Avec l’élimination d’une spécialité sur 3 en terminale, les lycéens sont obligés « d’abandonner une discipline scientifique choisie volontairement en classe de 1ère et à contenu fort », déplore la récente association SvtSup qui souhaite « mettre en place des liens réels de bac-3 à bac +3 ». Pour aider les choix des lycéens, l’association propose des ressources en ligne. Marianne Algrain-Pitavy, présidente de l’association SvtSup, qualifie les SVT comme « une science expérimentale qui construit des modèles avec des approches quantitatives de la même manière que la physique-chimie. Le raisonnement en biologie et en géologie permet une vision intégrative indispensable pour comprendre les enjeux complexes du monde actuel ».
Pourquoi avoir fondé association SvtSup ?
Notre association regroupe des enseignants de SVT des classes ATS Bio, BCPST et TB. Ayant constaté une faible visibilité voire une méconnaissance des lycéens pour nos classes et les opportunités qu’elles offraient pour les métiers de demain, nous avons souhaité mettre en place des liens réels Bac – 3 / Bac +3. Nous voulons être une source d’informations fiables pour les lycéens comme pour les collègues du secondaire sur les classes préparatoires « Biologie – Géologie ».
Que représente votre association en termes d’adhérents ? D’activités ?
Nous sommes une soixantaine d’adhérents, tous enseignants en classe préparatoire « Biologie – Géologie », c’est-à-dire ATS Bio, BCPST et TB. Nous entrons en contact avec des collègues de lycée, parfois des lycéens afin de leur montrer les avantages de suivre une classe préparatoire axée « Biologie – Géologie », dans une perspective d’études et de métiers. Nous leur montrons les multiples métiers possibles, après ces classes préparatoires. Cela passe par un décryptage des formations assurées par les écoles d’ingénieurs, des liens forts avec nos anciens étudiants et de la veille sur les métiers de demain.
En quoi la réforme du lycée est-elle « délicate pour les SVT » ?
La réforme du lycée met à mal les SVT, car les lycéens sont contraints aujourd’hui de faire un choix parmi les disciplines scientifiques, en particulier en classe de terminale. Abandonner une spécialité en classe de terminale (ce sont les termes ministériels) revient donc à abandonner une discipline scientifique choisie volontairement en classe de Première et à contenu fort. La spécialité SVT risque fortement d’en subir les frais. D’ailleurs, cela se traduit déjà par des réductions de postes d’enseignants de SVT (plusieurs centaines, même si les CAPD ont été bloquées du fait du CoVid-19 et que les concours de recrutement ne sont pas tout à fait opérationnels) dès la rentrée prochaine.
Nous aimerions montrer, aux lycéens et à leurs parents, que les SVT au lycée sont une passerelle vers de nombreux métiers. Le choix de la spécialité SVT en Première et en Terminale est donc pertinente pour de nombreux débouchés. Mais il est difficile de lutter contre l’idée reçue que les sciences fondamentales sont les mathématiques et les sciences physiques et que cela permet d’augmenter ses chances d’entrer dans une classe préparatoire scientifique. Ce discours est très ancré.
Les SVT font-elles parties aussi des sciences fondamentales ?
Complètement. Il s’agit d’une science expérimentale qui construit des modèles avec des approches quantitatives de la même manière que la physique-chimie et qui permet de comprendre la monde qui nous entoure. Les SVT sont au cœur des enjeux de société actuels : alimentation, épidémies, pollution, réchauffement climatique… Ces défis ne peuvent se comprendre qu’avec un vrai bagage de biologie et ou de géologie. (« Pour bien protéger, il faut bien connaître »).
L’avantage des classes préparatoires « Biologie – Géologie » est leur pluridisciplinarité scientifique (Mathématiques, Informatique, Physique, Chimie, Biologie et Géologie) avec un bagage minimal en littérature et langues. On ne réfléchit pas de la même façon dans ces disciplines et le raisonnement en biologie et en géologie permet une vision intégrative indispensable pour comprendre les enjeux complexes du monde actuel. Des connaissances fortes dans des disciplines telles les Mathématiques, l’Informatique, la Physique, la Chimie sont alors au service des problèmes biologiques ou géologiques que rencontrent les ingénieurs.
Quels liens avez-vous tissé avec les écoles supérieures ? Comment recueillez-vous vos témoignages ?
Nous tissons des liens par connaissance personnelle et par contact institutionnel. Nos anciens élèves sont aussi des sources précieuses d’informations sur les écoles et sur leurs métiers une fois entrés dans la vie active. Notre association est jeune (1 an) et nous commençons depuis peu à créer ces liens et les renforcer, car nous les croyons indispensables. Avec notre charge de travail d’enseignant, ces liens ne peuvent se mettre en place que progressivement. Nous espérons commencer à faire du concret durant l’année scolaire prochaine.
Dans votre espace de travail entre enseignants, vous demandez une certaine bienveillance. Pourquoi ?
En classe préparatoire, les lycées sont en compétition. Et parfois, cela se sent au niveau des enseignants. SvtSup se veut débarrassée des questions d’ego. Nos travaux sont collaboratifs et nous sommes très heureux d’avoir un espace stimulant où échanger, travailler, coopérer, discuter, rebondir, avancer pour les collègues d’ATS Bio, BCPST et TB.
Propos recueillis par Julien Cabioch