Alors que deux-tiers des Français sont toujours opposés à la réforme des retraites et que 72% soutiennent les mobilisations selon un sondage Toluna Haris Interractive du 6 février, mardi 7 février plus de deux cents manifestations avaient réuni deux millions de manifestants sur tout le territoire selon la CGT, 750 000 selon le ministère de l’intérieur.
400 000 manifestants selon la CGT ont battu le pavé sous le soleil parisien. Un chiffre en baisse par rapport à la journée du 31 janvier qui en avait réuni plus 500 000 – toujours selon la CGT. Toujours du côté des chiffres, le ministère de l’Éducation nationale annonçait 14% de grévistes chez les professeurs, les syndicats n’en ont pas communiqué, le calcul étant difficile avec une zone en vacances selon eux.
Le facteur économique, un frein à la grève
Cette baisse ne semble pas inquiéter les syndicats. Pour Benoît Teste secrétaire général de la FSU et Frédéric Marchand, secrétaire général de UNSA éducation, la diminution du nombre de gréviste dans le monde de l’éducation est liée aux conditions économiques des enseignants, qui « ne sont pas en capacité financière d’enchainer les journées de grève ». « Mais le nombre de manifestations et de manifestants aujourd’hui malgré une zone de congé dénotent une mobilisation toujours importante. La colère ne retombe pas » commente Frédéric Marchand. « Nous le savions, c’est pourquoi nous avions décidé de mobiliser sur deux temps cette semaine avec le samedi 11 qui va être massif » ajoute Benoît Teste. « On constate qu’il y a une forme de roulement qui s’organise entre les agents en grève dans les services, les écoles et les établissements scolaires ».
Un constat vérifié auprès d’Anne professeure d’espagnol du collège Balzac de Neuilly sur Marne, en Seine-Saint-Denis. « La semaine dernière nous étions 40 grévistes dans l’établissement. Cette semaine, nous sommes 15. Pour beaucoup d’entre nous, la question financière est capitale, on ne peut pas cumuler plusieurs jours de grève lorsque nos salaires sont si bas ». « Mais la gronde est toujours là » avertit-elle.
« Pour l’instant, les collègues restent toujours concernés et convaincus » témoigne Alain, 52 ans, professeur d’EPS en lycée à Brest. « Effectivement, il y a la donnée financière avec les journées de grève qui impactent le salaire de fin de mois. Les collègues essaient de s’organiser pour tenter de participer au mieux et au maximum à ces journées. C’est clair que les non-réponses du gouvernement et le pourrissement de la situation peuvent à terme devenir un problème pour nous. Mais on reste déterminés ».
Diversifier les modalités de mobilisation
Pour les syndicats, l’enjeu est donc de réussir à mobiliser sur la journée de samedi 11 février. « La manifestation de samedi permettra aux personnes qui ne peuvent rejoindre la mobilisation en semaine de venir exprimer leur mécontentement » note le secrétaire générale de UNSA éducation. « Et elle permettra de maintenir un haut niveau de pression à un moment où le texte arrive à l’assemblée ». « On voit qu’il y a une forte attente sur l’organisation de différentes modalités de mobilisations qui permettent à la fois d’embarquer tout le monde et de monter en puissance » ajoute le secrétaire général de la FSU.
Les deux responsables syndicaux vont proposer des rassemblements devant les permanences des parlementaires, « ils doivent entendre le mécontentement, c’est à eux que reviendra la charge de voter ce projet de réforme ».
Malgré les récents aménagements proposées par la Première ministre, les syndicats n’en démordent pas, ils demandent le retrait pur et simple du projet de réforme des retraites. « Les quelques aménagements ne sont pas satisfaisants, mais ils marquent une fébrilité et sont à mettre à l’actif de la mobilisation » explique le responsable syndical de la FSU. « On marque des points. Les députes de la majorité et du gouvernement doutent, ce qui peut peser sur la suite de la mobilisation et sur le débat parlementaire ».
« On peut obtenir le retrait de cette réforme et on est déterminés à l’obtenir » déclare le secrétaire général de UNSA éducation. « On est très inquiets du raidissement du gouvernement. Il y a un réel enjeu démocratique. Si le gouvernement passe en force, cela peut être très dangereux en termes de climat social. On alerte donc solennellement le gouvernement » ajoute Benoît Teste pour qui cette réforme représente « une forme de mépris des travailleurs de non-reconnaissance de la difficulté et de la réalité du monde du travail ».
Dans un communique, les huit organisations syndicales appellent « toute la population à manifester encore plus massivement le samedi 11 février sur l’ensemble du territoire pour dire non à cette réforme. D’ici là, elle i(l’intersyndicale) invite à interpeller les députés et sénateurs et à multiplier les actions, initiatives, réunions ou assemblées générales partout sur le territoire, dans les entreprises et services, dans les lieux d’études, y compris par la grève« .
L’intersyndicale qui se réunira après la journée de manifestations de samedi devrait annoncer les prochaines étapes de la mobilisation. « On anticipe déjà un gros temps fort, cela peut être plusieurs jours de grève, lors de la semaine du lundi 6 mars, au retour des congés » précise le responsable de la FSU. « Et puis, on veut marquer la journée du 8 mars, journée internationale des femmes, puisqu’elles sont les grandes perdantes de cette réforme ».
Lilia Ben Hamouda