Si la grève du 23 septembre est lancée par l’intersyndicale (Fsu, FO, la CGT et Sud) sur le thème d’un plan d’urgence pour l’éducation, l’actualité a imposé des sujets qui parlent plus directement aux enseignants. C’est l’avenir des petites démocraties que sont les écoles primaires qui se joue avec la loi Rilhac, adoptée en commission le 22 septembre. L aperspective c’est l’école dessinée par E Macron le 2 septembre avec des directeurs managers qui recrutent et qui s’affranchissent des horaires et des programmes. Dans le second degré c’est la suppression de nouveaux postes d’enseignants au budget 2022 dans des établissements qui n’en peuvent plus. Pour tous les enseignants c’est une revalorisation présentée comme très importante dans la communication (1.1 milliard, 0.7 milliard selon les moments) alors qu’elle n’est que de 260 millions pour les enseignants en 2022. Et que la moitié d’entre eux n’en bénéficient pas. Tout cela devrait mobiliser. Mais ce n’est pas sur. Car c’est un bilan triste à crever.
Une revalorisation low cost
A coup sur l’absence de réelle revalorisation va jouer un rôle dans la mobilisation du 23 septembre. Si la proposition d’A Hidalgo d’une revalorisation significative des professeurs s’est imposée dans le débat des présidentielles c’est bien que la paye des enseignants a atteint un tel décrochage que ce n’est plus admissible. Les mesures prises par le gouvernement sont très loin des attentes. D’abord parce que la moitié des enseignants ne bénéficieront pas de la prime d’attractivité. Ensuite parce que celle-ci est des plus minimes : 57€ pour les échelons 2 et 3, 43€ à l’échelon 4 et 28€ du 5ème au 9ème. Au delà : rien ! Les enseignants ont subi comme les autres fonctionnaires le gel du point fonction publique depuis 10 ans. Mais dans les autres ministères, des primes ont compensé le salaire perdu, ce qui n’a pas été le cas à l’éducation nationale. Les enseignants, qui commencent à moins de 1500€ par mois, sont bien conscients du décrochage de leur métier.
Une révolution dans l’Ecole
En même temps leurs conditions de travail se dégradent. C’est très clair dans le second degré où le nombre d’élèves par classe a régulièrement augmenté depuis 2017 et les suppressions de postes. A la rentrée ce sont 1883 postes qui disparaissent alors qu’il y a 30 000 élèves de plus. En 2022 ce sera encore 470 postes. Le résultat se voit dans les classes surchargées et tout ce que cela entraine comme surcharge de travail pendant et après les cours.
Dans le premier degré, la grande affaire c’est la nature même de l’école primaire. Aligner l’école sur el fonctionnement des établissements du second degré est un des principaux objectifs de JM Blanquer. Il a essayé à deux reprises de passer en force. La première fois, avec la loi sur l’école de la confiance, la mobilisation des enseignants l’a fait reculer. La majorité parlementaire et aussi l’opposition de droite ont pris peur et imposé une modification du projet de loi que JM Blanquer a du , la rage au coeur, accepter. La seconde fois c’était avec la proposition de loi Rilhac. L’année dernière , une nouvelle fois, la majorité a imposé une marche arrière à JM Blanquer. Les députés ont vidé de son contenu la proposition de loi. Et voilà que JM Blanquer remet la question sur le tapis. Pour bien démoraliser les enseignants, Emmanuel Macron lui-même descend à Marseille le 2 septembre et met toute son autorité à crever l’abcès. A Marseille, alors que les écoles attendent un plan de reconstruction, il annonce que les directeurs de 50 écoles, pour commencer, auront des pouvoirs supérieurs à ceux des chefs d’établissement en choisissant leurs professeurs. Le 22 septembre c’est la loi Rilhac qui est adoptée en commission à l’Assemblée. L’enjeu est de taille. Pour les enseignants, il s’agit d’un changement radical de leurs conditions de travail et de la conception même qu’ils se font de leur métier. Mais c’est aussi la question de savoir si l’école est totalement définie par en haut ou si elle s’adapte aux conditions locales, à la communauté où elle s’exerce en lien avec la municipalité. Ajoutons que cette évolution ne répond pas aux besoins des directeurs. Elle va juste rendre leur vie plus difficile en les isolant des professeurs et en renforçant l’autorité des inspecteurs sur eux.
Le second degré vit aussi cette pression accrue qui prend la forme en ce moment du guide d’évaluation au lycée et d’évaluations nationales qui sont perçue comme inutiles par la très grande majorité des enseignants.
Une politique éducative fortement rejetée
Ces derniers épisodes rappellent la rupture entre les enseignants et la politique éducative de JM Blanquer. Toutes les enquêtes, le Baromètre Unsa par exemple, montrent que plus de 8 enseignants sur 10 sont contre cette politique.
Ce n’est pas pour autant que les enseignants seront massivement en grève le 23 septembre. La proximité avec la rentrée, la baisse du niveau de vie, le bulldozer Blanquer et la dureté des relations avec l’employeur depuis plus de 4 années jouent en faveur du repli sur soi. Même quand on arrive à un tournant.
François Jarraud