Alors que les dépenses de l’Etat explosent à nouveau en 2021, l’Education nationale ne sera pas plus à la fête qu’en 2020. Elle le sera même moins. Si 2000 emplois seront créés dans le 1er degré, autant seront supprimés dans le second. Le bilan est même négatif. 400 millions sont prévus pour la revalorisation des personnels mais dans des conditions qui restent à préciser.
Rigueur à l’Education nationale dans un Etat qui se lâche
Le gouvernement a présenté le 28 septembre le projet de loi de finances 2021, notamment la partie enseignement scolaire. Alors que le déficit de l’Etat s’envole pour la seconde année, l’Education nationale n’en a que les miettes.
Donnons quelques chiffres pour cadrer ceux de l’Education nationale. En 2020, le déficit budgétaire a plus que doublé et s’établit à 195 milliards. En 2021 il sera de 153 milliards, malgré un rebond du PIB (et donc des recettes fiscales) espéré à hauteur de 8% (après une chute de 10% en 2020). Les dépenses de l’Etat vont se maintenir à hauteur de 450 milliards en 2021.
Où va cette manne ? Pour une grosse partie en allègements fiscaux pour les entreprises, dans un plan de relance qui subventionne les emplois et par un relèvement des dépenses des ministères évalué à 10 milliards.
Mais l’Education nationale n’est pas dans les ministères gagnants. Cela se voit dans les créations de postes qui désignent clairement l’ordre des priorités du gouvernement. L’Intérieur en gagne 1369, la Justice 1500, l’armée 286, l’enseignement supérieur 700, la santé 76. Le ministère de l’économie et des finances supprime 2163 emplois, l’écologie 947, le travail 496, l’agriculture 375 et l’enseignement scolaire 120 (soit deux fois plus qu’en 2020). Au total l’Etat perd 157 emplois.
Avec 53.3 milliards en 2021, l’enseignement scolaire voit son budget augmenter de 1.4 milliard soit +3%. La masse salariale n’augmentera que de 2%.
Encore 2000 postes supprimés dans le second degré
Le ministère continue la même gestion des emplois depuis 2018. Il en supprime dans le second degré et en ouvre autant dans le premier.
2039 emplois seront créés dans le premier degré en 2021, 1800 seront supprimés dans le 2d degré et 239 dans le privé. Selon le ministère, ces suppressions sont compensées par une hausse des heures supplémentaires années correspondant à 3000 emplois. Il y aurait donc « création » de 1000 emplois dans le second degré.
Cette présentation n’est pas correcte. Cela supposerait que les heures supplémentaires proposées soient consommées. Le ministère se refuse à donner des indications sur le volume consommé. Mais l’exemple des années précédentes montre que le volume offert n’est pas attribué.
Et autant d’ouverts dans le premier degré
Dans le 1er degré, le ministère entend continuer à plafonner les classes à 24 élèves en GS, Cp et Ce1. Il promet d’atteindre cet objectif d’ici la fin du quinquennat. Les dédoublements des classes de GS en éducation prioritaire continuent. Le maintien des écoles rurales également. Un volume de postes devrait aller aux nouvelles décharges des directeurs (mais celles ci ne sont pas fixées).
100 millions donnés aux maternelles de l’enseignement privé
Le ministère annonce un plan numérique pour le 1er degré à hauteur de 91 millions. Il s’inspirera peut-être des « territoires numériques éducatifs » présentés en septembre 2020. 63 millions seront versés par l’Education nationale pour le périscolaire. Les crédits pour les bibliothèques scolaires isolées augmenteront de 2 millions.
Le ministère avance pour la première fois une estimation du cout de l’intégration des maternelles privées suite à la loi Blanquer. Le secrétariat général de l’enseignement catholique avançait le chiffre de 50 millions. Ce sont en fait 100 millions qui seront versés aux communes en indemnisation de leurs dépenses de prise en charge des maternelles privées.
Dans le second degré on attend près de 30 000 élèves supplémentaires, principalement au collège. IL y aura pourtant 2039 postes supprimés dans le privé et le public. Le minsitère prévoit un volume d’heures supplémentaires suffisant pour compenser ces postes et en créer 1000, sous réserve que les heures soient prises. Il y aura donc encore des classes surchargées au lycée et en collège et de fortes tensions sur les postes. 91 millions, prélevés sur le plan de relance, sont prévus pour créer 5000 places en BTS et autant en CAP en 3 ans.
400 millions pour une revalorisation sélective
400 millions sont prévus pour la revalorisation des personnels. Le ministère parle d’une première marche d’un plan pluriannuel. Il met comme première cible l’attractivité des débuts de carrière. Mais la revalorisation sera liée aussi à des contreparties : » une plus grande coopération pour développer l’esprit d’équipe et des collectifs dédiés au suivi individualisé de l’élève ; l’ouverture du champ des possibles pour transformer les pratiques, via le numérique notamment, et les formes de mobilités professionnelles, entrantes et sortantes en particulier ». Une partie de la revalorisation pourrait être liée à l’acceptation de nouvelles missions d’orientation, de travail numérique par exemple. Le « Grenelle des professeurs » devrait se terminer en janvier avec des décisions.
D’autres mesures concernent les enseignants. La 3ème tranche de revalorisation de l’indemnité Rep+ coutera 49 millions. L’application des accords PPCR 26 millions. Les 3000 étudiants supplémentaires en pré formation enseignante couteront 82 millions. Enfin les stages en alternance des étudiants en masters MEEF seront crédités de 19 millions.
120 cités éducatives
Les crédits pour l’éducation prioritaire ne sont plus présentés qu’à travers Devoirs faits (budget maintenu), les internats d’excellence (51 millions supplémentaires financés sur le plan de relance) et les Cités éducatives qui devraient passer de 80 à 120. Mais là le pilotage est partagé avec le ministère de la Ville.
Les opérateurs de l’éducation nationale vont à nouveau perdre des emplois. 5 emplois sont créés a France Education International. Mais une centaine (50 chaque environ) sont supprimés chez Canopé et Onisep.
Le budget laisse donc les tensions sur les postes s’exacerber dans le 2d degré. La revalorisation des enseignants ne devrait concerner que les premiers échelons. Pour les autres la réponse est bien connue : « travaillez plus ! »
François Jarraud