Couac au milieu des discours louangeurs sur le service public. L’attribution du bac par contrôle continu aux élèves du privé hors contrat ne suffit pas au gouvernement. Un décret et un arrêté publiés au JO du 5 avril impose aux candidats au BTS une certification de leur niveau en anglais par un organisme privé. Ainsi l’Education nationale se décharge à nouveau sur un acteur privé pour la délivrance d’un diplôme universitaire. La privatisation de l’éducation s’accélère.
« Les candidats au brevet de technicien supérieur se présentent au moins à une certification en langue anglaise faisant l’objet d’une évaluation externe et étant reconnue au niveau international et par le monde socio-économique », décide le décret publié le 5 avril.
Le décret ne donne pas le nom des organismes capables de délivrer cette certification. Mais les critères pointent directement vers des organismes bien connus et des écoles privées qui y préparent. Les textes imposent cette certification aux candidats sans préciser qui en paiera le coût.
Cette mesure n’est pas vraiment une surprise. La décision avait été prise en février 2018. « Ce que nous voulons avec Jean-Michel Blanquer et avec Frédérique Vidal, c’est accélérer la transformation de son apprentissage », avait dit le premier ministre le 23 février 2018. « Parce que l’anglais est la « première langue » de la mondialisation et que bien la maîtriser, c’est mieux maîtriser son avenir. C’est pourquoi nous allons introduire, dès le lycée, une logique d’attestation de niveau en langues étrangères. Une attestation qui fait l’objet d’une reconnaissance internationale. En clair, à terme, chaque étudiant à la fin de son lycée et au plus tard en fin de licence aura passé un test de type Cambridge, IELTS, financé par l’Etat, et qui donnera donc un niveau reconnu partout à l’étranger ».
On en a avec ce décret une première application. En 2018, la mesure avait été accueillie vertement par les enseignants de langues de l’APLV. » Par ailleurs, les certifications TOEIC et TOEFL sont souvent obtenues après une période de bachotage centré sur des compétences peu transférables en situation réelle d’interaction. De plus, la durée de validité de ces certifications est limitée… L’APLV s’insurge contre le fait que l’Etat va dépenser des sommes importantes pour enrichir les organismes privés qui proposent ce genre de certifications », écrit l’association.
Le décret est publié au lendemain de la décision du ministre d’accorder le bac aux élèves des écoles privées hors contrat au vu de leur livret scolaire, ce qui revient à vendre le bac. Avec ce décret c’est encore un pas vers la privatisation. Adopter ce test c’est confier à une entreprise privée une partie d’un diplôme universitaire. Cela amène à revenir sur le monopole de l’Etat sur les diplômes, un principe fondamental en France. La brèche ainsi ouverte pourrait être exploitée par d’autres diplômes qui n’attendent que cela dans la formation générale comme dans la formation professionnelle.
François Jarraud