bien au contraire. Redonner la main aux enseignants, leur permettre d’échanger, de bricoler ensemble, de s’observer en situation professionnelle ne doit pas être vécu comme un dispositif panoptique, un open space où chacun pourra surveiller l’autre. C’est exactement l’inverse. C’est pourquoi nous avons développé des garde-fous dans la méthodologie « Proflab ». Il faut comprendre le Proflab comme un atelier où chacun s’inspire des compétences, des outils, des idées des autres « Proflaborateurs » pour renforcer sa propre vie professionnelle. Et soyons pragmatiques : si le Proflab, qui n’en est qu’à ses tout tout premiers balbutiements, se développe dans le futur c’est qu’il aura répondu à des aspirations profondes des enseignants eux-mêmes. Le Proflab est un projet fait par des enseignants pour des enseignants. Je crois que beaucoup sont prêts à une telle expérience. Mieux : nous faisons le pari qu’ils n’attendent que ça…
Votre projet repose aussi sur une conception, valorisante, du professeur comme créateur : en quoi mérite-t-il selon vous d’être ainsi considéré ?
Vu de loin les enseignants font le même métier, ils ont tous plus ou moins le même diplôme, la même grille de salaire, les mêmes vacances… mais à y regarder de plus près aucun enseignant ne ressemble à son voisin. Je pense qu’il est important pour revaloriser ce métier, et parce que cela correspond à la simple réalité, de singulariser les enseignants. Certes chaque enseignant « fonctionne » dans un système plus vaste mais chaque rouage est infiniment particulier, sensible, humain. Qu’il s’agisse de la construction du cours (des supports, de la pédagogie employée) ou bien encore de la construction des rapports humains (ambiance de classe, rapport avec les élèves, etc.), les enseignants sont dans un rapport d’invention, de création permanente. Ce sont clairement des auteurs, des créateurs. Cette liberté, cette inventivité, les enseignants n’en n’ont pas toujours conscience. Ouvrir sa classe, aller voir l’autre enseignant en situation de cours, voilà qui leur fera prendre conscience de cette partie très personnelle qui est au cœur de leur pratique. Certes ils ont des cadres à respecter (des horaires, des programmes, des valeurs humanistes à défendre, des effectifs parfois difficiles à gérer) mais cela ne doit pas leur faire perdre de vue qu’ils « créent » leur enseignement. Donnez une feuille A4 à 20 personnes et demandez à chacun de dessiner un arbre dans un laps de temps donné et avec une palette de couleurs prédéfinie et vous comprendrez ce que j’essaie de dire…
Si les enseignants sont « créateurs » de leurs cours, je voudrais insister sur le côté pratique de cette création. Ce sont certes des « auteurs » mais également des « artisans », des « fabricants », des « bricoleurs » (le Proflab est né de l’idée qu’il fallait créer l’équivalent des « Fablabs » et « du mouvement des Makers » pour les enseignants… et pour de nombreux autres domaines de service d’ailleurs…). Comme tout créateur, l’enseignant a moins besoin de modèles que de sources d’inspiration, et le collègue à l’autre bout du couloir peut ici s’avérer très précieux. Comme tout « artisan », l’enseignant a besoin de collègues d’atelier. On fabrique mieux à plusieurs et on est d’autant plus créateur que l’on est baigné dans une ambiance ouverte et créative… Je crois que jamais ces deux aspects de leur métier n’est enseigné aux intéressés et pourtant cela pourrait changer beaucoup de choses dans le rapport de l’enseignant à sa propre pratique, dans le rapport des enseignants entre eux, dans le rapport profs/élèves.
Concrètement, le ProfLab imagine plusieurs voies susceptibles d’aider les enseignants à travailler ensemble pour faire progresser leurs pratiques pédagogiques : comment envisagez-vous par exemple les « visites ProfLab » ?
Les « visites Proflab », c’est l’élément le plus surprenant, voire déstabilisant du projet « Proflab » et c’est pourtant là que se situe le cœur du projet. Souvent les gens pensent que le Proflab est un moyen de plus en vue d’une mutualisation des pratiques, ou d’une augmentation d’échanges autour de dispositifs pédagogiques particuliers. Or cela les enseignants savent déjà le faire. Et parfois ils ne le font même que trop bien. Un des travers du travail entre enseignants réside dans la spécificité de leurs échanges. Quand ils travaillent ensemble, ils parlent de tel ou tel élève, de telle ou telle classe, de tel ou tel dispositif pédagogique. Jamais ils ne prennent le temps de juste observer l’autre travailler, jamais ils ne se rencontrent « gratuitement ». Or il y a énormément à apprendre de la simple « rencontre » et des événements auxquels elle va donner lieu. Les « Visites Proflab » ne sont pas des visites ayant pour but de travailler sur tel ou tel point particulier. En fait c’est même exactement le contraire… Ces visites ont une triple visée :
– Ouvrir les portes des classes. C’est l’alpha du projet « Proflab ». L’idée est que des enseignants (quels que soient leur discipline, leur niveau d’enseignement, leur établissement et même leur situation géographique) aillent se « visiter » comme ça « juste pour voir ». Et comme nous sommes pleinement conscients qu’il y a là une exposition intime et affective, nous avons voulu encadrer ces visites par une charte pour que chacun puisse savoir à quoi s’attendre et se sente en confiance. Lors de ces visites, la discrétion est plus que de mise : pas d’intervention, pas de remarques avant, pendant ou après, à l’hôte, aux élèves ou aux autres collègues. C’est une question d’éthique et une question de respect du travail et de l’hospitalité que l’autre nous a offerte. Mais à quoi de telles visites peuvent-elles servir ?
– Nous parions sur le fait que de nombreuses choses vont se passer dans ce moment de partage silencieux et bienveillant. Pour l’hôte ouvrir sa porte changera son rapport aux collègues, à ses élèves. Le fait d’avoir un « visiteur » permet de faire un pas de côté et de découvrir des choses sur sa propre pratique. Le visiteur verra naître des idées, des remarques, et toute une série d’événements, de prises de conscience, d’intuitions du seul fait de prendre place sur un banc. Les élèves comprendront également différemment la notion d’équipe pédagogique.
– Ces visites ont aussi pour but de nourrir le temps collectif du Proflab. Ce que nous avons appelé le Lab des Profs. Ce n’est que quelques jours, voire quelques semaines plus tard que les bienfaits que l’on peut tirer de cette visite, désormais dépassionnée, se feront ressentir. Sans parler en particulier ni de l’hôte ni de soi, les « Proflaborateurs » auront à cœur de prendre de la hauteur par rapport à leur visite pour proposer au groupe des axes de réflexion : des questions plus générales, des idées de dispositif à essayer dans des matières différentes par exemple, ou même jouer les entremetteurs entre d’autres personnes qu’ils ont déjà visitées. Bref de faire profiter tout le groupe de la rencontre qu’ils ont faite mais d’une manière dont le groupe pourra se servir pour aller plus loin.
Qu’est-ce que le « Lab des profs » ? qu’est-ce que la « Fabrique » ?
Le Lab des Profs est le temps collectif de l’ensemble des membres d’un Proflab local. Suite aux visites, on y jette en désordre des questions, des envies, des projets et on voit ce qui se passe. Le lab, c’est aussi le bureau d’étude (avant le prototypage et les tests), le brainstorm, la machine à café, le tea(m)time… c’est le moment où on vient avec une idée et on repart avec quatre… et un groupe de collègues, Proflaborateurs avec qui les approfondir. C’est aussi l’occasion pour tous les membres du Proflab de se tenir au courant de ce qui se fait dans les autres ateliers.
La Fabrique est l’atelier à proprement parler du Proflab. Cela sent le cambouis, les outils traînent un peu partout, chacun prend ce dont il a besoin. Chacun arrive avec ses projets et ses questions ; les gens échangent leurs compétences (et leurs incompétences), leurs expériences et constituent ou non des équipes. Les rendez-vous sont fréquents et chacun peut se promener entre les ateliers. L’équipe du proflab peut être au complet mais l’atelier peut aussi se constituer d’un groupe de 3 ou 4 personnes se rencontrant à leur rythme et dans des lieux qu’ils ont choisis. Le Proflab prône toujours la souplesse. Bricolage, prototypage, échange de savoir-faire, partage d’enthousiasme ou de scepticisme, tout est bon à mettre sur l‘établi. Le but est de travailler ensemble, d’oser essayer des choses avec le soutien concret de ses collègues, proches ou lointains. L’atelier se prolonge aussi dans les classes. Chacun fait ses propres essais, met en place ses propres prototypes. Des visites de classe peuvent être organisées autour de projets particuliers. Cette fois, les visites donnent lieu à des échanges et même à des prises en charge commune de cours. Contrairement aux visites silencieuses estampillées « Proflab », il s’agit de visites de « travail » et de coworking.
« Le ProfLab c’est l’esprit du web sans le web », dites-vous : pouvez-vous expliquer ce paradoxe ? quels sont malgré tout les intérêts spécifiques de votre espace en ligne ?
Deux révolutions, apparemment indépendantes ont lieu en même temps dans le monde de l’éducation : la multiplication sur internet des réseaux d’élèves, de parents, de cours (via l’expansion impressionnante des MOOC, des classes inversées, du renouvellement du elearning…) et l’explosion de l’esprit d’expérimentation collective, concrète, physique, dans des Fablabs. D’un côté la relation à distance, de l’autre, au contraire, le travail en commun autour d’outils concrets. Je crois qu’il faut impérativement lier les deux pour rénover l’éducation. Il faut du web, et du non-web…
Mais allons un tout petit peu plus loin. Je pense qu’il faut, face à cette explosion des réseaux, renforcer très fortement le local, et le travail concret entre les individus. Je crois même que la relation concrète sera le dernier bastion de résistance de l’éducation nationale; ce qu’on enlèvera jamais à l’école. Et ceci vient d’une conviction profonde : en multipliant la vitesse et l’échelle des échanges entre les internautes, internet nous a permis de prendre conscience de l’existence et des bénéfices d’une intelligence collective à grande échelle. Mais il ne faut pas inverser les choses : ce n’est pas internet qui permet l’intelligence collective, il nous a juste permis d’en reprendre conscience et d’en repousser les frontières. Pour autant jadis dans un village il y avait de l’intelligence collective : les compétences s’échangeaient et se complétaient. Il y avait un boulanger, un forgeron, des paysans, des marchands. Notre idée est que le web et ses « méthodes » sont valables alors que nous sommes déconnectés. La sérendipité, la coworking, le hacking citoyen, et tous ces mots très à la mode, nous en avons en fait l’expérience en étant d’abord déconnectés. Je sais bien que l’école a l’impression d’être en retard en ce qui concerne l’intégration des nouvelles technologies et qu’il faut qu’elle fasse des efforts dans ce sens. Pour autant je ne crois pas à une école « cougar » se parant de seuls atours numériques pour pouvoir encore plaire à la jeunesse… Je crois à l’interconnexion quotidienne des enseignants, je crois à la rencontre fortuite qui a lieu au bout du couloir, je crois à la promotion de certaines belles initiatives concrètes qui peuvent « buzzer » dans la salle des profs… être à la page des nouvelles technologies, c’est d’abord être dans un état d’esprit « web », plus encore que d’être un usager même expert du net. Et n’est-ce pas là d’ailleurs ce que l’école doit enseigner aux élèves concernant l’usage des nouvelles technologies?
Notre site en ligne se compose effectivement de deux parties : un site « statique » expliquant notre démarche et la « méthode » Proflab (et des outils permettant de se lancer dans l’aventure Proflab)… et une plateforme que nous avons appelée « e-Proflab ». Cette plateforme a été pensée comme le prolongement du travail en présentiel. Disons que c’est à la fois une machine à café étendue mais plus encore un annuaire des différentes machines à café et des gens qui les fréquentent… : un Proflab distant, un Proflab des Proflabs dans lequel on peut voir les activités des différents groupes. C’est bien plus qu’un réseau social en fait, c’est une vitrine, un appel à collaboration, un moyen de promotion des innovations. Cela se veut être un Meeting, un site de covoiturage pédagogique, un « Le bon coin » du prof bricoleur… Chacun peut y proposer des visites, chacun peut y lancer des ateliers, y trouver des « proflaborateurs », locaux ou distants. Cette plateforme n’est pas le cœur du dispositif Proflab, elle n’en est qu’un outil supplémentaire, le prolongement numérique de l’expérience Proflab. Je pense aussi que cette plateforme, si les gens en comprennent l’intérêt, est amenée à évoluer très vite. Pourquoi par exemple ne pas imaginer cette plateforme également comme l’occasion de promouvoir certaines initiatives particulièrement intéressantes de certains « proflab » comme méritant d’être prototypés par les enseignants eux-mêmes à l’échelle nationale ?
Cette nouvelle façon de travailler vous semble-t-elle transférable en classe ?
Bien sûr. Le nom exact de notre association est « Proflab et Elevelab » : autant dire que nous sommes profondément convaincus de l’impact que peut avoir cette nouvelle façon de travailler sur les élèves. Un prof qui ouvre sa classe, qui échange, qui pense ses cours comme des créations, des prototypes à « bidouiller », qui fera appel à d’autres compétences (tout en étant de plus en plus certain des siennes) … verra évoluer le rapport qu’il a à son propre métier et ne sera plus tout à fait le même prof. De nouvelles composantes vont émerger : la confiance, la fierté, mais aussi une disponibilité nouvelle à une certaine dose d’improvisation, à un certain type d’interactions. La notion même d’équipe pédagogique évoluera et les gens seront des sources d’inspiration les uns pour les autres. Cette intelligence collective, quand on la pratique vraiment, rayonne, et un « proflaborateur » insufflera nécessairement cette façon de travailler à ces élèves. Une personne qui voit le groupe comme une chance, comme une ressource, travaillera et fera travailler sa classe, et le groupe qu’elle constitue, autrement. Et c’est là une des clefs fondamentales à l’avenir pour la jeune génération. Former des citoyens, c’est aujourd’hui leur faire expérimenter ce que peut être l’intelligence collective. Mais je pense que la révolution viendra d’abord des enseignants et que cet esprit « Lab », qui ne se substitue pas du tout aux façons plus traditionnelles d’enseigner d’ailleurs, gagnera les élèves comme par porosité. Et que c’est dans cet ordre qu’il faut faire les choses…
Vous avez participé au Forum des enseignants innovants 2013 organisé par le Café pédagogique : en quoi les rencontres et les échanges qui s’y sont déroulés ont-ils conforté votre vœu d’une refondation de la formation des enseignants ?
Concernant la formation des enseignants je crois bien sûr qu’il faut qu’elle soit refondée; ce qui est en train d’être fait d’ailleurs. Mais plus encore qu’à une refondation, il faudrait probablement rénover la formation dans deux directions : l’innovation et l’autoformation collective, continue. La notion même de formation telle que nous la concevons en France me semble être dangereuse justement en ce qu’elle s’oppose à des notions comme celle d’innovation par exemple. Il y aurait d’un côté une formation initiale plus ou moins statique et de l’autre la promotion de certaines initiatives innovantes. Un tronc commun pour la majorité et pour quelques individus particulièrement créatifs, ou téméraires, le recours à l’innovation. Et si on enseignait dès le départ aux enseignants que l’inventivité, l’innovation, l’intelligence collective, la démarche essai/erreur, le prototypage en partenariat avec la classe, l’improvisation, ne sont pas des « options » mais qu’elles font parties intégrantes du cœur de leur métier?
De plus les enseignants n’ont que peu de temps, et le gouvernement que peu d’argent pour la formation continue des enseignants. On peut, et même on doit, le regretter, mais sauf à être naïfs, nous sommes en droit de penser qu’il en sera de même pendant de nombreuses années. D’où la nécessité d’une autoformation collective des enseignants entre eux dans laquelle les enseignants s’interrogeront, travailleront, prototyperont ensemble. Il en résultera de la liberté, de l’indépendance, et sans doute aussi quelques frictions entre certains enseignants. Ce qui est une bonne chose. Refonder la formation des enseignants passera d’abord, et même si cela semble contre-intuitif, par une refondation du métier d’enseignant… entendu cette fois collectivement et non l’inverse.
Ultime remarque : ce qui est vrai pour une classe l’est aussi pour une classe dont les élèves sont des enseignants. Si un enseignant doit promouvoir et jouer avec l’intelligence collective de sa classe, le formateur de profs le doit tout autant. On parle de plus en plus de elearning pour compenser cette absence de formation continue dans le monde enseignant. Mais allons-nous reproduire le schéma classique (et médiatique) d’une source de parole unique qui s’adresse à plusieurs personnes (typiquement le cours classique avec un prof et une multitude d’élèves) ou allons-nous enfin comprendre que le formateur d’enseignant doit assumer de nouveaux rôles ? Si les enseignants travaillent ensemble, si la communauté existe, partage, et invente, le formateur doit alors prendre sa place au sein de cette communauté et en orienter les forces vives. Il doit devenir un animateur de la communauté, il doit jouer un rôle d’expertise, repérer et promouvoir les initiatives individuelles pertinentes. Il doit être un carrefour qui fluidifie les échanges, donne des directions. Pourquoi recréer toujours de nouveaux supports alors que de plus en plus de ressources sont et seront mises en ligne par les enseignants eux-mêmes? Les formateurs gagneraient à comprendre que la curation du peer-to-peer learning est devenu l’avenir du elearning. Nous espérons vraiment que des Proflabs de formateurs d’enseignants verront le jour, car il n’y a aucune raison pour que le Proflab ne soit pas utilisé comme un moyen de promouvoir ces nouvelles façons de penser la formation des profs eux-mêmes. En tout cas il a été aussi créé pour cela…
Propos recueillis par Jean-Michel Le Baut