C’est parti, aujourd’hui a lieu notre première classe promenade ! On ne va pas se mentir, j’ai les pétoches. De quoi ? Qu’il ne se passe rien. Que mes élèves se demandent ce qu’ils peuvent bien faire là.
Nous partons de l’école un peu après 9h. J’ai fait mon speech la boule au ventre face à des enfants qui ne réagissaient pas trop : « Blabla ramenez quelque chose de votre promenade, une odeur, une image, une émotion… Blabla ».
Nous sommes partis les 24 ensemble. En rang, ça papotait de tout sauf de ce qu’il y avait autour d’eux. L. doit mener la marche où bon lui semble. Et il décide d’aller au stade, là où ils vont quand ils ont sport, là où nous irons en fin de journée. On est presque arrivé et je me demande un peu ce que je suis en train de faire. Personne ne m’a encore demandé de prendre de photos, n’a arrêté le groupe, n’a posé de question. Ils ne semblent pas comprendre, et moi non plus, ce que l’on fait là. Une première demande pour prendre une boîte aux lettres avec un rouleau dessous, mais qu’est-ce que c’est que cela ? Une élève répond du tac au tac « Bah, c’est pour mettre le journal », problème résolu, on passe à autre chose.
On est devant la maison de J., on s’arrête pour voir si on aperçoit son chien Plume, c’est bon, le voilà qui aboie. Un enfant me demande de prendre l’église en photo, sans trop savoir pourquoi. Je m’exécute, pareil pour le stade, puis le skate park. On continue notre boucle et je me demande bien si quelque chose va se passer.
Stressée, je leur rappelle la consigne et je leur dis d’arrêter de discuter puisqu’on est presque arrivé. Et là les demandes commencent à arriver. « Tu peux prendre cette fleur en photo ? Et le pommier. » « Oh on voit la lune alors qu’il fait jour ! Prends la en photo maîtresse. » « Et cet arbre, il est rigolo. » « Chouette un saule pleureur, tu le prends ? » « Bah qu’est-ce qu’ils creusent ici ? » Et moi naïve, ex-citadine, récemment arrivée en campagne « Vous savez ce que c’est ? » Eux tous « Bah oui, c’est une bétonneuse ». Ah, c’est évident pour tout le monde. « Oh maîtresse, il y a des gros champignons ici ! » « Et ici, un nid de guêpes. » Ok, on regarde de loin, la maîtresse n’a pas envie de gérer une piqûre… « Elle est belle, en fait, la forme du lampadaire devant l’école, tu peux prendre une photo ? ».
De retour en classe, on sort les cahiers d’explorateurs·trice·s, tout le monde se met vivement à dessiner, et essaie de remplir mon petit tableau (Observations/remarques ; Emotions/ressentis ; Questions que l’on se pose ; Personnes rencontrées). On se demande si on peut mettre les animaux dans les personnes rencontrées, et on décide que oui. Les questions, on s’en pose juste quelques-unes, vu qu’on a surtout papoté sur le trajet.
Mais tout de même : Pourquoi voit-on la lune le jour ? Quelle est l’espèce du champignon près de l’école ? Pourquoi y a-t-il des travaux avec un gros trou près de l’école ? Quatre élèves ont envie de chercher des réponses.
Les enfants sont tous super contents de revoir les photos et veulent aussi dessiner ce que je projette, du dessin d’observation commence. Du « bonheur » et du « calme », voilà le ressenti général lors de cette promenade. Je ne sais pas bien ce qui s’est passé, c’était sûrement très imparfait, mais quand je vois les carnets et leur sourire, je suis heureuse et j’ai bien envie de recommencer.
Marie Michaux, classe de CM2
Pour aller plus loin
1) Sortir
Une question :
Comment développer l’esprit de la classe-promenade dans tout ce qui contribue aux apprentissages : promenade dans les savoirs, dans les émotions, dans les relations… ?