Examiné le 18 janvier en commission le projet de loi « Respect des principes de la République » (ex loi séparatisme) a mobilisé pas moins de 5 ministres dont JM BLanquer. C’est que le projet est combattu par des oppositions qui soit font de la surenchère, comme les Républicains, soit s’inquiètent des libertés. Sur certains point, notamment sur les questions éducatives, le gouvernement promet quelques aménagements. Mais dès le premier jour la droite réussit à faire passer des amendements identitaires.
Blanquer appelle la Turquie au secours
« L’Ecole c’est bon pour les enfants ». Jusque là, JM Blanquer s’était servi de cette formule pour maintenir les écoles ouvertes en plaine pandémie. Le 18 janvier, le ministre de l’Education nationale l’a utilisé pour justifier le régime d’autorisation imposé à l’instruction en famille. « La laïcité existe dans d’autres pays par exemple la Turquie jusqu’à il y a peu… On doit avoir une vision offensive, fière de la laïcité ». La faible qualité de l’argumentation montre à quel point le projet de loi séparatisme est fragile. Présenté en commission le 18 janvier, le texte a été très critique par l’opposition. JM Blanquer a défendu ses aspects éducatifs.
Pour le ministre, les articles sur l’éducation sont des jalons « dans un processus qui a commencé il y a des années » : il cite la loi Gatel sur les ouvertures d’écoles privées. Alors que le projet de loi restreint l’instruction en famille et controle l’enseignement privé, JM Blanquer élabore une théorie positive. « La liberté d’enseigner ne doit pas rester trop indéfinie. Le fait de la définir mieux contribue à la renforcer ». Sur l’instruction en famille il annonce que la date de mise en oeuvre de la loi pourrait évoluer et le projet pédagogique pris en compte dans les exceptions à l’interdiction de l’instruction en famille.
Instruction en famille : quelles ouvertures ?
Une ouverture qu’il cadenasse rapidement. « A trop édulcorer le texte de loi il pourrait manquer sa cible », dit JM Blanquer. « Il est normal de considérer que l’éducation n’est pas une question ordinaire pour laquelle il y aurait une anarchie ».
Anne Brugnera, rapporteure du projet de loi sur les articles éducatifs (art 21 à 25) reprend l’idée de JM BLanquer. C’est en encadrant l’instruction en famille qu’on garantit qu’elle s’exerce dans le respect de l’intérêt de l’enfant. Elle annonce plusieurs amendements notamment l’extension à plus d’un an des autorisations dans certains cas.
Un projet propice à la surenchère
Les groupes politiques se sont positionnés par rapport au texte. Les Républicains annoncent, par la voix d’A Genevard, leur volonté de mettre le voile au programme. Ils ont déposé plusieurs amendements en ce sens interdisant les voiles des accompagnatrices scolaires, dans les universités voire même dans la rue.
Isabelle Florennes (MOdem) veut obliger l’administration à porter plainte quand un fonctionnaire est ménacé et demandes des précisions sur l’article 18 (qui touche à la liberté d’expression). JC Lagarde (UDI) défend l’instruction en famille et souligne le risque d’inconstitutionnalité qui pèse sur la loi. Charles de Courson (Liberté et territoires) dénonce le fait que le projet de loi touche aux lois de 1881 (presse), 1905, à laloi sur les associations, les cultes, à la liberté de l’enseignement.Surtout il estime que la loi « manque sa cible »: « elle va rendre plus compliquée la vie des parents, des associations et des croyants, tous bon républicains », sans toucher l’islamisme radical. Pour lui les articles sur l’instruction en famille et le controle d’internet sont attentatoire aux libertés. Il souligne l’absence d’articles sr la mixité sociale, l’intégration dans l’emploi, l’éducation à la laïcité.
La République laïque mais pas sociale ?
« La République est affaiblie par 9 millions de pauvres », rappelle A Corbière (LFI). Il rappelle qu’il n’y a pas de constat partage derrière cette loi. Ni le Medef , ni les syndicats ne témoignent d’une montée de l’islamisme radical en entreprise. Il demande que , quitte à défendre la laïcité, la loi supprime le régime concordataire dans l’est et le financement de l’enseignement privé catholique.
C Untermeier (PS) souligne les atteintes aux libertés. « Le texte touche à toutes nos libertés fondamentales alors que l’étude d’impact est très sommaire », dit-elle. « Respecter les principes républicains c’est faire vibre une république démocratique et sociale qui lutte contre les discriminations et organise la mixité sociale à l’école », deux points qui ne sont pas du tout dans le texte de loi.
Deux amendements LR adoptés
Au soir de la première journée d’examen du projet de loi peu d’amendements ont été retenus. La droite a marqué deux points importants. Un amendement (n°20) d’A Genevard (LR) a été retenu. Il ajoute au titre premier le respect « des exigences minimales de la vie en commun dans une société démocratique ». La formule est suffisamment floue pour pouvoir servir de façon large. « ’utilisation de ces termes permet de couvrir davantage de domaines de notre droit. En effet, il serait à craindre que les mots « Principes de la République » ait un contenu normatif trop vague. Limiter le champ d’application du titre I au respect des principes, des lois, est donc trop restrictif. La référence aux « exigences minimales de la vie en société » trouve un ancrage dans la décision du 7 octobre 2010 du Conseil constitutionnel sur la prohibition du voile intégral dans l’espace public (voir référence ci-dessous) et semble donc appropriée en l’espèce », précise le texte de l’amendement. La droite envisage sans doute utiliser cette formule floue pour pousser plus loin les arguments identitaires. Un amendement de X Breton (LR) (n°292) a été aussi adopté. Il interdit aux salariés des entreprises privées exerçant une mission d’ordre publique d’exprimer une opinion politique.
Le projet de loi sur les principes de la République offre une belle tribune à la surenchère populiste à droite. Cela se voit dès le premier jour.