L’Assemblée nationale a adopté le 1er juillet l’article 21 de la loi séparatisme rendant la scolarisation obligatoire sauf dérogation. Cet article pourrait être soumis au Conseil constitutionnel et si nécessaire à la Cour européenne des droits de l’Homme tant ses fondements semblent fragiles.
La majorité en peine de justifier la loi
Il a fallu plusieurs heures de débat les 30 juin et 1er juillet pour supprimer la liberté de l’instruction et imposer la scolarisation obligatoire dès 3 ans. » L’article 21 me paraît essentiel dans la mesure où il vise en premier lieu à garantir la protection des droits de l’enfant, tout en prenant en compte ses besoins particuliers. Il garantit le droit à l’instruction pour chaque enfant de France », a déclaré la rapporteure Anne Brugnera.
JM Blanquer ne semblait pas très sur de la légalité de cette mesure. « La base de ce que nous faisons, c’est non seulement la défense de la République – c’est le sens même de ce projet de loi – mais c’est, rappelons-le parce que cela semble nécessaire, la défense des droits de l’enfant », disait-il. « Nous avons atteint une position d’équilibre, rassurante et solide constitutionnellement, comme l’a rappelé la rapporteure. Nous verrons bien, et ce sera intéressant, comment se précise le cadre de la liberté d’enseignement, à laquelle, en effet, nous sommes tous attachés. Cette position prépare aussi l’avenir, car il ne s’agit pas seulement, avec cette démarche, de lutter contre le séparatisme – ne faisons pas semblant de ne pas voir qu’une partie de l’instruction en famille sert à l’islamisme fondamentaliste et, du reste, à toutes sortes d’autres dérives sectaires –, mais aussi de rappeler que l’école est importante pour tous les enfants de France : c’est, et je l’assume pleinement, le corollaire d’une affirmation de l’importance de l’école ». L’opposition a relevé que la loi était proposée sans que le lien entre IEF et séparatisme soit établi et sans qu’il y ait des données objectives sur l’instruction en famille.
Une opposition large
De nombreux amendements, certains venus de la majorité,avaient été déposés, en vain, contre cet article. » J’ai cosigné sans hésiter cet amendement de suppression de Valérie Beauvais, l’article 21 inquiétant à juste titre de nombreuses familles. Le but de ce projet de loi est de lutter contre l’endoctrinement et le séparatisme. Or, avec cet article, il en va de la liberté des parents de choisir la meilleure façon d’instruire leurs enfants. Sous prétexte d’éviter des dérives, on limite drastiquement le choix des familles. Par ailleurs, la scolarité obligatoire à trois ans voulue par la majorité exacerbe le problème », déclare FReiss. « Les dispositifs de contrôle existants permettent déjà de repérer d’éventuelles dérives sectaires ».
Pour Alexis Corbière, » l’ultra-majorité des familles sont stupéfaites de se retrouver au cœur de cette discussion, et je dois dire qu’elles ont pour elles l’argument que vous ne nous avez fourni aucun élément chiffré pour juger de la réalité de l’IEF. L’évolution, bien réelle, que nous constatons aujourd’hui est-elle due au fait que de plus en plus de familles font le choix de l’IEF pour des raisons de radicalité religieuse ? J’ai le sentiment, pour avoir rencontré beaucoup de familles, que leurs raisons n’ont rien à voir avec cela, et que ceux qui font le choix regrettable du fondamentalisme religieux empruntent d’autres chemins. Si certains défendent un projet pédagogique stimulant, c’est, avant tout, à cause de la perte de confiance dans l’école publique. Et je dois avouer que, quand on écoute les arguments des parents, ceux-ci ont une sacrée pertinence ».
» Il restera heureusement le rempart du Conseil constitutionnel pour préserver les principes républicains, dont la liberté d’enseignement, qui étayent la construction de notre société depuis les Lumières », déclarent les associations de parents pratiquant l’instruction en famille.
F Jarraud