Des « campagnes de vaccination spécifiques » auront lieu dans les collèges et les lycées à la rentrée. Cette annonce lancée par Emmanuel Macron le 12 juillet prend de court le ministre de l’éducation nationale qui, le 8 juillet, invitait à vacciner les élèves durant les vacances. Il doit aussi décider de la vaccination des enseignants. Et pour une fois anticiper ?
Macron contredit Blanquer
« Pour les collégiens, les lycéens, les étudiants : des campagnes de vaccination spécifiques seront déployées dans les établissements scolaires dès la rentrée ». L’annonce d’Emmanuel Macron le 12 juillet contre dit, une nouvelle fois, son ministre de l’éducation nationale.
Intervenant le 8 juillet sur LCI, JM Blanquer invite les élèves à se faire vacciner durant les vacances. Parce que la vaccination durant l’année scolaire « quand vous faites cela vous désorganisez le système. il y a moins de cours », dit-il. Il doit maintenant mettre en place ce qu’il ne souhaitait pas.
Le précédent du déploiement des autotests dans les établissements scolaires, principalement des lycées, juste avant la fin de l’année scolaire, montre qu’effectivement la vaccination dans les établissements ne sera pas une mince affaire.
Les établissements pas prêts pour les vaccinations
Trois syndicats de personnels de direction (Snpden Unsa, ID FO, Sgen Cfdt) avaient réagi en commun fin avril pour dénoncer le caractère irréalisable de ces tests. » Le temps est très compté et les élèves ont besoin d’être en cours », disaient-ils. « Tous les lycées ne disposeront pas, d’autre part, de locaux dédiés en nombre suffisant et des surfaces requises pour réduire au maximum la durée hebdomadaire de ces autotests. Enfin, malgré leur engagement, les personnels de direction ne trouveront pas tous parmi leurs personnels, des volontaires en nombre suffisant pour être formé à l’encadrement de ces autotests hebdomadaires. Rappelons que dans la très grande majorité des lycées, une seule infirmière est en poste pour plus de 1000 élèves », écrivaient les trois syndicats. Ils calculaient que pour un lycée de 1000 élèves à raison de 2 séquences de 30 minutes par classe ce sont 58 heures spécifiques qu’il faut programmer sur une semaine : « exercice irréalisable ».
Pour la vaccination il faudra l’intervention d’un personnel médical pour chaque élève avant la vaccination et bien sur pendant. La préparation administrative sera au moins aussi lourde que pour les tests. On peut donc penser que la campagne de vaccination nécessitera beaucoup plus de temps. A moins que, comme celle des auto tests, elle s’arrête très rapidement et qu’elle échoue faute d’enthousiasme local…
Dès maintenant le Snpden Unsa a fait savoir, sur Twitter, que « si nous pouvons mettre à disposition des locaux et éventuellement gérer les autorisations, il n’est pas question que ce soit des personnels des établissements qui soient chargés de faire les vaccinations ». Le terrain pourrait être encore plus restrictif…
Faudra t-il vacciner les enseignants ?
Si le président de la République n’a pas évoqué la vaccination des enseignants, cette question revient au premier plan. Avec le variant delta, encore plus contagieux que le variant anglais, aussi transmissible aux jeunes qu’aux adultes, la vaccination des enseignants peut sembler nécessaire pour protéger les professeurs mais aussi les élèves.
La question est posée depuis novembre 2020. En décembre 2020 le gouvernement avait refusé de mettre les enseignants dans les prioritaires. En avril 2021 ce n’était toujours pas le cas alors que la très grande majorité des pays développés l’avaient fait. Selon l’OCDE, en mars 2021, dans 19 pays sur 30 les enseignants étaient prioritaires pour la vaccination. C’était le cas notamment de l’Autriche, l’Allemagne, le Chili, la Colombie, l’Irlande, Israël, la Russie, le Portugal, la Pologne, l’Espagne etc. En Allemagne, par exemple, les professeurs du 1er degré étaient au niveau 2 de priorité c’est à dire qu’ils étaient aussi prioritaires que les 70-80 ans. Et plusieurs pays où ils n’étaient pas prioritaires étaient des pays où la question de la priorité ne se posait plus comme le Japon, l’Angleterre ou les Etats-Unis.
Début avril 2021 annonçait préparer un ordre précis de priorité des enseignants. Mais c’est seulement le 20 mai qu’ils entraient dans des catégories prioritaires, à un moment où la vaccination est déjà possible pour les adultes et à la veille de la levée officiel des réglementations.
Le 8 juillet, JM Blanquer dit que 75% des enseignants sont déjà vaccinés, un nombre dont on ignore d’où il sort. Le 13 juillet, interpellé par le député LR Patrick Hetzel, JM Blanquer dit que « dès que cela a été possible, et en restant cohérents avec la politique de vaccination consistant à privilégier les plus vulnérables, nous avons ouvert des couloirs prioritaires, notamment pour les professeurs de plus de 55 ans. Contrairement à ce que vous venez de dire, il y a eu, notamment au mois de juin, des campagnes visant tant les élèves que les professeurs pour les inciter à se faire vacciner ». Mais en même temps, le ministre continue, comme en avril, à minimiser la nécessité pour les enseignants d’être vaccinés. » Qui plus est, selon les études de Santé publique France, les professeurs sont une catégorie moins contaminée que la moyenne de la population », dit le ministre. Or cette étude a été réalisée avec le premier virus du Covid avant même l’arrivée du variant anglais qui avait déjà changé la donne.
Dans ce domaine, comme dans tant d’autres en ce qui concerne la pandémie, il apparait que le ministre n’a rien anticipé. Il lui reste quelques semaines pour organiser une vaccination des élèves. Et pour avoir une réponse claire sur la vaccination des enseignants.
François Jarraud
Autotests : le spersonnels de direction freinent