« On a expérimenté durant deux décennies, il est temps de passer à l’échelle ». Ce cri du coeur d’Hervé Borredon, président de l’Afinef, montre à la fois l’optimisme qui prévaut chez les entrepreneurs du numérique éducatif et un certain agacement devant l’attente imposée par l’Etat. Mais si l’Afinef a réuni le 8 octobre des Assises du numérique c’est aussi pour faire passer ses idées sur un plan e-éducation remis en question au dernier moment par les hommes du président.
L’Afinef peut se vanter de représenter les entreprises du numérique éducatif français. On y trouve une centaine d’entreprises qui vont de toutes petites structures à des groupes puissants. Ainsi l’Afinef associe Intel, Microsoft ou Orange avec des éditeurs classiques comme les éditeurs scolaires du SNE ou Bayard, des entreprises venues de la formation comme KTM Advance et des startups comme Le webpedagogique ou Tralalère. C’est toute une industrie où la concurrence est vive mais qui sait s’associer face à l’Etat. Car c’est bien ce face à face qui justifie la journée du 8 octobre.
« Il y a 4 ans, au moment du grand emprunt, il y avait déjà urgence », estime Yves Dambach, président de KTM Advance. « On avance trop lentement. Le monde ne nous attend pas. Les acteurs se réunissent pour capter le marché de l’éducation évalué à 9% du PIB ». Les entreprises françaises de l’Afinef veulent que l’Etat les aide à s’emparer du marché français avant l’arrivée des multinationales, voire à partir à la conquête des marchés européens et francophones. Déborah Elalouf (Tralalère), qui a conçu pour le ministère du redressement productif le plan e-education en accord avec el ministère et les entreprises, demande que l’Etat soutienne financièrement la prise de risque des entreprises du secteur. Hervé Borrédon, président de l’Afinef et dirigeant d’Itop, veut « un plan sur plusieurs années pas un plan communication ». Les attentes envers l’Etat sont clairement exprimées.
D’autant que le plan e-education a négocié les points d’équilibre avec le ministère de l’éducation nationale. Le plan privilégie l’intégration du numérique dans les disciplines et non un enseignement de l’informatique. Il inclut la formation des enseignants. Il met dans la boucle le primaire et les collectivités locales dont le rôle est perçu comme indispensable. Il considère, à coté d’un équipement général des écoliers et collégiens en tablettes à l’horizon 2020, que les ressources pédagogiques sont un enjeu central.
« Il faut de la pérennité », estime H Borredon. « Le plan Informatique pour tous (un plan d’équipement général des établissements conçu en 1985) a détruit la jeune industrie française du numérique », estime-t-il. L’Afinef demande un démarrage dès 2015 du plan pour préparer le déploiement massif en 2016. « Tous les produits sont prêts ». L’Etat représenté par quelques experts du ministère se tait. Le dossier a échappé aux spécialiste de l’éducation nationale. C’est l’Elysée maintenant qui pilote seul le plan. Et personne ne sait ce qu’il retiendra des longues discussions des acteurs de la filière et du ministère. « Ce qui marche c’est le bottom up », affirme Yves Dambach. On en est loin…
François Jarraud