Dans un nouveau volume de Pisa 2018, l’OCDE définit ce que sont pour elle les bonnes politiques éducatives à mener pour rendre les systèmes éducatifs plus performants et aussi plus justes. Parmi les enseignements des points concernent directement la France. Les redoublements, la sélection précoce, une forte part d’enseignement privé, un enseignement professionnel destiné aux défavorisés, les classes de niveau : voilà autant de points sur lesquels on pourrait progresser. Pas les salaires des professeurs, selon l’OCDE…
Orientation, redoublement et taille des classes
Corrélation vaut-elle raison ? Pas sur. Et c’est le point faible des analyses de l’OCDE qui reposent sur le lien entre une hypothèse et les niveaux de compétences scolaires atteints dans un pays. D’ailleurs l’OCDE en convient elle-même critiquant volontiers certains raccourcis faciles. Il n’empêche, PISA offre un appareil statistique unique qui mérite d’être exploité.
Parmi les facteurs jouant sur la réussite scolaire et la diminution des écarts entre élèves favorisés et défavorisés, l’OCDE pointe en premier la participation à l’école maternelle, un point où la France est bien placée, même si on compote trois fois plus d’enfants qui ne l’ont pas fréquenté chez les enfants défavorisés.
En second lieu, la réduction des redoublements. La question fait encore débat chez les spécialistes mais la majorité penche dans le même sens que l’OCDE : le redoublement est injuste socialement (à niveau scolaire égal il touche davantage les défavorisés) et a des conséquences scolaires néfastes. Sur ce terrain, la France , même si elle a fait des efforts, compte encore trop de redoublants par rapport aux autres pays de l’OCDE. On sait que JM Blanquer a incité à faire redoubler les élèves dès son arrivée rue de Grenelle.
La sélection précoce augmente les inégalités et réduit la réussite scolaire estime l’OCDE. En France elle ne s’opère qu’à 15 ans. Mais l’OCDE souligne le fort écart de niveau entre l’enseignement professionnel et général (70 points en lecture). Or 22% des élèves des écoles défavorisées sont envoyées dans le professionnel contre 2% dans les écoles favorisées.
Pour faire réussir les élèves il vaut mieux ne pas en avoir trop : l’OCDE peut montrer qu’il y a bien une rapport entre la taille des classes et le niveau. Cela même si des pays arrivent à la fois à avoir des classes chargées et de bons résultats (Singapour, Taiwan, le Japon par exemple).
Salle de travail et heures de cours
Un point nouveau est introduit dans ce Pisa 2018 : il évalue l’effet, positif, d’avoir une salle de travail pour faire ses devoirs. Evidemment on pense à Devoirs faits, le dispositif mis en place dans le 2d degré par JM Blanquer. En même temps ce n’est pas une panacée :en France ou au Luxembourg 90% des élèves ont accès à une salle de travail et les inégalités sont fortes et le niveau moyen.
Pour réussir il faut aussi des heures de cours. Selon l’OCDE en dessous de 20 heures hebdomadaires le niveau est faible. Mais au dessus de 39 également ! Il faut donc s’en tenir entre les deux. L’OCDE ne parle pas de leur répartition dans la semaine. La façon de répartir les élèves dans l’établissement joue également : les classes de niveau ont des effets négatifs alors qu’une répartition par compétences dans certaines matières est validée par l’OCDE.
Evaluations et privé
Et puis il y a la question de l’évaluation. L’OCDE est pour des évaluations externes du niveau des élèves. Et surtout favorable au feedback des élèves. Or la pratique ne concerne que 18% des établissements français contre 68% dans l’OCDE. Pour autant l’OCDE note que la publication des évaluations a des effets positifs au niveau d’un établissement mais négatifs pour un système éducatif. C’est pourtant vers là que l’on se dirige en FRance pour le collège et les écoles (après le lycée).
Dernier point systémique : la part du privé. Selon l’OCDE, en apparence les résultats du privé sont meilleurs. Mais cela dépend du niveau social des élèves. A niveau social comparable, les résultats du privé sont moins bons que ceux du public. Or la France a davantage d’élèves scolarisés dans le privé que la moyenne OCDE.
Numérique et salaire des profs
Reste le matériel. A première vue avoir du matériel numérique et un accès internet améliore nettement les résultats scolaires. Mais l’OCDE note que les établissements bien dotés sont aussi ceux qui ont des élèves favorisés. Globalement les systèmes éducatifs où les écoles défavorisées ont les mêmes dotations en matériel éducatif(pas seulement informatique) que les favorisées ont de meilleurs résultats.
Deux points distinguent la France en ce domaine. Le premier c’est le sous équipement en ordinateurs portables qui s’avèrent fort utiles en temps de confinement. Autre retard, plus important, seulement 40% des élèves ont accès à une plateforme de formation en ligne. C’est nettement moins que la moyenne de l’OCDE. ET dans le contexte sanitaire actuel ça compte.
Et les profs ? L’OCDE distingue un effet maitre : un établissement qui a des enseignants certifiés a de meilleurs résultats qu’un établissement employant des contractuels. Avoir des services complets aurait aussi un effet. L’OCDE est moins certaine pour els salaires. Dans les pays pauvres relever le salaire enseignant a un effet sur les résultats. Mais dans les pays développés ce n’est pas démontré. Et même pour l’OCDE des alaires vraiment élevés ne s’accompagnent pas de résultats meilleurs. Mais à vrai dire il y a peu de cas : le Luxembourg par exemple.
François Jarraud
PISA 2018 Results, Effective Policies, successful schools, Volume V, 2020