« Transmettre les valeurs de la République » ou « quitter l’enseignement ». Les propos de JM Blanquer le 19 octobre ont suscité beaucoup d’émotion chez les enseignants qui sont en première ligne pour défendre sur le terrain les valeurs démocratiques. Plusieurs syndicats demandent au ministre de revenir sur ses propos. Interrogé par la députée Elsa Faucillon (PC), JM Blanquer ne retire rien de ses propos.
Basses manoeuvres instrumentalisant le laïcité
» Si vous devenez professeur, vous transmettez les valeurs de la République. Et si vous ne les transmettez pas et si même vous militez contre les valeurs de la République, éventuellement sortez de ce métier… Cela n’a peut-être pas été assez clair dans le présent et le futur, au travers de la formation comme de la gestion de la carrière des personnes ». A l’occasion des journées de formation des référents valeurs de la République, le 19 octobre, le ministre de l’éducation nationale menace clairement les enseignants et les rappelle à l’orthodoxie idéologique qu’il entend imposer.
Ces propos ont fait réagir plusieurs syndicats. » Nous n’avons pas de problèmes avec les valeurs de la République , le ministre en a-t-il avec les fonctionnaires ? », demande la FSU, première fédération de l’éducation nationale. » les suspicions et les propos menaçants du ministre à l’endroit des enseignant-es qui ne transmettraient pas les valeurs de la République ne sont pas recevables ! Ils sont même indignes de sa fonction ! Depuis des mois, le ministre de l’Éducation nationale s’invente des supposés ennemis de l’intérieur pour se construire une stature politique et un destin personnel », écrit-elle. » Comment un ministre de la République peut-il s’abaisser à de si basses manœuvres, en particulier en instrumentalisant une nouvelle fois la laïcité dont il fait un outil de division plutôt que de concorde ? »
« C’est Blanquer qui ne respecte pas la laïcité »
« Inacceptable de se réfugier derrière les « valeurs de la République » pour faire passer sa propre vision d’une laïcité quasi mystique, instrumentalisée pour disqualifier de fantasmé·es « islamo-gauchistes » abreuvé·es d’idéologie « woke » », écrit la Cgt Education. « Les enseignant·es n’ont pas de problème avec les valeurs de la République. Elles et ils respectent la loi en suivant les programmes, quoi qu’elles ou ils puissent en penser. Bref elles et ils font leur travail. En revanche, les enseignant·es, comme n’importe quel·les citoyen·nes, peuvent effectivement être en désaccord avec les réformes de leur ministre, avec son idéologie et avec le mépris qu’il affiche trop souvent à leur égard ».
» C’est bien le ministre Blanquer qui ne respecte pas la laïcité comme il le devrait en augmentant chaque année la part du privé dans le budget de l’Éducation nationale, au détriment de l’enseignement public ; en intégrant des établissements de l’enseignement privé catholique dans les expérimentations à venir de l’Éducation prioritaire ; en publiant une campagne d’affichage qui dévoie la laïcité sur des bases racistes et islamophobes ; en prenant des positions publiques contraires aux dispositions de la loi et du statut de la fonction publique sur la laïcité, concernant l’accompagnement des sorties scolaires par les parents d’élèves notamment. « , écrit Sud Education.
« Rien de scandaleux. Quelque chose de banal »
Enfin la Vigie de la laïcité, fondée par les anciens responsables de l’Observatoire de la laïcité dissous par le gouvernement, « s’étonne de certains propos… La me,ace explicite faite aux enseignants qui refuseraient de « transmettre les valeurs de la République apparait déplacée. En effet la définition de ces valeurs par certaines des personnalités choisies par le ministre pour assurer leur formation ne répond pas à leur traduction en droit mais plutôt à une idéologie conservatrice voire réactionnaire ». La Vigie y voit une « instrumentalisation politique à des fins électoralistes ».
Le 20 octobre, devant la commission de l’éducation de l’Assemblée, la députée Elsa Faucillon (PC) a interpellé JM Blanquer sur ses propos. « Vous avez franchi hier un pas dans la menace… Ce pas est grave et indigne ». JM Blanquer lui a répondu. « J’assume d’avoir radié des personnes radicalisées , êtes-vous contre ? », lui demande t-il. « Il n’y a rien de scandaleux. C’est quelque chose de banal. Etre fonctionnaire correspond à des droits et des devoirs. Dans ces devoirs il y a les valeurs républicaines. Sur 850 000 enseignants il est possible que quelques uns aient un problème avec les valeurs de la République ».
François Jarraud