» Aujourd’hui seulement 40% des cantines adaptent leur tarif en fonction du quotient familial. Cela veut dire que des milliers d’enfants ne vont pas à la cantine qui reste trop chère ». Comment démocratiser réellement l’Ecole ? Ancien dirigeant de la FCPE, Rodrigo Arenas a été élu député de Paris (LFI) en 2022. Il défend deux propositions de loi pour la gratuité réelle de l’Ecole et le droit de garde des parents en cas d’incident climatique. Il explique son engagement.
Vous venez de déposer une proposition de loi visant à donner aux parents la possibilité de garder leur enfant en cas d’événement climatique grave. Pourquoi ce texte ?
Quand j’étais co président de la FCPE, à chaque fois que l’Etat décidait que les parents devaient venir chercher leur enfant en cas de canicule ou d’un autre risque, les parents dépendaient du bon vouloir de l’employeur. Rien ne l’obligeait à maintenir le salaire. On a eu ensuite l’expérience du covid où on a obtenu l’indemnisation des parents. C’est cette expérience qui m’a amené à déposer cette proposition de loi. Quand l’Etat décide que les enfants courent un risque et que leurs parents doivent venir les chercher à l’école, il ne faut pas que les parents qui le font perdent leur salaire.
Qui doit payer ?
L’employeur doit payer, à charge pour lui de réclamer une aide de l’Etat comme pendant le covid. Cela marche comme les congés supplémentaires pour garder un enfant malade. La proposition de loi imite ce droit à 5 jours par an.
La solution ne serait-elle pas plutôt d’adapter les bâtiments scolaires au changement climatique ?
On est certain d’avoir le risque climatique de façon régulière. Il faut donc les deux. Mais le bâti scolaire dépend des collectivités locales. Et le milliard mis à disposition par JM Blanquer pour refaire des bâtiments scolaires n’a pas été utilisé. Il ne suffit donc pas de budgeter.
LFI avait aussi déposé une proposition de loi, dont vous êtes signataire, pour assurer la gratuité de l’Ecole. Qu’est elle devenue ?
Elle n’a pas pu être étudiée dans l’hémicycle en raison du 49.3. En commission de la culture et de l’éducation elle avait eu un avis défavorable. Mais j’ai entamé ce week-end un tour de France pour assurer une éducation réellement gratuite. Je vais faire en sorte de créer un mouvement national pour la gratuité et pour porter cette idée au Parlement de façon transpartisane. L’idée c’est qu’à la fin du quinquennat tous les frais d’éducation des enfants soient pris en charge par les pouvoirs publics. Il faut que cessent les inégalités entre les enfants.
Concrètement que voulez vous changer ?
Je n’invente rien. Je veux rattraper un retard. Je m’inspire de l’expérience finlandaise qui a réussi à améliorer le niveau des élèves et réduit les inégalités sociales. En Finlande le sport, la cantine, le matériel de l’enseignement professionnel sont gratuits. Cela représenterait pour nous un vrai changement culturel : la mise en oeuvre réelle de la Convention internationale des droits de l’enfant qui stipule que l’enseignement doit être gratuit.
La solidarité nationale doit-elle payer la cantine et les voyages scolaires des enfants de privilégiés ?
Oui car ce ne sont pas les enfants qui sont privilégiés mais leurs parents. Et on peut faire payer davantage ces parents à travers l’impôt sur le revenu. Aujourd’hui seulement 40% des cantines adaptent leur tarif en fonction du quotient familial. Cela veut dire que des milliers d’enfants ne vont pas à la cantine qui reste trop chère. J’ai grandi en cité. J’ai vu le poids de ces dépenses sur le devenir des enfants.
Vous avez d’autres projets ?
Je travaille de façon là aussi transpartisane à des conventions citoyennes pour réguler les écrans des jeunes. On sait l’impact qu’ils ont. Ils posent de vrais problèmes de santé et d’addiction. Comme en Irlande on veut que des parents, des experts disent ce qu’ils attendent d’une loi. On espère éviter d’avoir à indemniser plus tard des personnes affectées dans leur santé par un champ économique dérégulé. Demander aujourd’hui aux GAFAM de s’auto réguler c’est leur demander d’être juge et partie. L’Etat doit réguler par la loi ce qui est autorisé ou pas sur les réseaux sociaux.
Propos recueillis par François Jarraud