« Il va falloir dire aux enfants qu’ils ont bien travaillé ». Mathilde Souef enseigne dans un collège Rep à Caen. Sébastien Lambert travaille dans un collège rural à Marquise (62). Après un mois d’enseignement à distance et alors que s’annonce un nouveau mois avant la reprise, ils tentent un point sur ce qui a marché et ce qu’ils envisagent pour cette seconde période.
Ancrer l’enseignement à distance dans les pratiques déjà installées
« Ca fait trois ans qu’on réfléchit sur le travail personnel des élèves. On est dans cette continuité ». Au collège Guillaume de Normandie de Caen, Mathilde Souef et ses collègues inscrivent leur enseignement à distance dans la continuité du travail scolaire déjà installé et aussi dans la continuité de la relation avec les élèves. « On est un collège Rep. On a des liens particuliers avec les élèves », nous dit-elle.
Le collège a décidé dès le vendredi 13 mars de sa stratégie pendant la période de fermeture. « On a décidé de fractionner les tâches et de donner du travail tous les jours et non une fois par semaine. Et de limiter à 30 minutes de travail à la maison par discipline ». On a ainsi un maximum de 3 heures de travail par jour. C’est insuffisant pour faire le programme. Mais c’est beaucoup pour des élèves de Rep dont les conditions de travail sont souvent difficiles. La plupart des élèves n’ont que leur smartphone pour le travail scolaire.
« Je fais beaucoup de classes virtuelles », explique M. Souef. »Les élèves sont contents de se voir , de s’entendre. Ils regrettent la classe ». Le travail demandé repose sur des compétences acquises. Il est simple. « Les élèves ne doivent pas être bloqués par des questions de méthode ».
Et les enseignants restent très joignables. « Les deux premières semaines on a beaucoup appelé les parents des élèves qui ont perdu pied ». Un système d’envoi du travail par la poste est mis en place.
Malgré tout, M Souef constate un essoufflement au fil des 3ème et 4ème semaines de confinement. « Il va falloir imaginer des activités différentes et ludiques pour le retour des vacances », nous dit-elle. « Les appeler tous pour leur rappeler le retour au travail.
Le retour en classe est attendu. « On sera content de se revoir. ON fera attention. Il faudra organiser les classes autrement. Surtout il faudra réfléchir pour trouver comment les faire coopérer sans mettre en danger leur santé. » Il faudra aussi faire le bilan : »Ilva falloir dire aux enfants qu’ils ont bien travaillé. Et qu’ils le disent à leurs parents ».
Retrouver le sel du métier
« Je suis IAN et le numérique ne me fait pas peur. Dans ce contexte dramatique j’ai retrouvé le sel du métier » : l’artisanat pour continuer à enseigner à distance.
Sébastien Lambert a misé sur un outil peu connu:Tactileo. « C’est un outil qui permet de construire des parcours avec des exercices, des textes à trous et une trace écrite finale. Tactiléo leur envoie un feedback sur leur travail immédiatement », nous di -il. Autre avantage de Tactileo : comme à Caen, l’outil s’inscrit dans la continuité de ce qui se faisait déjà en classe. Chaque parcours représente environ 30 minutes de travail. Le parcours à faire est envoyé chaque lundi avec remise en fin de semaine.
Même si Tactileo est bien accepté par les élèves, S Lambert observe un essoufflement en 3ème et 4ème semaine de confinement. Des élèves ont été perdus de vue. La perspective des dernières semaines est difficile. « Je n’ai jamais cru totalement à l’enseignement à distance. Cette période nous rappelle l’importance de la relation enseignant – élève ».
Propos recueillis par François Jarraud