Le ministre de l’éducation nationale publie aujourd’hui une « Lettre à tous les personnels de l’éducation nationale » qui remplace la circulaire de rentrée de Luc Chatel. Une analyse complète de ce texte sera en ligne vers 10h30. Mais une partie du texte a été dévoilée le 12 juin.
Soulignons d’abord la forme. Le texte devait paraître au B.O. du 22 juin. Finalement, Vincent Peillon a préféré en retarder la publication pour en faire un événement. C’est depuis le Collège Auguste Renoir d’Asnières que le ministre postera symboliquement ce message aux enseignants.
Une Lettre, pas une circulaire…
Plus qu’une énième circulaire remplaçant le texte précédent, V. Peillon donne à ses instructions la forme d’une « Lettre à tous les personnels de l’éducation nationale ». Les 18 points concrets évoqués sont précédés par un long préambule qui évoque « l’esprit dans lequel nous voulons travailler à la refondation de notre Ecole ». Vincent Peillon présente ce texte comme le point de départ d’une politique de longue durée, historique, celui d’une refondation.
S’il lui donne la forme d’une « lettre aux personnels » c’est bien sur que, partout où il est allé depuis sa nomination, il a pu mesurer la force des attentes qui se portent sur lui chez les personnels de l’éducation nationale. Qu’il s’agisse des enseignants ou du personnel administratif, tous ont accueilli avec chaleur et une certaine mobilisation le nouveau ministre. Il dispose d’un capital de sympathie, sans doute volatile, mais bien réel dans un ministère où s’était installé un détachement certain envers la hiérarchie.
La forme n’est pas sans arrière pensée historique. La « lettre » de Peillon fait écho à celle de Jules Ferry. C’est que Vincent Peillon est un grand connaisseur de Ferdinand Buisson, le principal collaborateur de Ferry. Et le vocabulaire de la Lettre, celui des discours de V. Peillon, l’idée même de la « refondation », montrent que le ministre veut inscrire son action dans cet univers historique.
Quel contenu ?
En attendant la levée de l’embargo sur le texte définitif de la Lettre, rappelons que L’Express en a dévoilé de larges extraits le 12 juin. Passant en revue de nombreux sujets elle tranche des points de détail comme elle annonce des réformes d’ampleur. On notera d’emblée 4 points importants.
Quelle évaluation des enseignants ?
La lettre confirme l’abrogation du décret sur l’évaluation des enseignants mais affirme que « le retour à la situation antérieure n’est pas souhaitable ». C’est donc un nouveau chantier, périlleux, qu’entreprend V Peillon. La lettre ne dit rien sur la carrière des enseignants si ce n’est la promesse de la refonte de la formation des enseignants. Le choix des enseignants des établissements Eclair par le chef d’établissement est maintenu avant la refonte complète du dispositif.
A l’école…
La lettre annonce de nouveaux programmes en collège et à l’école. Cette mesure est liée au socle commun qui est affirmé. Pour sa rénovation, les programmes doivent être revus. Ce point reprend une critique souvent formulée de l’absence de lien entre socle et programmes. Mais c’est aussi relancer la course aux programmes inventée par Darcos. Une course justement critiquée. En attendant, le livret personnel de compétences est maintenu mais « connaîtra des évolutions ».
La lettre annonce son intention d’enterrer les dispositifs de pré-orientation. Le DIMA, un dispositif d’apprentissage précoce, est gelé en attendant son abolition. La loi Cherpion, qui permet l’apprentissage sans entreprise, sera également revue. Il n’y aura pas d’ouvertures de nouvelles Dima.
A l’école, les évaluations de ce1 et cm2 sont maintenues mais les résultats ne sont pas remontés. Une concertation est lancée pour leur refonte. Le ministère demande que les cours préparatoires soient confiés à des enseignants confirmés.
La circulaire instaure une pause méridienne de 90 minutes au minimum. Cette demande satisfait une revendication des parents d’élèves. C’est aussi une entrée, modeste, sur le terrain du temps scolaire.
Dans le secondaire…
Le texte réaffirme le principe du collège unique tout en reconnaissant « des parcours différenciés ». Au lycée, la réforme est maintenue sauf l’histoire-géo qui devrait être rétablie en terminale S. Durant la campagne, V. Peillon avait annoncé la réduction d’une heure ou deux du temps d’enseignement en lycée. Ce point n’est pas repris dans le texte de rentrée. L’expérimentation de l’enseignement de langues « intégré » est maintenue à la rentrée.
Le texte propose une vision curieuse de la nouvelle ère. Il promet des réformes dans un nombre impressionnant de domaines mais dans les faits change très peu de choses pour la rentrée au risque, en promettant trop, de se voir accuser de « trop étreindre ».
Vous trouverez à partir de 10h30 sur notre site l’analyse du texte définitif de la « Lettre aux personnels ».
François Jarraud