Que veut dire désobéir dans l’éducation nationale ?
« On ne compte plus les réformes qui ont été dévoyées silencieusement, et dans l’indifférence générale, par une partie des enseignants » note Philippe Meirieu dans une tribune de soutien à Alain Refalo. « Les cycles, imposés par la loi d’orientation de 1989 ont été abandonnés sans bruit ; le soutien individualisé en seconde n’est plus guère utilisé comme tel ; les heures de vie de classe ou d’ECJS sont, très souvent, employés à d’autres fins… et tout cela sans que personne ne s’en inquiète ».
« Mieux encore », ajoute-il, « Quand des professeurs, et même des associations de professeurs ayant pignon sur rue et table ouverte au ministère, ont appelé au boycott des Travaux personnels encadrés, on n’a vu nulle part apparaître de conseils de disciplines pour refus d’obéissance et incitation à la désobéissance collective. Faut-il donc comprendre qu’un enseignant ne doit être sanctionné que quand il ose nommer ce qu’il fait ? Faut-il donc comprendre qu’on peut désobéir dans la clandestinité ? Ou quand on bénéficie de complicités haut placées ? Qu’on se souvienne, enfin, de ceux et celles qui ont invité clairement à désobéir aux programmes de 2002 en publiant des pamphlets au vitriol : alors que ces programmes étaient encore en vigueur, on leur a attribué des décharges pour expérimenter et diffuser leurs idées ! Alain Refalo n’en demande pas tant ! »
Les désobéisseurs et Tartuffe
« L’Inspecteur d’Académie, et au-dessus de lui, le recteur et le ministre auraient pu tenter de « réguler positivement ce conflit »… Ils auraient pu chercher à écouter notre collègue, à dialoguer, à prendre en compte l’intérêt des enfants en faisant confiance à ce maître expérimenté, en pariant sur son attachement à la réussite de ses élèves, à le convaincre d’ajuster son projet. En tout cas, ils auraient pu commencer par lui reconnaître la liberté pédagogique régulièrement invoquée par les plus hautes autorités de l’exécutif. » Mais non, affirme André Ouzoulias dans un très beau texte donné au blog d’A Refalo. « Au lieu de cela, le pouvoir politique a cherché à « imposer d’en haut ses orientations », il a fait répéter assez pitoyablement par la hiérarchie les règles auxquelles il veut que le personnel obéisse sans rechigner, obligeant celle-ci à endosser un rôle purement répressif, difficilement conciliable avec ses missions essentielles ».
Refalo : La résistance pédagogique est républicaine
« Notre résistance à des dispositifs pédagogiques néfastes, parfois inapplicables et qui contribuent à déconstruire l’école publique, est obéissance aux principes d’égalité, de liberté et de fraternité qui fondent la République » affirme Alain Refalo, un des principaux animateurs du mouvement des « désobéisseurs » dans Libération. « Elle s’appuie tout particulièrement sur la liberté pédagogique inscrite dans la loi… Si M. Chatel souhaite que les enseignants obéissent, il doit signer, en rupture avec son prédécesseur, des décrets et des arrêtés porteurs de progrès pour l’école publique. Car là où règnent la justice et le respect, la désobéissance est sans objet, tant pour les adultes que pour les élèves ».