Comment évoquer la guerre en Ukraine avec les élèves ? Christine Guimonnet, secrétaire générale de l’APHG, association des professeurs d’histoire-géographie, conseille et montre les pièges à éviter. Une sélection de ressources pédagogiques complète son témoignage.
Ce lundi matin de nombreux élèves auront envie de poser des questions sur l’invasion de l’Ukraine à leur professeur d’histoire-géographie. Faut-il leur répondre ? Cet événement que nous vivons fait il partie de l’histoire ?
Il faut laisser les questions venir. Quand il y a des événements sensibles, les élèves comprennent que l’histoire n’est pas déconnectée de leur vie mais que les routes se croisent. Un autre point important c’est de leur expliquer que l’histoire commence souvent à d’écrire pendant que les événements se produisent.
Si les élèves posent des questions sur l’invasion, on va connecter ce fait avec ce qu’on fait en histoire et en géographie. La géographie a toute sa place : on travaille d’abord avec des cartes. On fera la différence entre histoire et actualité. On fera la part des points fiables. On expliquera avec les ressources dont on dispose. Et on n’hésitera pas à dire que sur tel ou tel point on ne sait pas.
Si l’on utilise des informations on fera attention : qui parle et pour dire quoi ? Il faut bien sourcer ses informations. On distinguera aussi le temps long et le temps court. Par exemple dans l’histoire de la Russie il y a des permanences : il y a une forme impériale qui demeure. Les élèves doivent aussi être capables de faire la différence entre les dirigeants et les populations. Il faut faire comprendre pourquoi Poutine est au pouvoir depuis 20 ans.
Quelles sources avez vous repérées pour les élèves ?
D’abord des cartes historiques, des capsules vidéos sur el site de l’APHG comme plusieurs cafés virtuels organisés par l’APHG. Elles sont signalées dans le padlet cité ci dessous. On pourra aussi piocher dans les cartes de Géoconfluences ou de l’atelier de Sciences Po. Avec mes lycéens, en spécialité, on a travaillé sur la Russie comme puissance en première. En ce moment on est dans le thème sur les frontières. Cela convient bien. On peut aussi utiliser des articles de spécialistes. Sur le site de l’APHG, l’article de Thibaut Poirot est à consulter.
Cette guerre aura de lourdes conséquences. Faut-il aborder ce point avec les élèves ?
Ce serait de la prospective. Il faut surtout rassurer les élèves et ne pas entretenir un climat anxiogène. Même s’il faut bien sur parler des destructions, des morts, des populations qui fuient. On peut aussi évoquer les interdépendances des économies, par exemple avec le gaz. Et rappeler que les décisions des états peuvent être liées à des considérations économiques.
Que dire dans les classes où se trouvent des élèves russes ou ukrainiens ?
D’abord il faut tenir compte de la demande ou pas de la classe. Si la classe n’a pas de demande on dit juste que s’il y a besoin d’explication on est là. Il ne fait pas entretenir quelque chose d’anxiogène.
Il faut dire que les jeunes ici n’ont aucune responsabilité dans ce qui se passe là bas. Il ne faut pas leur coller une affiliation identitaire. Il faut oeuvrer avec délicatesse et garder la distanciation nécessaire.
Propos recueillis par François Jarraud
Des ressources pour le primaire
« Charivari » explique comment elle fait avec ses élèves (du cycle 1 au 3)
Des ressources pédagogiques de l’académie de Reims pour le cycle 3
Voir aussi dans La Libre
Second degré :
Un Dessous des cartes qui fixe les repères géographiques et historiques
Les cartes de Cartographies numériques : un dossier de cartes pour décrypter les enjeux, suivre la guerre de l’information et des ressources pour des activités pédagogiques
Pour le professeur : des analyses
Tous les jours l’ISW, un institut américain, fait un bilan militaire détaillé de la guerre comme ici pour le 26/2
François Heisbourg (FRS) réfléchit dans Ouest France aux ambitions de Poutine et aux conséquences de l’invasion : » on ne peut plus se permettre de partir du principe que l’article 5 de défense des pays membres de l’Otan va suffire de par sa seule existence à avoir la crédibilité nécessaire »
Elie Tenebaum (IFRI) livre son analyse du conflit dans cet article.
Il y a un an FRançoise Thom décryptait le monde vu du Kremlin
Le compte Twitter d’Anna Colin Lebedev, spécialiste des sociétés post soviétiques
Cinq capsules d’ Anna Colin Lebedev sur le site de l’APHG
Les analyses de Tatiana Jean (IFRI)