« Rendre visibles les invisibles du quotidien ». C’est cette prise de conscience de leur environnement que recherche Delphine Sallez, professeure d’histoire-géo au collège Michelet à Vanves (92). En proposant à ses élèves de réaliser une carte sensible de leur quartier, elle éveille leur sens de géographe. Et elle les invite à travailler leurs représentations de l’espace.
Réaliser une carte sensible
A l’origine du projet une commande académique : il s’agit de présenter dans une langue étrangère son quartier. Delphine Sallez demande à ses élèves de 3ème de réaliser une carte sensible de leur quartier. « Une carte sensible permet de prendre en compte les représentations de l’espace des élèves. Elle permet d’intégrer leur perception du terrain ».
Les élèves travaillent en groupe pour définir et présenter les lieux qu’ils choisissent dans Vanves. Ils préparent une sortie de terrain qui doit mieux faire connaitre le quartier. La sortie les emmène en ville. Elle sera suivie d’une visite aux archives municipales pour une autre découverte de leur ville, cette fois ci à travers son histoire.
« J’attendais qu’ils se réapproprient des espaces connus », nous dit Delphine Sallez. « Mais ils ont observé de nombreux détails et rendu visible de l’invisible de leur quotidien ». Ces pérégrinations et ces détails se retrouvent sur une carte à laquelle chaque groupe apporte sa contribution.
Travailler les représentations
Pour l’enseignante la réalisation de la carte est l’occasion de travailler leur représentations de leur espace quotidien. « Quand il sont construit la carte sont apparues des distorsions intéressantes. Par exemple l’église qui est au nord se retrouve à l’ouest sur leur carte, en lien avec leurs déplacements en ville ». Les élèves choisissent les lieux qu’ils veulent cartographier. Ils ont reconstruit une vision touristique de la ville en cartographiant des monuments qu’ils ne connaissent pas bien mais qu’ils jugent importants.
Le passage aux archives municipales est aussi un temps fort. « Ils ont travaillé sur des cartes depuis la fin du 19ème siècle. Ils ont vu l’urbanisation et comment leur commune est longtemps restée rurale », dit D Sallez.
Une sortie c’est déjà un voyage
Mais à quoi cela sert-il pour l’enseignement de la géographie ? « J’ai voulu sortir des études de cas classique sur l’aménagement du territoire », dit D Sallez. Cette démarche a eu un impact sur la classe. « Représenter les lieux qu’ils voulaient a eu un impact sur leur engagement », nous dit-elle. « Le travail coopératif a bien fonctionné. Ils ont eu une vraie répartition des rôles. Cela a aussi créé un autre rapport avec l’enseignante. Les emmener en sortie c’est avoir un autre regard sur eux qu’en classe. C’est aussi avoir des discussions géographiques ».
Delphine Sallez pense prolonger cette démarche l’année prochaine. « Travailler ainsi m’a nourri professionnellement », nous dit-elle. Cerise sur le gâteau, les élèves en sortie changent. « Des élèves en difficulté en classe deviennent moteurs. Des élèves qui ne me parlent jamais en classe sont venus discuter avec moi ». Sortir dans le quotidien des élèves c’est déjà un voyage…
François Jarraud