Peut-on étudier la colonisation et la décolonisation en lycée professionnel, là où un grand nombre d’élèves viennent d’anciennes colonies ? Pour Germain Filoche, professeur au lycée professionnel Costes de Bobigny, la réponse est positive. Pour lui, « les séries rendent vivante la mémoire » et « c’est une démarche citoyenne que d’apprendre aux élèves à décoder les démarches des auteurs des séries ».
Un nécessaire apprentissage critique
Le dernier numéro de la revue académique Echelles (n°36) est consacré au film documentaire en classe. Deux articles présentent des démarches en classe sur la colonisation. Nous avons choisi celle de Germain Filoche qui fait appel à la série documentaire Décolonisations diffusée sur Arte. Il s’appuie sur des extraits des trois épisodes en classe.
« Les élèves sont confrontés à des documentaires tout le temps », nous dit G Filoche. « C’est une démarche citoyenne que d’apprendre aux élèves à décoder les démarches des auteurs des séries ». Pour lui, les séries « rendent vivants la mémoire, les acteurs et les enjeux de la décolonisation. Enfin elles partent d’un point de vue qui doit être décrypté par les élèves.
Mais comment s’y prend on pour faire ce travail critique sur les documentaires ? « On apprend aux élèves à repérer l’équipe de production et à voir qui ils sont », commence G Filoche. « On leur apprend à repérer les effets scéniques par exemple la musique ou la voix off, l’utilisation de dessins ou de reconstitutions ». Pour cela il propose un questionnaire sur ce que les élèves ont perçu. « Les élèves sont friands de ces expériences », assure G Filoche.
Construire du commun sur la colonisation
Comment institutionnaliser ce travail critique sur le documentaire ? « Les élèves gardent une trace de ce qu’ils ont vu », répond G Filoche. « On peut les faire travailler sur des personnages ou des événements. Comme PLP je peux lier ce travail avec le français et leur demander d’écrire à un des personnages pour comprendre l’héritage de la décolonisation ».
Est-ce facile de travailler sur la décolonisation dans des classes où de nombreux élèves viennent de pays colonisés ? « C’est passionnant », assure G Filoche. « Mais ça demande au professeur de ne pas avoir de tabou avec les élèves sur ce qui a pu se passer. IL faut en même temps affronter la réalité et arriver à construire une histoire commune ». Pour lui, « il est préférable que ce soit un professeur d’histoire qui apprenne ces histoires que des gens mal intentionnés. C’est la République qui enseigne et cela permet de dépasser l’effroi ».
Pour G Filoche, « le fait d’expliquer comment les choses se sont passées et de travailler sur la colonisation permet de dépasser les identités pour que tous se sentent concernés. On arrive à prendre de la distance. Les élèves voient qte tout un travail a été fait ».
Propos recueillis par F Jarraud