Fin d’année, rentrée. Claire Lommé revient sur une année très riche , relue dans l’optique de la prochaine rentrée. Projets pour ses classes, clubs à animer, formations, préparations… Derrière ces formules, un paysage des maths qui s’enseignent et des pratiques pédagogiques qui les portent. Un paysage à parcourir…
Juin 2022. C’est passé bien vite, et en même temps l’année a été franchement épuisante. Mais voilà, elle s’achève. Même s’il reste encore deux semaines de classe (dans mon établissement les élèves sont aujourd’hui fidèles au poste en grand nombre, et une partie importante d’entre elles et eux reviennent après le brevet), je suis en pleine cogitation pour l’année prochaine. J’ai des projets. Tous s’appuient sur des événements de cette année. Je vous en parle ?
Des projets pour les classes
Mon événement de l’année, c’est d’avoir mené un double projet Regards de Géomètre. Assistée, soutenue, encouragée par Nadine Amossé, la coordonnatrice de Maths en Scène en Normandie, j’ai pu emmener mes élèves au bout de magnifiques réalisations et d’une exposition formidable. C’était un gros projet, qui m’a demandé beaucoup d’organisation, de travail, de réflexion et d’énergie. Il en valait la peine, et le mener à son terme m’a permis de progresser dans mes compétences organisationnelles. Par exemple, préparer une sortie est pour moi un enfer. Or j’ai emmené cinq classes, en deux fois… Pour vous donner une idée, quand je suis allée chercher des tickets de transports en commun, c’est l’intendant qui m’a demandé si j’avais pris en compte le retour… Ah non, tiens ! Cela paraît élémentaire, mais voilà, c’est difficile pour moi. Alors aujourd’hui, je suis contente : non seulement je n’ai rien loupé, mais j’ai pris des notes dans mon carnet de l’année pour rationaliser les déplacements à venir avec des classes.
L’année prochaine, je ne renouvelle pas de projet Maths en scène : j’ai envie de varier les thèmes, ne serait-ce que parce que je vais retrouver des élèves que j’ai suivis cette année. Je cherchais un gros projet, avec une réalisation : quelque chose qui puisse être suivi par mes cinq classes, de la sixième à la quatrième, car j’ai aimé les voir travailler en inter-niveau. En discutant autour d’un café avec William Michel, conseiller départemental au numérique éducatif, j’ai trouvé mon projet à venir : le Festi-Robot. Voilà. De la programmation, de l’algorithmique, de la robotique, des maths dedans, un grand événement en fin d’année, ça roule. Reste à retoucher mes programmations pour y intégrer ce projet en fil rouge, mais lié au plus près à nos mathématiques, comme je l’ai fait pour le projet Regards de Géomètre.
Mais ce n’est pas tout : hier, alors que nous fêtions le président sortant et la présidente entrante de l’APMEP (Sébastien Planchenault et Claire Piolti-Lamorthe), un collègue, Yves Farcy, part de pizza à la main, m’a expliqué sa passion pour l’origami et ce qu’il en fait en club et en classe. Il y a quelque chose pour moi là-dedans, c’est certain. Je vais m’inscrire à ses deux ateliers aux journées nationales de l’APMEP à Jonzac en octobre, et j’espère mettre en application dans la foulée. L’écouter quelques minutes m’a convaincue. Avec ce projet-là, je vais apprendre, m’amuser et tendre une nouvelle corde à mon arc, pour emmener mes élèves plus loin, par des chemins détournés, ludiques mais franchement mathématiques.
Les clubs
Début juin, c’était le salon Culture et jeux mathématiques, place Saint Sulpice à Paris. J’ai ramené à mes élèves des Rubiks Cube un peu rigolos, et surtout résistants à la réflexion : certains et certaines sont tellement forts sur les Cube classiques qu’il me fallait monter le niveau. L’animatrice du stand Rubiks m’a proposé de monter un club Rubiks. L’idée m’a séduite : l’année à venir, je cherche à monter des clubs plus structurés, avec les mêmes élèves à l’année, en poursuivant un objectif bien circonscrit. La contrainte était de trouver 50 volontaires. Revenue en classe, j’ai présenté le projet à mes classes. Rien qu’avec mes élèves je dépasse 50 élèves ; cela devrait donc aller comme sur des roulettes. Je n’ai plus qu’à nous inscrire, ce que je vais faire dès cette semaine. Il faut aussi que je commande quelques Rubiks par le FSE, même si nous en recevrons par l’organisation. Et cet été, je bosse : je ne sais plus bien résoudre un Rubiks Cube. Des élèves pourront expliquer leurs algorithmes, mais je dois pouvoir suivre et même mener le cas échéant.
L’année 2021-2022 était aussi l’année du bac de ma fille, et par conséquent celle de son grand oral. Ça été toute une aventure, enfin terminée. Mais un des sujets choisis par ma fille m’a intriguée et alléchée : les ordinateurs sans électronique. Elle a présenté un calculateur à dominos, un autre à eau. Là encore, j’ai présenté le projet à mes élèves, avec des points de vigilance : les élèves qui s’inscrivent s’engagent à l’année, il faudra être patient (d’abord je dois leur apprendre le binaire) et méticuleux (les dominos, ça tombe, en cascade). Je voulais absolument que ce club soit mixte, d’autant que les premiers inscrits étaient des garçons. Je m’étais fixé 20 participantes et participants ; je les ai, dont 11 filles. Impec. Conclusion : cet été, je dois réfléchir à ma programmation de club et faire des essais. Il me faut des dominos. Vite. Et espérer qu’il fera beau pour investir la terrasse, parce que dans le salon, avec les chats et le chien, ça va être compliqué.
Me former
Et moi, qu’est-ce que j’apprends de nouveau, l’année prochaine ? J’ai passé un DE « passeurs », en 2022. Je fais quoi, en 2023 ? La venue de Roméo Hatchi au séminaire de l’APMEP a achevé de me convaincre : je vais apprendre la langue des signes française. J’ai contacté une association, consulté les modalités, et c’est parti pour démarrer en septembre. Cerise sur le gâteau : ma fille suivra la formation avec moi. Peut-être plus tard passerai-je le CAPPEI pour tenter de partir vers l’enseignement aux personnes sourdes ou malentendantes. En tout cas, ce projet m’enchante : je vais développer des savoirs complètement différents de ce que j’ai pu acquérir jusqu’à aujourd’hui. J’espère que cela me permettra de me rendre utile encore différemment. Et tout ça, c’est le séminaire de l’APMEP, les rencontres avec des collègues toujours en réflexion et enthousiastes qui me l’ont permis. Bon, là, pas de devoirs de vacances, ouf.
En revanche, j’ai aussi des lectures pour l’été : je n’ai pas pu développer certains concepts à l’occasion de mon DE « passeurs en éducation », comme la cristallisation. J’aimerais profiter de l’été pour le faire. Et puis je voudrais m’approprier des outils, comme le travail présenté à Limoges, ou des contenus que m’ont envoyés des collègues, comme la géométrie du Petit Prince et autres merveilles.
Préparer la classe
Autre axe de travail estival : je vais avoir en responsabilité une classe de quatrième, l’année prochaine. Or, parmi mes trois classes de cinquième de cette année, un nombre important d’élèves sont en difficultés ou fragiles. Ma progression est rude et je crains de les décourager. Mais j’ai aussi des élèves très performants, voire franchement extraordinaires. Ceux-là, je dois les emmener toujours plus haut. Je ne suis pas adepte de plans de travail intégraux ; il faut ainsi que j’aménage pour permettre à chacun de développer au mieux ses talents, d’avoir envie d’apprendre, de mesurer ses progrès et leur valeur. J’avoue ne pas encore trop savoir comment faire. Je réfléchirai bientôt, mais pour le moment mon cerveau s’y refuse, sans doute parce que l’année n’est pas terminée.
Résumons
Cet été, j’adapte mes programmations au Festirobot, je m’entraîne au Rubiks Cube et je joue aux dominos. Je lis, je n’oublie pas de m’inscrire aux journées de l’APMEP de Jonzac, je prévoie des différenciations efficaces mais exigeantes pour mes élèves de quatrième… J’ai l’écriture d’un ouvrage à terminer, aussi. Ce n’est pas mal, déjà. D’autant que je dois terminer de rénover une maison, et qu’avant tout je vais me reposer et profiter de ma famille.
Je me demande ce que j’aurai effectivement fait, dans ce beau programme, en août. Parce que si j’ai des tas d’envies, je ne me mets aucune pression. On verra bien. En attendant, tous ces projets sont nés de rencontres et d’évènements vécus cette année. J’aime cette dynamique, où la curiosité en amène plus encore. Bonnes vacances à toutes celles et ceux qui en ont, et bel été à toutes et tous !
Claire Lommé