L’intelligence artificielle peut-elle aider à la compréhension d’un texte littéraire ? Professeure de lettres au collège Saint-Exupéry d’Ermont dans le Val-d’Oise, Elodie Gaden a mené une intéressante expérimentation en ce sens. Le travail porte sur la lecture en 3ème de l’incipit de 1984 d’Orwell dans le cadre d’une séquence sur la science-fiction : un texte « difficile » par son vocabulaire et son univers dystopique de référence. Pour aider les élèves, l’enseignante a demandé à l’agent conversationnel de ChatGPT de lui en proposer une version adaptée à des élèves de 14 ans. L’IA lui en fournit deux versions : une version simplifiée et une version raccourcie.
Durant la séance, les ilots de travail disposent d’outils d’étayage différents : un digipad où sont déposés des images de 1ères de couvertures, des lectures à voix haute par un professionnel, des dictionnaires, la version traduite de l’IA, la version raccourcie de l’IA. Chaque ilot mène un débat de compréhension, puis se voit proposer un autre étayage. A la fin de la séance est ménagé un temps réflexif avec deux questions : quelle est l’aide qui vous a été le plus utile ? que pensez-vous des adaptations par ChatGPT ?
Quel bilan tirer de l’expérience ? La traduction-simplification par l’intelligence artificielle est plébiscitée par les élèves, puis les couvertures du livre et enfin les dictionnaires. Jugement d’une élève allophone sur l’IA : « J’aimerais avoir ça en cours quand je ne comprends pas, car ça facilite la tâche ». Un autre élève en difficulté a réussi à entrer dans une démarche analytique en comparant la version retranscrite à la version originale. Pour autant, « ce n’est pas une solution miracle, loin de là ». En témoigne un autre élève en difficulté : « La traduction par ChatGPT, même si elle est raccourcie, ça reste quand même un texte. La version de ChatGPT m’a ennuyé car déjà que je n’aime pas lire, alors … » L’apport apparait utile pour une première entrée dans le texte qui permettra ensuite d’accéder à sa littérarité : « C’est la 3ème année que j’étudie ce texte dans le même établissement et c’est peut-être la classe avec laquelle on est allé le plus loin dans l’interprétation. » Une remarque d’élève apparait essentielle : « Ce qui m’a le plus aidé à été de parler avec mes camarades ». Autant dire, juge Elodie Gaden, que « les compétences psychosociales sont des leviers puissants pour aborder les compétences de compréhension et de lecture, que « l’entraide, le débat, la discussion avec les camarades, c’est un élément qui ne qui ne peut être remplacé par aucune intelligence artificielle. »
Jean-Michel Le Baut
Présentation en ligne de l’expérience