Saisi par le premier ministre d’une mission sur la lutte contre le harcèlement scolaire, le député (Modem) Erwan Balanant a rendu le 14 octobre un rapport avec pas moins de 120 propositions. L’avantage d’avoir 120 propositions c’est qu’on a 120 chances de faire plaisir à tel ou tel lobby. L’inconvénient c’est que ça ne fait pas une politique et que l’application du rapport est impossible, notamment en raison de son coût. Sa publication montre à quel point la question n’est plus réellement traitée par le ministère.
Dans ce rapport, le député est à la fois partisan d’une réponse policière et judiciaire au harcèlement scolaire, invitant à créer un délit et à faire intervenir la police en cas de harcèlement, et partisan d’une réponse pédagogique, vantant différentes méthodes et différents groupes. Il est aussi extrêmement méfiant envers les enseignants suspectés à priori de harceler les élèves ou de complicité avec les harceleurs, demandant là aussi un traitement judiciaire contre eux.
Tout cela ne fait pas une politique. Cela fait par contre un travail d’amateur. Mais ça participe à la déconstruction d’une politique exemplaire dans l’Education nationale. Car c’est un sujet sur lequel le consensus avait fini par se construire à la suite de la nomination d’Eric Debarbieux par L Chatel puis par V Peillon à la tête d’une délégation ministérielle en charge de la lutte contre la violence scolaire. Depuis 2010 beaucoup a été fait contre le harcèlement et la violence scolaire grâce à une approche systémique reposant sur les travaux scientifiques internationaux. Depuis l’arrivée de JM BLanquer la délégation ministérielle est tombée dans l’oubli et n’est plus dans les mains des spécialistes de la question. Un décret d’avril 2020 a autorisé le ministère à armer ses équipes de sécurité ce qui ressemble à la fin d’une politique. La publication de ce rapport et l’abandon de cette question par le ministère montrent que là aussi le travail de sape de l’Ecole est en marche.
La qualité du rapport s’apprécie aussi dans la liste des personnalités consultées par E Balanant. Le député a reçu une longue liste d’associations de parents, les syndicats Unsa et Faen uniquement, Google, Tik-Tok, des pédopsychiatres et l’institut Montaigne représenté d’ailleurs par Raphaël Muller, ancien directeur adjoint du cabinet de JM Blanquer et actuellement recteur d’Amiens. Il n’a pas jugé utile de rencontrer aucun des spécialistes de la question.