Alors que la lutte contre l’échec scolaire reste une priorité pour l’école française, elle perd un de ses plus ardents combattants avec le décès d’André Antibi. Père de la « constante macabre », animateur infatigable du MCLCM, André Antibi a défendu jusqu’au bout sa vision pédagogique. Il s’est éteint le 20 mai 2022 à l’âge de 77 ans au terme d’une vie bien remplie où il aura fait preuve de talents exceptionnels comme mathématicien, pédagogue, écrivain et musicien.
L’inventeur de la « constante macabre »
La constante macabre, mise en évidence par André Antibi, se traduit par le fait que les enseignants semblent obligés, pour être crédibles, de mettre un certain pourcentage de mauvaises notes, même dans les classes de bon niveau. Le système de notation implique que certains élèves, souvent la moitié, aient « moins que la moyenne ». « On pense qu’une répartition de notes est un phénomène naturel, et donc qu’il est normal qu’elle donne lieu à une courbe de Gauss », expliquait A Antibi. Les résultats sont connus : sentiment d’injustice chez les élèves et aigreur des relations entre professeurs et élèves. Surtout, perte de confiance en soi des élèves, un phénomène qui affecte particulièrement les élèves français selon les enquêtes internationales.
Pour y remédier, André Antibi a imaginé l’évaluation par contrat de confiance (EPCC). Celle-ci repose sur un programme de révision explicite. Une semaine avant le contrôle les élèves disposent d’un programme de révision précis et un ou deux jours avant le contrôle un jeu de questions – réponses permet de déceler les difficultés. L’EPCC s’appuie donc sur des usages scolaires installés en travaillant de façon plus rigoureuse la préparation à l’évaluation.
Avec l’aide du Mouvement contre la constante macabre (MCLCM), André Antibi a largement diffusé ses conceptions aidé par le ministère aussi bien avant qu’après 2017. Il les a aussi fait connaitre à travers une série d’ouvrages. André Antibi avait la plume facile et il excellait à rendre accessible à tous ses idées. Un de ses derniers ouvrages (Pour des élèves heureux en travaillant) abordait l’évaluation et le contrat de confiance à travers une foire aux questions répondant simplement aux interrogations des enseignants.
Le musicien
C’est moins connu, mais André Antibi avait aussi la passion de la musique. Il l’a fait partager à ses enfants avec qui il faisait orchestre. L’orchestre animait des fêtes familiales ou locales. En musique aussi, André Antibi ressentait le besoin de démocratiser ce qu’il savait. Il avait récemment mis au point une méthode d’apprentissage du piano pour que chacun puisse rapidement jouer sans avoir à suivre un long et fastidieux apprentissage.
Des amis de tous bords
Ses nombreux amis saluent son départ. » J’apprends avec une peine immense le décès d’André Antibi. Homme de bonne volonté, plein de bonté et de talents, engagé pour la cause des enfants et pour une pédagogie faite de confiance et de bienveillante exigence », écrit JM Blanquer sur son fil Twitter. « André Antibi a fait progresser notre pays dans un domaine essentiel. Sa ténacité était exemplaire et mobilisatrice », déclare JP Delahaye. » Très triste d’apprendre le décès d’André Antibi, que j’ai rencontré si souvent et que j’ai eu le grand plaisir de soutenir dans ses démarches résolues pour lutter contre la « constante macabre » et sa réflexion sur l’évaluation des compétences des élèves », dit Florence Robine, ancienne Dgesco. « Mes condoléances à ses proches ». Nous y associons les notres.
François Jarraud