Une nouvelle étude de l’University College London (UCL) réévalue à la baisse l’impact sanitaire de la fermeture des écoles. Surtout elle estime que le gain sanitaire est inférieur au coût économique de la fermeture. Même si cette étude n’est pas suivie par le gouvernement britannique, elle inaugure un discours qui devrait influer sur les décideurs tant le coût économique de la fermeture est élevé.
Un faible impact sur ce type de virus
De nombreuses études ont déjà évalué l’impact sanitaire de la fermeture des écoles ainsi que leurs conséquences économiques. L’étude de l’UCL, dirigée par Russell M Viner, président du Royal College of Paediatrics et publiée dans The Lancet, rappelle ces travaux réalisés pour le gouvernement britannique jusqu’en 2020. Toutes concluent à un effet de la fermeture des écoles sur l’épidémie quand elle est décidée au début de l’épidémie. Elle diminue le pic de l’épidémie et donne en moyenne 11 jours de délai supplémentaire. Ainsi elle a un impact sur la mortalité finale.
La nouvelle étude se base sur l’analyse de près de 600 articles recensés dans plusieurs bases de données médicales. Elle s’appuie surtout sur 16 études sur l’épidémie de SARS en 2003 en Asie. En Chine, à Hong Kong ou Singapour, l’impact de la fermeture a été faible. Pour les auteurs cela tient à la caractéristique du SARS que l’on retrouve dans le Covid-19 : forte transmissibilité et faible transmission aux enfants.
Des effets négatifs sur les enfants et l’économie
Les auteurs montrent par contre que la fermeture a des effets négatifs sur le senfants , leur éducation et leur santé mentale. En Angleterre elle affecte aussi leur alimentation puisque les enfants pauvres sont nourris à l’école. Ils montrent aussi que les enfants en vacances entretiennent de nombreux contacts sociaux, à peu près la moitié de leurs contacts habituels. Ils continuent à diffuser le virus. La fermeture affecte aussi les enfants à travers la réduction des revenus de la famille.
Surtout les auteurs insistent sur le cout économique de la fermeture des écoles. Celle-ci bloque à la maison une grande partie des salariés, par exemple 30% du personnel de santé. Les auteurs estiment que le cout économique pourrait être de 2 à 3% du PNB du pays pour une fermeture de 3 semaines. En France le coût économique de la fermeture des écoles et du confinement général est évalué par l’Insee à 6% du PNB par mois.
Quand faut-il rouvrir les écoles ?
Les auteurs demandent donc la réouverture des écoles dès que le pic de l’épidémie sera passé. Ils recommandent des mesures de distanciation sociale dans les écoles : réserver une salle par classe, fermer les cours de récréation par exemple.
En France, une étude de 2012 du Haut Conseil de la Santé Publique estime que la fermeture des écoles a un impact important à condition qu’elle soit décidée au bon moment, celui du passage à l’épidémie. Elle ne sous estime pas le coût de cette décision. La mesure n’est efficace que si les enfants restent à la maison. S’ils sont en vacances libres, ils continent à transmettre le virus. Il est donc important qu’ils aient du travail scolaire pour les occuper. A ces conditions, la fermeture des écoles diminue fortement la transmission du virus entre jeunes et surtout des jeunes vers les adultes.
La question commune à la Grande Bretagne et la France est celle de la réouverture. Les auteurs plaident pour une réouverture rapide. Ce que montre une autre étude britannique, celle réalisée en 2020 par l’Imperial College, c’est que la réouverture risque de générer une seconde vague épidémique si elle n’est pas accompagnée par des mesures médicales. L’Imperial College estime qu’une réouverture en juin se traduirait par une seconde vague en octobre.
C’est tout le dilemme qu’affrontent en ce moment les gouvernements. Ils doivent décider en tenant compte de l’urgence économique tout en suivant les recommandations médicales. En 2012, l’étude du HSCP disait que » l’allègement de ces mesures nécessiterait de s’assurer que l’immunité collective est suffisante, soit par acquisition naturelle (surveillance sérologique), soit en attendant que la couverture vaccinale des enfants ou de la population générale soit suffisante ». Or on est loin du vaccin et encore loin d’une généralisation des masques. Cette nouvelle étude britannique montre l’impatience de certains milieux qui voient l’économie de leur pays sombrer du fait de l’épidémie.
François Jarraud