30 octobre – L’organisation de la rentrée du 2 novembre négociée le 27 octobre avec les syndicats vient de voler en éclat. Sans expliquer sa décision, le ministre envoie de nouvelles instructions dans un message envoyé aux enseignants. L’hommage à S Paty est maintenu mais le temps pédagogique en classe n’aura pas forcément lieu avant la cérémonie. La présence d’élus n’est plus mentionnée. Il ne reste plus qu’une minute de silence sans préparation des élèves.
Rentrée maintenue le 2 novembre
« Conformément aux annonces du président de la République, tous les élèves seront accueillis dans les écoles, les collèges et les lycées. L’École est essentielle à leur réussite, à leur avenir et à leur épanouissement », écrit JM Blanquer dans la lettre adressée aux enseignants le 30 octobre.
Après avoir évoqué « un protocole sanitaire renforcé, que nous avions conçu dès le mois de juillet en anticipation d’une éventuelle dégradation de la situation sanitaire », une double affirmation qui semble un peu éloignée de la réalité comme nous l’expliquons ici, JM Blanquer arrive à l’hommage à Samuel Paty, cet enseignant assassiné à Conflans Sainte Honorine.
La matinée réorganisée
« Le lundi 2 novembre, dans toutes les écoles, tous les collèges et lycées de France, un hommage lui sera rendu… En pratique, tous les élèves reprendront les cours comme à l’habitude. Une minute de silence sera observée lundi à 11h, après la lecture de la lettre de Jean Jaurès aux instituteurs, dans des conditions respectueuses du protocole sanitaire applicable. Ce temps de recueillement se tiendra de préférence dans les salles de classe, et si les conditions sanitaires le permettent, dans la cour de l’établissement. Ce temps pourra être précédé, d’un temps pédagogique, en classe, adapté bien sûr à l’âge des élèves, autour des valeurs de la République et de son École… La minute de silence de lundi doit être respectée. Tout problème en la matière est à signaler à la cellule « Valeurs de la République » du rectorat ».
Cette nouvelle organisation revient très largement sur ce qui avait été construit avec les syndicats lors de deux réunions les 22 et 27 octobre et dont nous avions rendu compte ici.
Un cérémonial inaccessible à beaucoup
La lettre envoyée dans toutes les écoles et établissements impose la minute de silence partout, ce qui veut dire également là où les enfants sont très petits comme en maternelle. Il faut espérer qu’à ces niveaux elle ne soit pas respectée. On peut s’étonner aussi d’imposer la lecture d’un texte qui n’est pas compréhensible par les écoliers et beaucoup de collégiens. Quel sens pour cette lecture en GS, en CP ou en 6ème ?
La lettre s’attache à la forme de la cérémonie plutôt qu’au fond du travail à faire avec les élèves. La décision du ministre supprime le moment d’échange entre professeurs qui devait avoir lieu jusqu’à 10 heures alors que certaines collectivités locales se sont organisées pour permettre ce décalage de la rentrée. C’est pourtant ce moment d’échange qui permet de faire corps et de pouvoir tenir un discours commun sur des valeurs qui sont souvent adaptées différemment par les enseignants comme nous le montrons ici.
Surtout on peut s’interroger sur la pertinence de mettre une cérémonie aussi formelle avant la phase de rassurance, d’explication et de mise en perspective. Il nous semble important que les enseignants puissent échanger avec leur classe avant le moment collectif.
Du politique plus que de l’éducatif
Il est tout autant regrettable que les réactions éventuelles d’élèves ne soient vues que sous l’angle du signalement. C’est là aussi évacuer la force de la pédagogie.
Il semble que ces changements fassent suite à la réunion d’un conseil de défense ce matin. On comprend la volonté de ne pas laisser des élèves à la porte des établissements le lundi matin. Mais il y a la façon de faire. Il semble bien que le politique l’emporte là aussi sur l’éducatif. Tout changer ainsi sans même rappeler ce qui avait été prévu jusque là, tous les propos sur la recherche de consensus avec les syndicats, faire comme si tout avait été parfaitement anticipé, c’est vraiment ne pas considérer le destinataire du courrier. Préférer le formalisme et l’obéissance des élèves au travail avec eux n’est ce pas là aussi manquer aux valeurs démocratiques ?
François Jarraud